DÉCLARATION MÉTHODISTE D’ASSOCIATION AVEC LA DÉCLARATION CONJOINTE SUR LA DOCTRINE DE LA JUSTIFICATION

Accompagnée de la Déclaration officielle commune
signée par les Représentants de l'Eglise catholique,
de la Fédération luthérienne mondiale et du Conseil méthodiste mondial

Séoul, Corée du Sud, 23 juillet 2006

 

1. Après avoir été officiellement approuvée par la Fédération luthérienne mondiale et par l'Église catholique romaine, la « Déclaration officielle commune de la Fédération luthérienne mondiale et de l'Église catholique romaine » a été signée par les deux partenaires le 31 octobre 1999, confirmant ainsi la « Déclaration conjointe sur la doctrine de la justification ». En exprimant leur compréhension commune des vérités fondamentales de la doctrine de la justification par la grâce de Dieu à travers la foi en Christ, cet important accord entre catholiques et luthériens exprime un consensus d’une vaste portée concernant la controverse théologique qui avait été une des causes principales de la division entre les Églises occidentales au seizième siècle.

2. Nous, Églises unies dans le Conseil méthodiste mondial, saluons cet accord avec une grande joie. Nous déclarons que la commune compréhension de la justification, ainsi qu’elle est exposée dans la Déclaration conjointe sur la Doctrine de la justification (DCDJ 15-17) correspond à la doctrine méthodiste. Nous sommes particulièrement reconnaissants de l’approche trinitaire par laquelle l’œuvre salvifique de Dieu est exposée dans ces paragraphes :

15. Notre foi commune proclame que la justification est l’œuvre du Dieu trinitaire. Le Père a envoyé son Fils dans le monde en vue du salut du pécheur. L’incarnation, la mort et la résurrection du Christ sont le fondement et le préalable de la justification. De ce fait, la justification signifie que le Christ lui-même est notre justice, car nous participons à cette justice par l'Esprit-Saint et selon la volonté du Père. Nous confessons ensemble : c’est seulement par la grâce au moyen de la foi en l’action salvifique du Christ, et non sur la base de notre mérite, que nous sommes acceptés par Dieu et que nous recevons l'Esprit-Saint qui renouvelles nos cœurs, nous habilite et nous appelle à accomplir des œuvres bonnes.

16. Tous les êtres humains sont appelés par Dieu au salut en Christ. Nous sommes justifiés en lui seul lorsque nous recevons ce salut dans la foi. La foi elle-même est don de Dieu par le Saint-Esprit qui agit dans la communauté des croyants par la parole et les sacrements et conduit les croyants vers ce renouvellement de la vie que Dieu parachève dans la vie éternelle.

17. Ensemble nous sommes convaincus que le message de la justification nous renvoie d’une manière particulière au centre du témoignage néotestamentaire de l’agir salvateur de Dieu en Christ : il nous dit que, pécheurs, nous ne devons notre vie nouvelle qu’à la miséricorde de Dieu qui nous pardonne et fait toute chose nouvelle, une miséricorde qui nous est offerte et est reçue dans la foi et que nous ne pouvons jamais mériter sous quelque forme que ce soit.

3. Nous sommes également d’accord avec ce que luthériens et catholiques disent ensemble concernant quelques-unes des questions cruciales de la doctrine de la justification, qui étaient l’objet de controverses entre eux depuis l’époque de la Réforme (cf. DCDJ 19, 22, 25, 28, 31, 34, 37). En outre, nous acceptons les explications que luthériens et catholiques donnent, respectivement, dans les paragraphes 20-21, 23-24, 26-27, 29-30, 32-33, 35-36 et 38-39, concernant leurs positions respectives sur ces questions, et nous ne considérons pas ces différences d’accentuation comme une cause suffisante de division entre l’une ou l’autre partie et les méthodistes.

4. Le Mouvement méthodiste a toujours estimé devoir beaucoup à l’enseignement biblique sur la justification telle que l’entendaient Luther et les autres réformateurs, et plus tard les Wesleys. Mais il a toujours accueilli également des éléments de la doctrine de la justification appartenant à la tradition catholique de l'Église primitive orientale et occidentale. C’est ce qui a donné une image distinctive à sa propre doctrine de la justification. Par rapport aux « différences qui subsistent dans le langage, les formes théologiques et les accentuations particulières », et qui « ne permettent plus d’infirmer le consensus atteint dans des vérités fondamentales » de la doctrine de la justification entre luthériens et catholiques (DCDJ 40), l’enseignement méthodiste peut être décrit comme suit :

4.1 Selon John Wesley, la doctrine du péché originel est une doctrine chrétienne essentielle. Nous ne pouvons pas nous-mêmes guérir la corruption de la nature humaine. Aux effets destructeurs de la Chute s’oppose la disponibilité universelle de la grâce antérieure (Sermon 85, Sur la préparation de notre propre salut, III.4). Le fait que l’on puisse répondre à l’appel de Dieu dépend uniquement de l’action préalable de Dieu. Selon Wesley, la grâce de Dieu « assiste » mais « n’impose pas » la réponse humaine (Sermon 63, La diffusion générale de l’Évangile, 11). Par la grâce de Dieu, les croyants ont le mandat et le pouvoir d’annoncer aux gens que Dieu s’est réconcilié avec le monde et de les exhorter au nom de Jésus Christ à se réconcilier avec Dieu (2 Corinthiens 5,20).

