DE LA RÉFLEXION À LA RÉCEPTION
LES DÉFIS À LA COLLABORATION ENTRE L'ÉGLISE CATHOLIQUE ET LE COE

 

ARAM Ier
Catholicos de Cilicie
Modérateur du Comité central du Conseil œcuménique des Églises

 

Genève, 17 novembre 2005

 

Au moment où, comme représentants du Conseil œcuménique des Églises (COE) et de l'Église catholique, nous entamons ensemble une réflexion sur l’avenir de l’œcuménisme, je crois que le Groupe mixte de travail (GMT), qui célèbre actuellement son 40ème anniversaire, a un rôle vital à jouer dans l’étude et l’élaboration des perspectives et des priorités émergentes. L’objet de mon exposé est double : tout d’abord, une évaluation critique des rapports et de la collaboration entre l'Église catholique et le COE, en particulier dans le cadre du GMT, et ensuite, déterminer par une approche réaliste et tournée vers l’avenir, les domaines spécifiques où une collaboration plus approfondie est possible et nécessaire.

 

1) Un parcours pour créer la confiance

Les rapports et la collaboration entre l'Église catholique et le COE après le Concile Vatican II, peuvent être très justement présentés comme un parcours pour créer la confiance. Après une longue période de tensions et d’éloignement, le GMT a suscité un esprit de rapprochement et de compréhension mutuelle avec les Églises orthodoxes et protestantes. Vatican II a ouvert une nouvelle page dans l’histoire du mouvement œcuménique. Cet esprit s’est exprimé à travers des déclarations communes, des dialogues bilatéraux, des proclamations conjointes et des visites réciproques. La création du GMT a été une manifestation concrète de l’aggiornamento et de l’ouverture œcuménique de Vatican II. Toutefois, le chemin œcuménique ouvert par Vatican II n’était pas facile. Après tant d’années de controverses doctrinales, il n’était pas aisé de changer les attitudes. Néanmoins, en dépit de nombreuses difficultés et de défis au niveau mondial, régional et local, le GMT a poursuivi son chemin, bien qu’à un rythme lent, et est resté fidèle à son mandat.

En tant que membre du Comité central et Modérateur depuis 1991, j’ai suivi ce parcours de près. J’ai fait de nombreuses propositions, j’ai partagé des critiques et exprimé ce que j’attendais de cette importante structure de collaboration œcuménique. Je considère les relations et la collaboration entre l'Église catholique et le COE comme un domaine particulier d’importance vitale. Nous avons encore un long chemin à parcourir ensemble. Beaucoup de questions cruciales et de problèmes importants d’intérêt commun nous attendent, qui exigent un examen sérieux. Nous sommes appelés à élargir notre compréhension mutuelle, à approfondir l’esprit fraternel et à renforcer notre engagement à travailler ensemble. Nous sommes donc appelés à mettre en valeur, avec un engagement renouvelé, notre parcours en commun pour créer la confiance.

 

2) Le GMT: un cadre pour le dialogue

Une des contributions les plus importantes du GMT au mouvement œcuménique a été d’offrir aux principales traditions de la chrétienté l’occasion d’entreprendre un dialogue multilatéral. Bien que la multiplication des dialogues bilatéraux ait affaibli l’engagement des Églises dans le dialogue multilatéral, le GMT continue, encore que dans une mesure limitée, à offrir un forum œcuménique qui nous encourage à examiner les problèmes d’intérêt commun, à partager nos expériences, à échanger nos vues et à éclaircir les malentendus courants. En fait, être à l’écoute les uns des autres nous a permis de réaliser que :

a) Bien qu’il n’y ait qu’un seul mouvement œcuménique, nos conceptions de l’œcuménisme sont différentes. Le COE et l'Église catholique ont plusieurs fois souligné « l’unité » du mouvement œcuménique et se sont efforcés de promouvoir la cause de l’œcuménisme. Toutefois, nos méthodes pour faire l’œcuménisme sont différentes. Nos priorités œcuméniques sont différentes. Nous attendons du mouvement œcuménique des choses différentes. Mais nous sommes des partenaires et nous avons pris un engagement ferme dans l’œcuménisme. Nous sommes appelés à renforcer et à exprimer clairement « l’unité » du mouvement œcuménique. Mais comment devons-nous le faire ? Jusqu’à quel point les différences sont-elles légitimes ou sont-elles causes de division ? Peut-on envisager une vision commune de l’œcuménisme où les diversités interagissent de manière créative et cohérente ?

