RAPPORT DE LA CONSULTATION INTERNATIONALE ENTRE L'ÉGLISE CATHOLIQUE
ET L'ALLIANCE ÉVANGÉLIQUE MONDIALE* 
(1993-2002)

 

ÉGLISE, ÉVANGÉLISATION ET LES LIENS DE LA KOINONIA

 

 

PRÉAMBULE

Nous, les représentants de deux traditions chrétiennes profondément divisées par leur histoire, avons entrepris une importante consultation qui, nous l'espérons, conduira dans le futur à de meilleures relations réciproques. Cette expérience a été pour nous d'une importance capitale. Nous appartenons à des communautés chrétiennes fortes et vivantes. L'Église catholique est la plus nombreuse communion chrétienne au monde et compte actuellement plus d'un milliard de fidèles. Le mouvement évangélique, qui a ses racines dans la Réforme, est aujourd'hui l'une des expressions les plus dynamiques de la chrétienté et elle fait preuve d'une croissance rapide dans plusieurs parties du globe. L'Alliance évangélique mondiale représente environ 150 millions d'adhérents parmi plus de 200 millions de chrétiens évangéliques. Toutefois, malgré quelques exceptions au cours des siècles, de Zinzendorf et Wesley à Schaff et Congar, les deux traditions ont longtemps vécu à l'écart l'une de l'autre. Nos communautés ont été séparées par les différences de leur histoire et de leur théologie, ainsi que par de regrettables stéréotypes et des malentendus réciproques. Cette désunion et ces malentendus ont été la cause d'hostilité et de conflits qui continuent de diviser le Corps du Christ jusqu'à nos jours.

Cependant, au cours des récentes décennies, un nombre considérable de catholiques et d'évangéliques ont appris à se connaître et ont ainsi découvert qu'ils avaient beaucoup de choses en commun. Ce changement est dû en partie à des facteurs situationnels: changements culturels et politiques dans la seconde moitié du vingtième siècle, progrès de la démocratie dans des pays auparavant soumis à des gouvernements répressifs et autoritaires, mélange de peuples et de confessions dans nos cultures de plus en plus diverses, découverte d'intérêts communs dans le domaine de l'éthique et dans la lutte contre la sécularisation. L'évolution des relations entre les communautés évangéliques et catholiques est à attribuer en partie à des développements internes, comme par exemple, chez les catholiques, les suites du Concile Vatican II et, parmi les évangéliques, l'impact de la Convention de Lausanne. Enfin, des deux côtés, un nouveau type de comportement a été encouragé par des personnes clairvoyantes, ainsi que par de nombreuses initiatives conçues dans le but de promouvoir plus d'appréciation et de compréhension mutuelles. Le ministère de Billy Graham en est un exemple remarquable. Il est très important de noter, dans nos deux traditions, une prise de conscience croissante du fait que la persistance de nos divisions fait obstacle à la propagation de l'Évangile.

À la suite de ces changements dans le monde et dans nos Églises, un grand nombre de catholiques et d'évangéliques ont commencé à se parler et à collaborer entre eux, et également à prier ensemble. Ce faisant, ils sont non seulement devenus amis, mais ils se sont découverts frères et sœurs dans le Seigneur. Il peut être utile de mentionner quelques-unes de ces initiatives officielles dont on trouvera une description détaillée annexe.

Les participants au premier dialogue international entre catholiques et évangéliques (1978-1984) ont abordé en premier lieu le thème de la mission. Il en est résulté un rapport publié en 1985. Du côté catholique ce dialogue international était patronné par le Secrétariat pour l'unité des chrétiens. Les participants évangéliques, comme par exemple John Scott, qui provenaient de différentes Églises et organisations chrétiennes, n'étaient pas des représentants officiels d'organismes internationaux.

Les consultations actuelles constituent un important développement dans nos relations. Pour la première fois, les réunions étaient patronnées des deux côtés par des organismes internationaux: l'Alliance évangélique mondiale et le Conseil Pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens. Cette initiative a finalement abouti à des consultations officielles, dont la première a eu lieu à Venise en 1993, suivie par celles de Tantur, à Jérusalem en 1997, Williams Bay, Wisconsin (USA) en 1999, Mundelein, Illinois (USA) en 2001 et Swanwick (Angleterre) en 2002.

Les premières réunions nous ont finalement amenés a concentrer notre attention sur deux thèmes d'ordre général: l'Église et sa mission. Au cours des discussions qui ont suivi, il est apparu clairement qu'une réflexion commune sur la notion biblique de koinonia serait utile pour préciser certaines convergences et différences au sujet de l'Église (1ère partie). L'attention accordée au thème de la mission a évolué en une réflexion sur l'évangélisation et sur les questions de liberté religieuse, prosélytisme et témoignage commun à la lumière de la koinonia, qui lui sont liées (2e partie).

Ces consultations avaient pour but de dissiper des malentendus et de rechercher une meilleure compréhension mutuelle de la vie et du patrimoine chrétiens de chacun, et de promouvoir de meilleures relations entre évangéliques et catholiques. Ce document est le résultat de la première série de débats et traite un nombre limité de sujets.

Au cours de ces conversations, qui se sont déroulées dans un climat ouvert et très cordial, chaque côté a exprimé clairement et franchement ses convictions théologiques selon sa propre tradition, et a écouté celles de l'autre. On s'est efforcé ensemble de discerner s'il existait des convergences éventuelles ou même quelques points d'accord sur des questions théologiques au sujet desquelles évangéliques et catholiques ont été longtemps divisés, et d'indiquer les questions sur lesquelles les divisions persistent nettement.