4.2 Le profond lien entre le pardon des péchés et la justification, entre justification et sanctification, a toujours été d’importance cruciale pour la compréhension méthodiste de la doctrine biblique de la justification. John Wesley voyait dans le salut une double action de la grâce de Dieu : « Par la justification nous sommes délivrés de la culpabilité du péché et rétablis dans la faveur de Dieu ; par la sanctification nous sommes délivrés du pouvoir et des racines du péché, et rétablis à l’image de Dieu » (Sermon 85, II.1). L’acceptation rédemptrice dans la communion avec Dieu, et le renouvellement créateur de nos vies sont entièrement l’œuvre de la grâce de Dieu.

4.3 Le salut dépend de la foi « afin que ce soit par grâce ... que la promesse demeure valable » (Romains 4,16) – cette phrase paulinienne pourrait très bien être la devise du Mouvement méthodiste. Celui-ci a débuté comme un mouvement missionnaire après que les frères Wesley et leurs amis eurent vécu l’expérience de l’Évangile de salut, qui libère, uniquement par la foi. Ce n’est que par la grâce de Dieu que les êtres humains sont sauvés uniquement par la foi. Par la foi nous nous engageons dans l’œuvre salvatrice, rédemptrice, apaisante et rénovatrice de la grâce et de l’amour de Dieu dans nos vies. Pour cette raison, une foi chrétienne authentique est toujours une « foi agissant par l’amour » (Galates 5,6). Ni la foi, ni l’amour ne sont le résultat d’efforts humains, mais par l’appel de Dieu à la foi et par l’effusion de l’amour de Dieu, nous, êtres humains, sommes inclus dans la réalité du salut divin.

4.4 Dans l’enseignement méthodiste, la prédication, la liturgie et l’hymnodie méthodistes, une théologie de la grâce comporte non seulement l’assurance du pardon de nos péchés, mais également la promesse que nous sommes libérés du pouvoir du péché. La théologie méthodiste s’est efforcée de prendre au sérieux l’assertion de Paul : « mais maintenant, libérés du péché et devenus esclaves de Dieu, vous portez les fruits qui conduisent à la sanctification, et leur aboutissement, c’est la vie éternelle » (Romains 6,22). C’est la raison pour laquelle Wesley a développé la doctrine de la « perfection chrétienne » ou « sanctification totale » (cf. 1 Thessaloniciens 5,23), qu’il considérait comme étant au cœur de l’enseignement méthodiste. Cette doctrine a trouvé différentes interprétations au cours de l’histoire du Mouvement méthodiste. Toutefois, dans l’enseignement méthodiste, cinq points sont toujours demeurés clairs :

a) « sanctification totale » ou « perfection chrétienne » n’est rien d’autre qu’« aimer Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta pensée » et « ton prochain comme toi-même » (cf. Matthieu 22,37-39) ; 1 Jean 2,5) ;

b) la « perfection chrétienne » n’est pas la perfection absolue, qui n’appartient qu’à Dieu, et elle « n’implique pas une exemption de l’ignorance, ni de l’erreur, ni des infirmités, ni des tentations » (Wesley, Sermon 40, Perfection chrétienne, 1.9) ;

c)  bien que tout notre être soit plein de l’amour de Dieu, qui a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit-Saint (Romains 5,5), cela restera toujours un don de Dieu et l’œuvre de la grâce de Dieu et jamais notre mérite ni notre accomplissement humains ;

d) l’espoir de vaincre le péché ne devrait jamais nous conduire à nier ou à négliger le danger de récidive ou d’être pris par le pouvoir du péché. C’est ainsi qu’il est dit dans 1 Jean 1,6-9 : « Si nous disons : "Nous sommes en communion avec lui", tout en marchant dans les ténèbres, nous mentons et nous ne faisons pas la vérité. Mais si nous marchons dans la lumière comme lui-même est dans la lumière, nous sommes en communion les uns avec les autres, et le sang de Jésus, son Fils, nous purifie de tout péché. Si nous disons : "Nous n’avons pas de péché", nous nous égarons nous-mêmes et la vérité n’est pas en nous. Si nous confessons nos péchés, fidèle et juste comme il est, il nous pardonnera nos péchés et nous purifiera de toute iniquité ».

e) Ceux qui sont justifiés et sanctifiés par la grâce de Dieu lutteront contre la tentation et le péché durant toute leur vie. Mais dans cette lutte ils sont fortifiés par la promesse de l’Évangile, selon laquelle Dieu, en Christ, a brisé le pouvoir du péché. Même si « la convoitise égoïste du vieil homme, qui le met en opposition à Dieu » (DCDJ 28), reste présente dans la vie des justifiés, la grâce de Dieu « règne pour la vie éternelle par Jésus Christ » (Romains 5,21).