b) Nous avons rendu notre témoignage œcuménique à partir d’hypothèses ecclésiologiques différentes. Vatican II a été un tournant dans l’attitude ecclésiologique de l'Église catholique à l’égard des autres Églises. Toutefois, à mon point de vue, l'Église catholique n’a pas complètement abandonné le concept de « retour » à la « plénitude » de vérité et d’unité qui subsiste dans l'Église catholique romaine. Celle-ci continue de nous rappeler la communion « incomplète » qui existe avec les autres Églises. Néanmoins, le fait que l'Église catholique considère les autres Églises comme des « Églises et Communautés ecclésiales » est plus important. Les implications de cette nouvelle approche se voient clairement dans les études entreprises par le GMT. La question est la suivante : après tant d’années de dialogue et de réflexion en commun, pouvons-nous élaborer une base ecclésiologique commune qui puisse fournir un cadre approprié ou un point de départ pour aborder des questions controversées, comme la reconnaissance mutuelle du baptême, du ministère et de l’Eucharistie, la primauté et l’autorité dans l'Église, etc. ?

c) Parce que notre vision de l’unité est basée sur notre autocompréhension ecclésiologique, nous avons une conception différente de l’unité visible. Dans ce contexte, il est important de nous rappeler, en premier lieu, que même au sein du COE les Églises diffèrent considérablement dans leur perception de l’unité ; en second lieu, grâce aux efforts constants de Foi et Constitution, les Églises, y compris l'Église catholique, sont parvenues à un accord concernant les conditions requises et les hypothèses nécessaires pour manifester la pleine et visible unité de l'Église. Bien que nous puissions garder des approches différentes de l’unité, notre engagement envers elle est ferme, parce que nous croyons que l’unité visible constitue la raison d’être du mouvement œcuménique. En effet, la croissante participation de l'Église catholique à des conseils d’Églises et la publication par le Vatican du nouveau Directoire œcuménique, sont des signes tangibles de « l’engagement irréversible et irrévocable » de l'Église catholique dans le mouvement œcuménique. La question est donc : les différents modèles d’unité développés au cours des ans par Foi et Constitution peuvent-ils nous aider à adopter un modèle de consensus ? Le concept de « communauté conciliaire », englobant différents concepts d’unité, peut-il devenir un modèle mutuellement acceptable ?

 

3) Une collaboration avec des hauts et des bas et des incompatilités

a) Nos relations et notre collaboration n’ont pas toujours été faciles. Elles ont parfois connu de sérieuses difficultés et affronté des crises de diverse nature et importance. Nous avons vécu des moments d’espoir et également des moments de frustration.  Je voudrais mentionner quelques-unes des situations difficiles de ces quinze dernières années : la forte réaction de l'Église catholique à la consultation sur l’uniatisme (1991) organisée par le COE à la demande des Églises orthodoxes orientales, l’attitude critique du COE à l’égard de la Déclaration « Dominus Iesus » de la Congrégation pour la Doctrine de la foi (2000) et la Lettre encyclique du Pape Jean-Paul II, « Ecclesia de Eucharistia » (2003). Pour l'Église catholique, la participation croissante de partenaires œcuméniques au COE est restée une source de préoccupation, malgré l’assurance donnée par le Conseil que ce ne sont pas des organismes ecclésiaux et qu’ils ne pourront pas modifier les buts essentiels du Conseil.

b) Le fait que l’un des partenaires du GMT est une Église et l’autre une communauté d’Églises, crée souvent des problèmes et des confusions. Cette incompatibilité se remarque clairement dans le processus décisionnel et exécutif. Dans le cas de l'Église catholique, les décisions sont transmises pour application aux Églises locales. Le COE n’ayant aucune autorité sur les Églises membres, les décisions sont simplement transmises comme des recommandations.

c) La question de la réciprocité a souvent créé des contrariétés. Par exemple, de la part de l'Église catholique, la réciprocité n’a pas été au niveau qu’attendait le COE. En tant qu’Église, l'Église catholique considère probablement cette question sous un angle différent. Tout cela signifie que trop attendre de la collaboration entre l'Église catholique et le COE peut causer d’inutiles déceptions. Nous devons accepter les limites et les restrictions imposées par les différentes ecclésiologies, les exigences et les styles institutionnels différents. Mais en même temps, notre ferme engagement commun à la cause de l’œcuménisme exige de nous, d’une part, que nous examinions les moyens appropriés d'accroître la mesure de réciprocité et d’élever son niveau, et d’autre part, que nous transformions l’expression de nos réactions en une discussion loyale.

