PRINCIPES POUR GUIDER LA RECHERCHE DE L'UNITÉ
ENTRE L'ÉGLISE CATHOLIQUE ET L'ÉGLISE COPTE ORTHODOXE
ET PROTOCOLE ANNEXÉ AUX PRINCIPES

 

23 juin 1979

 

Les Principes et le Protocole établis le 23 juin 1979 par les membres de la Commission mixte internationale entre l'Église catholique et l'Église copte orthodoxe, ont été soumis au Pape Jean-Paul II et au Pape Chenouda III, qui les ont approuvés et signés.

 

PRÉAMBULE

Grâce à des réunions d’une commission mixte officielle établie en 1973, à des consultations théologiques non officielles commencées en 1971 et grâce à d’autres échanges officiels et informels, l’Église catholique et l'Église copte orthodoxe ont fait des progrès importants dans la compréhension des liens profonds de foi et de vie chrétienne qui existent entre elles, malgré une séparation qui a duré quinze siècles. Nous avons surmonté les difficultés du passé en ce qui concerne notre foi dans le mystère du Verbe incarné et nous pouvons aujourd'hui professer en commun notre foi dans le mystère de notre rédemption. Nous avons le même sacerdoce reçu des apôtres et nous célébrons donc la même eucharistie du Seigneur dont nous devenons membres par le même baptême. Nous partageons beaucoup d'autres aspects de la vie chrétienne proclamée par les Apôtres et transmise par les Pères de l’Église.

En même temps, il y a quelques divergences canoniques et dogmatiques qui nous empêchent de jouir de cette pleine communion qui existait autrefois entre les Églises de Rome et d'Alexandrie. Des efforts sérieux ont été accomplis afin de surmonter ces divergences. Cependant, il a semblé utile de faire le point sur ces efforts jusqu’à ce jour, d'en relever les aspects positifs et d’en discerner les déficiences.

Il a semblé que l’élection de Sa Sainteté le Pape Jean-Paul II était une occasion opportune pour faire cette évaluation. Sa Sainteté le Pape Chenouda III a envoyé au nouvel évêque de Rome une délégation officielle de l’Église copte orthodoxe chargée de lui offrir ses vœux, de lui dire l’importance qu'il attache au dialogue en cours, et de discuter avec les personnes responsables à Rome la manière d'améliorer et de renforcer ce dialogue afin qu’il atteigne son but : la pleine communion entre les deux Églises.

Les participants à ces conversations ont été grandement encouragés par le message du Pape Chenouda III et par la réponse chaleureuse du Pape Jean-Paul II. Les textes de ces messages contiennent des réflexions et des directives très importantes pour progresser dans la recherche commune. De plus, les participants reconnaissent que des éléments nombreux et importants doivent être trouvés dans les différents rapports et communications rédigés au cours de ces huit dernières années. Cependant, pour que ces éléments puissent porter des fruits parmi le clergé et les fidèles des deux Églises, ils doivent être compris dans le contexte de certains principes généraux qui peuvent guider la recherche de l'unité dans un esprit fait de loyauté et de confiance réciproques, et de volonté renouvelée de réaliser le commandement du Seigneur de l’Église « que tous soient un ».

Ces principes sont maintenant présentés à nos Églises en espérant qu'ils seront sérieusement étudiés et assimilés par nos fidèles, et en priant pour que l'Esprit Saint nous guide de manière à ce qu’ils soient appliqués effectivement dans le travail qui est encore à faire.

1. L'objectif de nos efforts est une pleine communion de foi s'exprimant elle-même dans une communion de vie sacramentelle et dans l’harmonie des relations réciproques entre nos deux Églises sœurs dans de l’unique peuple de Dieu.

2. Nous sommes deux Églises apostoliques dans lesquelles, en vertu de la succession apostolique, nous possédons la pleine vie sacramentelle, en particulier l'eucharistie, même si la communion eucharistique n'a pas encore été réalisée entre nous, puisque nous n’avons pas complètement résolu nos divergences.

3. C'est pourquoi la résolution de ces divergences est de la plus grande importance pour que nos Églises puissent donner une expression plus adéquate à la communion qui existe déjà entre elles de manière imparfaite. Elles seront alors capables de donner de leur foi et de leur vie dans le Christ, un témoignage meilleur que celui qu'elles peuvent donner dans leur état actuel de division car toutes les Églises catholiques locales et l’Église copte se reconnaîtront alors pleinement comme la réalisation, dans leurs territoires, de l’Église une, sainte, catholique et apostolique.

4. L'unité que nous envisageons ne signifie en aucun cas absorption de l’une par l’autre, ou domination de l’une sur l’autre. Elle est au service de chacune, pour aider chacune à mieux vivre les dons propres qu'elle a reçus de l'Esprit de Dieu.

5. L'unité présuppose que nos Églises continuent à avoir le droit et le pouvoir de se gouverner elles-mêmes selon leurs propres traditions et disciplines.

6. Cette autonomie légitime ne conteste pas la nécessité des relations réciproques entre nos Églises. Lorsque les Églises pourront vivre plus étroitement ensemble, en communion de foi et de charité réciproques, elles développeront de nouveaux contacts et de nouveaux types de relations et trouveront ainsi la manière de traiter des questions qui sont l'objet de leur commun intérêt et de leur préoccupation. Ce processus aidera aussi les Églises à parvenir à une meilleure compréhension de la signification et de l’étendue de la primauté dans l’Église, un concept qui existe dans nos deux Églises, mais au sujet duquel des différences canoniques et doctrinales demeurent, qui empêchent notre pleine communion. Entre-temps, d’importantes questions quant à la foi, aux problèmes pastoraux et aux besoins réciproques peuvent être traitées par des communications fraternelles et des consultations entre les primats ou par d’autres moyens qui seront jugés utiles.