4.5 Pour les méthodistes, la loi et l’Évangile sont l’une et l’autre des expressions de la parole de Dieu et de la volonté de Dieu. Pour nous guider dans le mode de vie et dans le bien (cf. Deutéronome 30,15-20), Dieu, dans son amour, nous a donné la loi qui se résume dans le commandement d’aimer Dieu et notre prochain. En tant qu’êtres humains, nous ne pouvons pas, de nous-mêmes, suivre cette voie. Parce que nous avons tous omis de faire la volonté de Dieu, la loi sert à présent à nous accuser et à nous reconnaître coupables de péché (cf. Romains 3,21). Dieu nous sauve et nous donne la vie par l’amour révélé et exprimé dans la vie et la mort de Jésus Christ. Bien que la loi n’ait plus le pouvoir de condamner ceux qui croient en Jésus Christ, elle reste, telle qu’elle est résumée dans le commandement d’amour, un guide indispensable à la volonté de Dieu.

4.6  L’assurance de la foi et l’assurance du salut ont toujours été au cœur même de la prédication méthodiste. Cette assurance n’est pas vue comme une certitude de possession mais comme la fiabilité d’un rapport fondé sur l’amour de Dieu. Ce rapport est vécu en utilisant les « moyens de la grâce », surtout en étudiant l’Écriture et en recevant la Cène du Seigneur. Ce sont les signes extérieurs, ordonnés par Dieu, par lesquels il nous apporte sa grâce. Pour avoir l’assurance, par le témoignage de l'Esprit-Saint, que nous sommes enfants de Dieu (Romains 8,16), la source de paix et de joie est dans la vie de ceux qui parviennent à croire en Jésus Christ. Dans la terminologie wesleyenne, « sainteté » et « félicité » sont l’une et l’autre un don de la grâce de Dieu.

4.7 « La foi agissant par l’amour » (Galates 5,6) est considérée comme la racine de tout le bien qui découle de la vie de ceux qui croient en Jésus Christ. Œuvres de piété et œuvres de miséricorde sont des fruits de l’Esprit dans la vie de ceux qui suivent Jésus. Ces œuvres aident également les croyants à vivre leur vie en communion avec Dieu et à être des « ouvriers avec Dieu » (1 Corinthiens 3,7) dans le terrain de la mission de Dieu et dans le ministère envers les pauvres et envers ceux qui ont le plus besoin de l’amour de Dieu. Mais toutes ces œuvres sont l’œuvre de la grâce de Dieu ; ou, comme dit John Wesley dans son sermon sur « Mettez en œuvre votre salut » (Philippiens 2,12) : « Dieu agit, donc vous pouvez agir. Dieu agit, donc vous devez agir" (Sermon 85, III, 2).

5. En tant que méthodistes, nous sommes reconnaissants de ce que, sur la base d’un tel accord, les Églises luthériennes et méthodistes, dans quelques pays, se sont reconnues réciproquement comme appartenant à la seule et unique Église de Jésus Christ et ont déclaré la pleine communion de chaire et d’autel. Notre vive espérance est que, dans un avenir proche, nous pourrons également établir des rapports plus étroits avec les luthériens en d’autres endroits et avec l'Église catholique romaine, selon cette déclaration de notre commune compréhension de la doctrine de la justification.

 

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Déclaration officielle commune

Par cette déclaration, le Conseil méthodiste mondial et ses Eglises membres confirment leur accord doctrinal fondamental avec les enseignements exprimés par la Déclaration conjointe sur la Doctrine de la justification signée à Augsburg, le 31 octobre 1999, au nom de la Fédération luthérienne mondiale et de l’Eglise catholique.

Les partenaires signataires de la Déclaration conjointe sur la Doctrine de la justification sont heureux d’accueillir la Déclaration d’association ci-dessus du Conseil méthodiste mondial et de ses Eglises membres déclarant et démontrant l’adhésion des méthodistes à l’accord sur des vérités fondamentales de la doctrine de la justification, tel que cela est exprimé dans la Déclaration conjointe sur la Doctrine de la justification.

Sur la base de leur affirmation commune de vérités fondamentales de la doctrine de la justification, les trois partenaires s’engagent à faire tout leur possible pour approfondir à travers l’étude théologique, l’enseignement et la prédication leur compréhension commune de la justification.

Catholiques, luthériens et méthodistes considèrent cet événement et cet engagement comme partie intégrante de leur recherche de la pleine communion et du témoignage commun dans le monde que désire le Christ pour tous les chrétiens.

Service d'information 122 (2006/II), pp.60-62.