 

4) De la réflexion à la réception, de la divergence à la convergence

a) Ces préoccupations et ces défis doivent nous conduire à passer lentement et prudemment de la réflexion à la réception, de la divergence à la convergence. Le GMT a entrepris une bonne dizaine d’études portant sur des questions controversées et sur des problèmes d’actualité touchant principalement à la christologie, à la pneumatologie, à l’ecclésiologie et au domaine éthique et pastoral. Ces études, assez détaillées et substantielles, préparées dans un esprit œcuménique, gardent leur valeur théologique et leur importance œcuménique. Toutefois, le problème est qu’elles sont restées dans les placards du COE et du CPPUC. Combien d’Églises, de membres du clergé ou de théologiens sont-ils au courant du travail du GMT ? Son activité est limitée à un cercle restreint d’œcuménistes. Pour s’occuper de cette situation, le travail du GMT doit se rapporter à la vie de l'Église au niveau local, et les Églises doivent se l’approprier à travers un processus d’éducation œcuménique. Atteindre les Églises locales : j’estime que c’est une tâche essentielle qui attend le mouvement œcuménique dans les prochaines années.

b) Le travail du GMT n’a pas non plus atteint les Conseils d’Églises. Dans quelle mesure les études du GMT ont-elles influé sur la pensée et la vie programmatique du COE ? L’intérêt manifesté par les organes de direction du COE et des conseils régionaux et nationaux, ainsi que des organisations œcuméniques au sein du GMT, a été très modeste. L’intégration du travail du GMT et la collaboration avec l'Église catholique dans la vie et le témoignage œcuméniques devraient avoir une urgente priorité.

c) Les divergences actuelles devront finalement faire place à une convergence. Les différences sont une partie intégrante de notre vie œcuménique ; elles sont la projection des différents développements historiques vécus par les Églises, des différents milieux où elles vivent, ainsi que de la diversité de leurs attitudes doctrinales et de leur enseignement théologique. Ces divergences ne devraient cependant pas être la cause de tensions ni de polarisations. Elles ne devraient provoquer ni séparation ni isolement. Nos divergences doivent se compléter et s’enrichir les unes les autres à travers une stimulation et une interaction mutuelles. Elles doivent être considérées comme constituantes d’un unique tout. Nous devons articuler clairement cette conviction et cet engagement. Comment transformer des divergences en un processus de convergence ? C’est là une des tâches essentielles du GMT.

 

5) Le GMT doit rester un cadre particulier de collaboration et de communication

a) Le GMT est devenu essentiellement un groupe mixte d’étude. Sans minimiser l’importance vitale de l’étude, je pense que pour les grandes questions théologiques, doctrinales et œcuméniques, l’étude doit être réservée à Foi et Constitution. Compte tenu de la composition et de l’expérience de cet organisme, j’estime qu’il pourrait jouer un rôle primordial en engageant des études d’une grande portée et en assurant une diversité et une participation plus étendues. Le rôle du GMT peut consister à interpeller, à encourager et à stimuler.

b) De son côté, le GMT pourrait s’occuper des questions et des problèmes d’actualité qui ont une incidence immédiate sur la vie et le témoignage des Églises. Dans ce contexte, une tentative pour réunir dans un ensemble cohérent et sous forme de consensus, les conclusions et les recommandations de dialogues théologiques bilatéraux, pourrait avoir une importance particulière. En outre, la participation à la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, un apport catholique accru aux différents programmes du COE, la préparation de grandes conférences œcuméniques, des visites et des invitations réciproques aux principales manifestations de chacun, renforceraient et approfondiraient la collaboration entre l'Église catholique et le COE.

c) Dans un monde d’incertitudes et de tensions, les personnes attendent de plus en plus que les Églises parlent d’une seule voix. Le GMT peut offrir le cadre global dans lequel le COE et l'Église catholique peuvent aborder ensemble des questions d’intérêt commun. Et les occasions et les problèmes sont si nombreux ! Une telle action commune changerait beaucoup de choses : elle contribuerait à l’avancement de la quête de l’unité visible ; elle renforcerait la fraternité œcuménique au niveau national, régional et mondial ; elle servirait de point de référence aux Églises locales ; elle donnerait une force spirituelle aux Églises qui vivent en situation de minorité.