7. C'est à la lumière de tous les principes précédents que nous tâcherons de résoudre les divergences qui existent encore entre nous, et qui concernent notre compréhension des structures par lesquelles l'unité et l'intégrité de la foi de l’Église doivent être servies.

8. C'est seulement dans la perspective de la recherche de cette unité que nous comprenons que la pastorale, la collaboration mutuelle et le témoignage commun devraient se développer actuellement en Égypte. Aucune de ces activités ne peut avoir comme objectif le passage de fidèles d’une Église à l'autre, mais doit être au service de toute la communauté chrétienne en Égypte. C'est pourquoi il est important qu’il y ait des contacts fréquents et réguliers entre les évêques et les supérieurs religieux de l’Église catholique et ceux de l’Église copte orthodoxe :

a) pour créer une atmosphère de confiance et de loyauté réciproques ;

b) pour faire face aux graves besoins pastoraux des fidèles des deux communautés ;

c) pour éviter les malentendus qui peuvent surgir ;

d) pour résoudre des cas particuliers qui pourraient être source de malentendus ou de frictions.

Des contacts fréquents à tous les niveaux de la vie de l’Église aideront aussi à éviter des paroles, des articles, des homélies, des instructions et des attitudes qui pourraient blesser l'une ou l'autre Église dans ses autorités ou dans ses fidèles.

9. Tout cela devrait être inspiré par les principes énoncés dans diverses communications faites par le Saint-Siège de Rome aux évêques catholiques d'Égypte et à Sa Sainteté le Pape Chenouda III, et devrait être en conformité avec de tels principes.

10. Même si nous n'adoptons pas toutes les positions de l’autre, nous devrions respecter ces positions comme faisant partie de son héritage historique et ne pas exclure la possibilité d'arriver à un accord sur celles-ci.

11. Une fois l'unité réalisée, la richesse des différentes traditions chrétiennes existant en Égypte trouverait une expression claire et légitime pour l'enrichissement de tous au sein de l'unique Église copte sous la direction du Pape d'Alexandrie et Patriarche du Siège de Saint Marc.

12. Nous reconnaissons que l’unité est un don de Dieu à son Église. Son expression concrète devrait s'harmoniser avec la tradition vivante de chaque Église qui permet de nouvelles perceptions et une compréhension plus profonde de la manière dont Dieu désire que les Églises affrontent les problèmes qui se présentent aujourd'hui à tous les chrétiens et servent le monde dans l'unité et dans l'amour.

Le 23 juin 1979.

 

PROTOCOLE

1. Nous demandons que les autorités des deux Églises donnent une réaction officielle aux Principes proposés le plus rapidement possible et au plus tard à la fin du mois d'octobre. Si des changements sont à apporter à ces Principes, un petit comité se réunira immédiatement pour les discuter et parvenir à un accord à leur sujet.

2. Le document approuvé sera communiqué par chaque Église à ses évêques et sera publié pour l'usage d’autres personnes et groupes que ce document concerne.

3. Nous pensons que la composition et les fonctions de la commission mixte internationale et du comité mixte local ont besoin d’être ultérieurement révisées et réformées.

4. Entre-temps, on établira deux comités : l'un pour diriger les études et l'autre pour orienter les implications pratiques. Ces comités devraient être restreints, composés de deux ou trois membres de chaque Église, de manière qu'ils puissent se rencontrer facilement et fréquemment et être en mesure de se tenir à un programme de travail régulier.

5. Les deux comités pourraient faire appel librement aux services d'autres experts et ne devraient pas avoir le sentiment que tout le travail doive incomber aux membres permanents.

6. Le comité pour les implications pratiques établira au moins trois sous-comités : pour les écoles, pour les institutions sociales et pour les projets pastoraux. Chacun de ces sous-comités aura la responsabilité d’étudier les possibilités de collaboration dans le domaine qui lui est propre. Ils chercheront à s’associer l’appui et l’activité concrète de personnes et d’institutions qui pourraient être engagées dans cette coopération. Ces sous-comités devraient fournir des rapports réguliers et fréquents sur leur travail, au moins trois fois par an.

7. Les comités et leurs sous-comités conseilleront les personnes intéressées au sujet de Principes élaborés à Rome au cours des conversations de juin 1979, et au sujet des possibilités d'action concrète, etc. Ils aideront à coordonner cette action. Si des questions surgissent à propos de l'application ou de la non-application des Principes acceptés, le problème devra être porté à l'attention de l’autorité immédiatement compétente ; si cette procédure n'aboutit pas, on devra se référer aux autorités supérieures, selon ce qui est requis par les circonstances.

8. Une des principales tâches des deux comités sera d'établir un programme et des priorités. Ils se baseront sur les rapports des quatre commissions (mais sans s’y limiter). Ils fourniront aussi une esquisse détaillée des études théoriques et pratiques nécessaires pour aider la marche vers l’unité. Ils fixeront leurs priorités et leurs liens, et signaleront les personnes les plus indiquées pour y participer, en Égypte ou en dehors de l'Égypte.

9. Il est particulièrement important d’établir et de réaliser aussi tôt que possible un programme pour porter à l'attention du clergé et du laïcat des deux Églises les Principes qui ont été déterminés et l'action progressive qui peut être menée pour les réaliser. Aucune recherche sérieuse de l'unité entre nos Églises ne peut être promue sans une information et une sympathie qui demandent la participation de l'Église tout entière. On recommande que les différentes propositions présentées par la Commission mixte internationale et par le Comité mixte local soient réexaminées et mises en application, en vue de réaliser cela et d’assurer la coopération entre les hiérarchies de nos Églises.

Le 23 juin 1979.

 

Service d'information 76 (1991/I) 31-33