COMITÉ INTERNATIONAL DE LIAISON JUIF-CATHOLIQUE

 

1ère RENCONTRE

Paris, 14-16 décembre 1971

 

Si on veut donner un aperçu du développement des relations entre l'Église et le Judaïsme pendant l'année 1970-1971, on peut distinguer deux niveaux de contacts et de travail: le niveau national et le niveau international, la situation dans les Églises nationales et la situation sur le plan de l'Église universelle.

1. Dans quelques pays, surtout aux États-Unis, le contact avec le Judaïsme est abordé d'une manière sérieuse. Des réunions d'études et de dialogues ont régulièrement lieu dans un vrai et profond respect mutuel. On y aborde les multiples questions qui se posent entre Juifs et chrétiens, dans un esprit de recherche sincère et d'approfondissement religieux.

Dans la grande majorité des nations et des diocèses on n'a pas encore aperçu la question et on n'en fait rien, la déclaration du Concile Vatican II « Nostra Ætate » y reste lettre morte.

2. Sur le plan de l'Église universelle.

a) Au mois de décembre 1970 a eu lieu, dans la salle du Secrétariat pour l'unité, une première rencontre entre les représentants du «Comité international Juif pour les Consultations Interreligieuses » et membres du Secrétariat pour l'Unité et d'autres dicastères romains de l'Église catholique. La réunion, qui était inaugurée par le Cardinal Willebrands, a étudié un projet de l'organisation des rapports entre l'Église catholique et le Judaïsme sur le plan international. Dans la session deux séries de questions ont été discutées: les questions qui concernent directement les relations entre Juifs et Catholiques et les questions qui regardent la collaboration entre les deux pour le bien être de l'humanité.

A la fin on a proposé la création d'un Comité de liaison qui guidera l'étude et le travail à faire dans les deux domaines.

b) Après la rencontre entre catholiques et Juifs au Secrétariat pour l'Unité des Chrétiens en décembre 1970, un Comité de liaison composé de cinq membres de chaque côté, a été créé.

Les membres catholiques, nommés par Son Éminence le Cardinal J. Willebrands avec l'approbation du Saint Père, sont:

Son Exc. Mgr. Roger Etchegaray

Archevéque de Marseille, président du Conseil des Conférences épiscopales européennes.

Son Exc. Mgr. Francis Mugavero

Évêque de Brooklyn (États-Unis), modérateur du Secrétariat pour les relations entre catholiques et Juifs du Conseil national des évêques catholiques aux États-Unis.

Rév. Père Jérôme Hamer

Secrétaire général du Secrétariat pour l'Unité des Chrétiens, Rome.

Rév. Père Bernard Dupuy

Secrétaire de la Commission épiscopale pour les relations avec le Judaïsme en France, Paris.

Mr. 1'Abbé Cornelius Rijk

Chargé du bureau pour les relations entre catholiques et juifs attaché au Secrétariat pour l'Unité, Rome.

Les membres juifs délégués du Comité international Juif pour les Consultations Interreligieuses, représentant les majeures organisations juives qui constituent ce Comité, sont:

Rabbin Arthur Hertzberg

Président du Comité international Juif pour les Consultations Interreligieuses, Englewood, N. I., Etats Unis.

Dr. Gerhart Riegner

Secrétaire général du Congrès Juif mondial, Genève.

 Rabbin Henry Siegman

Vice-président exécutif du Conseil Synagogal de l'Amérique, New York.

Rabbin Marc Tanenbaum

Directeur national des affaires interreligieuses du Comité Juif américain, New York.

Prof. Zvi Werblowsky

Président du Conseil Juif pour les contacts interreligieuses en Israël, Jérusalem.

Dr. Joseph Lichten

Observateur au nom du B’nai B’rith Antidefamation League.

Le but de ce Comité de liaison était défini ainsi: l'amélioration de la compréhension mutuelle entre les deux communautés religieuses, échange d'informations et coopération éventuelle dans les domaines de responsabilité et d'intérêt commun.

La première réunion du Comité de liaison eut lieu dans le Consistoire juif à Paris du 14 au 16 décembre 1971 et elle fut alternativement présidée par les présidents des deux délégations, le Rév. Père Jérôme Hamer et le Rabbin Arthur Hertzberg. Les participants furent accueillis par le grand Rabbin de France, Jacob Kaplan.

Étant donné que c'était la première fois que le Comité de liaison se réunissait dans sa composition officielle, un certain temps fut consacré à éclaircir l'arrière fond historique du Comité. Dans ce contexte, le Rév. Père Hamer, se référant à Regimini Ecclesiae art. 94 et art. 28, a expliqué la position et les limites de la tâche des représentants catholiques. Tandis qu'il appartient au Conseil pour les affaires publiques de l'Eglise catholique « de traiter tout ce qui concerne les rapports avec les gouvernements civils » (art. 28), il est de la compétence du Secrétariat de traiter « les questions concernant les Juifs sous l'aspect religieux » (art. 94). Cela ne restreint en aucune façon le champ d'exercice de notre fonction, mais nous trace une méthode et nous donne un éclairage. Du côté juif, on remarqua qu'une telle division des compétences cré souvent une certaine difficulté, parce que d'après la conception juive toutes les questions concernant les Juifs et le Judaïsme ont un aspect religieux. Une étroite collaboration entre les deux organismes à Rome fut dès lors suggérée et souhaitée.

Sur la base du « Memorandum of Understanding » de décembre 1970, le Comité étudia deux questions concernant les relations entre l'Église catholique et le Judaïsme: la manière dont la relation entre communauté religieuse, peuple et terre est conçue dans les traditions juive et catholique, la promotion des droits de l'homme et de la liberté religieuse.

Après ample discussion, on décida de nommer deux petites commissions mixtes, qui, composées d'experts dans les domaines respectifs seront chargés d'étudier ces deux problèmes en examinant les sources spirituelles de part et d'autre. Elles seront priées de soumettre leur rapport avant le ler novembre 1972 au Comité de liaison qui décidera de la manière dont il sera utilisé.

 On estima qu'il serait préférable que dans certains domaines on arrive, dans la mesure du possible, à une position commune, tandis que dans d'autres le but principal des études sera de clarifier tant les convergences que les différences en vue d'une compréhension mutuelle authentique.

Il y eut ensuite un échange d'informations sur la manière dont le monde juif considère l'Église et sur quelques situations où les Juifs se trouvent en difficulté ou en danger. La question de l'information réciproque fut considérée comme un point très important de l'ordre du jour des réunions futures.

Concernant la proposition d'une étude commune, soumise à Sa Sainteté le Pape Paul VI par Monsieur Robert Aron (en janvier 1970), on a observé que quelques points de cette proposition furent inclus dans le « Memorandum of Understanding » (Rome 1970) et que d'autres points seraient traités dans une étape ultérieure de nos études communes.

Les délibérations, qui, pour la première fois dans l'histoire, ont réuni des représentants officiels de la communauté juive mondiale et de l'Église catholique en un Comité de liaison qui continuera à se réunir par la suite, se sont déroulées dans un climat de franchise et de cordialité.

On espère que le Comité mixte sera capable de contribuer effectivement à la mise en œuvre des directives du Concile.