d) Enfin, le GMT doit être un cadre pour la communication et l’échange d’informations. Ce rôle a une importance cruciale à une époque où l’information et la communication ont une grande part dans la structuration des relations, l’approfondissement de la collaboration, la construction des communautés, la prévention des crises et l’orientation des sociétés. C’est pourquoi je propose qu’au cours de la prochaine période, le GMT accorde la priorité à l’échange d’informations plutôt qu’à l’étude. Des informations partielles et une communication non objective peuvent conduire à des conclusions erronées. L’écoute mutuelle et une communication directe doivent être au centre de l’attention.

 

6) Les défis auxquels le GMT doit faire face

Au moment où le mouvement œcuménique entre dans une nouvelle période, une période pleine de risques et d’espoirs nouveaux, d’incertitudes et de perspectives nouvelles, je crois que le COE et l'Église catholique doivent être prêts à relever les défis suivants :

a) La participation de l'Église catholique à des Conseils d’Églises régionaux et nationaux est un important pas en avant. Et n’oublions pas que la collaboration entre catholiques, orthodoxes et protestants dans des Conseils d’Églises nationaux et régionaux dépasse de loin leur participation au GMT et même au COE. Cette réalité doit être sérieusement examinée et ses implications clairement précisées. Le GMT doit rester un organisme consultatif, et non pas une « agence opérationnelle ; toutefois, une collaboration mieux organisée et plus efficace devrait être établie avec les conseils régionaux et nationaux. Le GMT est chargé de superviser et de promouvoir les relations et la collaboration entre l'Église catholique et le COE. Je me demande si cette collaboration doit être limitée aux seuls « quartiers généraux ». À mon avis, le mandat confié au GMT implique un contexte plus large et d’une plus grande portée.

b) Le programme de notre collaboration œcuménique a besoin d’une révision. Les principales questions doctrinales et ecclésiologiques ont déjà été traitées par le GMT, par Foi et Constitution et par les dialogues théologiques bilatéraux. En outre, nos Églises sont plus divisées aujourd'hui sur les questions morales, éthiques et pastorales que sur les questions doctrinales. Elles ont besoin d’être guidées et aidées à régler les divisions sur ces questions à l’intérieur des Églises et entre celles-ci. Il est donc grand temps de concentrer notre attention sur les secteurs et les problèmes qui touchent à la vie quotidienne des Églises et des chrétiens.

c)  Alors que nous célébrons nos réalisations et que nous évaluons nos relations et notre collaboration au cours des quarante dernières années, nous devons également chercher de nouvelles méthodes de travail en commun. Une révision du mandat du GMT, établi à l’origine en 1966 et modifié en 1975, est indispensable dans un monde qui est l’objet d’un changement radical. Cet engagement exige une révision de structure, de style et de programme. Nous devons rechercher de nouveaux modèles de rapports et une nouvelle qualité de collaboration.

d) À plusieurs reprises, l'Église catholique a clairement fait comprendre que « les temps ne sont pas encore mûrs » pour son adhésion au COE. Il semble donc que l'Église catholique ait l’intention de rester sur cette position. Par conséquent, au COE, nous ne devons pas nourrir trop d’espoirs à ce sujet. Nous devons être réalistes et patients. « Inspirés par une même vision » (CUV, 4.1 et titre d’une étude du GMT), nous devons réaffirmer notre engagement commun à rendre un témoignage uni à l’Évangile du Christ et à son appel à l’unité visible, en sachant qu’un COE avec la pleine participation de l'Église catholique sera plus complet, plus global et plus efficace sur le chemin vers l’unité.

e) En entamant le processus de reconfiguration, le COE a précisé qu’il s’agissait non pas d’une question liée au Conseil mais d’un problème et d’un processus pan-œcuménique. C’est pourquoi j’espère vivement que l'Église catholique prendra la reconfiguration au sérieux. Il y a 40 ans les difficultés et les impératifs de la situation œcuménique étaient différents. Aujourd'hui, nous sommes devant un nouveau panorama œcuménique. En effet, les visages et les centres de la chrétienté ont changés, et les nouvelles réalités et les nouveaux défis œcuméniques qui émergent ont de fortes implications pour les relations et la collaboration entre l'Église catholique et le COE. Le GMT ne doit pas l’oublier au moment où il entre dans une nouvelle période de son histoire.

f) L’ecclésiologie dominera certainement le programme œcuménique dans les prochaines années. Par conséquent, le concept de « communio », que j’ai développé dans mon rapport au Comité central en 1999 et que S.Ém. le Cardinal Kasper a traité à l’Assemblée plénière du CPPUC en 2001, doit être réexaminé par le GMT. L’ecclésiologie de « communio », qui occupait une place centrale dans l'Église primitive, présente des perspectives stimulantes qui méritent un examen plus approfondi. Dans ce contexte, une attention particulière devrait être accordée aux questions de conciliarité, de primauté et d’autorité. Certaines des études faites dans le passé par Foi et Constitution et par le GMT pourraient être d’une très grande aide à ce sujet.

g) Selon les termes de son mandat, le GMT doit traiter les questions et les secteurs qui « facilitent ou qui entravent les relations GMT - Église catholique ». Jusqu’à présent, nous avons surtout mis l’accent sur ce qui peut « faciliter » la collaboration, et nous avons évité d’aborder les problèmes ou les domaines explosifs ou de nature à causer des divisions. J’estime que 40 ans de collaboration devraient nous avoir donné de l’expérience, du courage et de l’espoir pour approfondir et étendre notre base commune, afin d’articuler clairement notre commune vision œcuménique et de nous débattre de manière positive avec les questions controversées en les considérant comme des défis. Cela exige non seulement un changement de priorités dans les programmes, mais également un changement d’approche et de méthodologie.

h) Il y a quelques années, lorsque l’idée d’un Forum chrétien global a été avancée, j’avais des doutes et des réserves à ce sujet. En raison de la rapide croissance des formes de christianisme charismatique, pentecôtiste et évangélique, je me demande si le COE et l'Église catholique, qui ont joué un rôle important en donnant une forme à l’idée de forum, ne devraient pas, exceptionnellement, prendre la responsabilité de réunir les diverses expressions de la chrétienté dans la cadre d’un forum mondial. De plus, compte tenu du fossé qui s’élargit entre les Églises et l’œcuménisme institutionnel, je me demande également si le Forum chrétien global ne pourrait pas renforcer l’esprit œcuménique entre les Églises qui sont en dehors de la vie œcuménique et, en outre, promouvoir les valeurs et les buts de l’œcuménisme.

i) La réflexion et l’action, les rapports et la collaboration, sans une solide spiritualité, perdent beaucoup de leur importance et de leur crédibilité, L’œcuménisme, sous toutes ses formes et dans toutes ses expressions, doit s’appuyer sur le genre de spiritualité qui le conduira aux racines de la foi chrétienne. Je suis heureux l’accent fortement mis par l'Église catholique sur l’œcuménisme spirituel. Le renforcement de l’œcuménisme spirituel est une priorité majeure pour nous tous et nous devons nous y consacrer très sérieusement.

j) La question de l’aspect local et global a été un souci majeur dès l’origine du mouvement œcuménique moderne. La mondialisation, le dialogue et les contacts œcuméniques croissants ont accru l’importance de cette question dans ses diverses dimensions et manifestations. Une interaction plus poussée entre le local et le mondial s’impose. En conséquence, ce problème œcuménique, avec ses nouveaux défis et ses implications pour l’autocompréhension ecclésiologique et missiologique de l'Église, doit être réexaminé en ce XXIe siècle.

 

* * *

 

Nous entrons dans une nouvelle période de notre histoire œcuménique. Pour certains la conjoncture actuelle de l’œcuménisme est ambiguë, stagnante et incertaine. D’autres pensent que le mouvement œcuménique prend de nouvelles formes et a besoin d’un nouveau style et d’un nouveau programme. Personnellement, j’opte pour la seconde hypothèse.

Nous pouvons avoir des compréhensions différentes du panorama œcuménique qui change et réagir de façon différente à ce changement. Nous pouvons même avoir des priorités différentes. Mais notre vocation commune nous oblige à poursuivre notre collaboration pour l’unité visible de l'Église avec un élan renouvelé et un engagement toujours croissant.

 

ARAM Ier

Catholicos de Cilicie

 

16 novembre 2005

Antelias