Le groupe soumet le résultat de ses travaux aux organismes promoteurs et leur exprime sa gratitude pour le soutien qu'ils ont accordé à ce projet.

Nous espérons que cette étude sera féconde et qu'elle servira la cause de l'Évangile à la gloire de notre Seigneur.

 

STATUT DE CE RAPPORT

Le présent Rapport a été rédigé par une Consultation internationale entre l'Église catholiqueet l'Alliance évangélique mondiale. C'est un document de travail préparé par les participants à cette Consultation. Les organismes promoteurs, qui ont nommé ces participants, ont autorisé la publication du Rapport afin qu'il puisse faire l'objet d'un large débat. Il ne constitue pas une déclaration officielle de l'Église catholique ni de l'Alliance évangélique mondiale, qui étudieront également le document.

 

 

1ère PARTIE 

CATHOLIQUES, ÉVANGÉLIQUES ET KOINONIA

 

 

A. L'ÉGLISE COMME KOINONIA (COMMUNAUTÉ, COMMUNION)

(1) L'emploi du terme koinonia introduit un important terme biblique dans l'ecclésiologie, car il fait penser aux choses qui unissent les chrétiens. Koinonia est sans aucun doute «un ancien et important aspect de l'Église et de son unité» [1]. Le terme biblique koinonia peut être traduit de plusieurs façons: «communauté», «appartenance», «communion», «participation», «association», ou encore «partage». Les évangéliques emploient souvent le terme «communauté», tandis que les catholiques emploient fréquemment le terme «communion».

 

1. «Communauté» néotestamentaire

(2) Dans les textes pauliniens, le terme koinonia se réfère souvent aux relations entre chrétiens, fondées sur leur rapport avec les personnes divines. Aux chrétiens de Corinthe, Paul dit: «Dieu ... vous a appelés à la communion avec son fils Jésus Christ, notre Seigneur» (1 Co 1, 9). Il parle de «la grâce du Seigneur Jésus Christ, l'amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit» (2 Co 13, 14). Ailleurs, il déclare à ses lecteurs que Jacques, Céphas et Jean «nous donnèrent la main ... en signe de communion» (Ga 2,9). À une autre occasion, il déconseille aux Corinthiens de s'associer avec les incrédules, et pose la question rhétorique: «Quelle union entre la lumière et les ténèbres?» (2 Co 6, 14). Le sens de Ph 1, 5-7 semble être celui de l'association.

(3) Le terme koinonia apparaît également dans Ac 2,42, où le sens est de nouveau celui de communion: «Ils étaient assidus à l'enseignement des apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières». On est en droit de se demander à quel genre de communion exactement pensait Luc, mais il est évident qu'il s'agit d'une sorte d'association entre croyants, reçue du Christ à travers la solidarité avec les apôtres. En 2 Co 8,4 et 9, 13, elle signifie le partage des biens matériels.

(4) Les textes johanniques renforcent ce sens de koinonia comme communion. L'auteur de la première épître parle de proclamer ce qu'il a vu, «afin que vous aussi, vous soyez en communion avec nous. Et notre communion est communion avec le Père et avec son Fils Jésus Christ» (1 Jn 1, 3). Aux versets 7-8, il fait de nouveau allusion à la communion avec le Fils et entre les chrétiens eux-mêmes. La communion avec Dieu en Christ est de toute évidence le fondement de la communion avec les autres croyants, étant tous membres du Corps du Christ. Ils doivent être un comme le Père et le Fils sont un dans la Trinité (Jn 17,11,21).

 

2. Diverses accentuations dans l'interprétation du Nouveau Testament

(5) Pour les évangéliques et les catholiques la communion avec le Christ implique une union transformatrice par laquelle les croyants sont «en koinonia avec la nature divine ... étant arrachés à la pourriture que nourrit dans le monde la convoitise» (2 P 1, 4). Dans ce passage, les catholiques tendent à interpréter koinonia comme participation à la vie et à la «nature» divines, tandis que les évangéliques sont enclins à l'interpréter comme un engagement réciproque, étant donné qu'elle comporte le fait de se soustraire à la corruption morale et aux modes de vie du monde. Selon de nombreux Pères de l'Église orientaux, la participation du croyant à la vie du Christ et de l'Église conduit au processus de divinisation du croyant (theosis, deificatio). Les évangéliques ont des réserves sur la notion de theosis: ce terme ne se trouve pas dans la Bible et, à leur avis, il présente trop d'ambiguïtés. Il semble suggérer que les croyants posséderont l'essence de la déité - une signification que la doctrine catholique réfute également. Les évangéliques reconnaissent, d'une part, que la grâce rédemptrice rétablit la ressemblance avec Dieu, qui avait été altérée et défigurée par le péché de l'homme (Co 3, 10) et, d'autre part, que l'Esprit transforme les croyants en la ressemblance du Deuxième Adam, «avec une gloire toujours plus grande» (1 Co 15,48,49; 2 Co 3, 18), un processus qui s'accomplira seulement lorsque le Christ, le Seigneur et Sauveur, viendra des cieux (Ph 3, 20-21; 1 Th 5, 23-24).

(6) Pour les catholiques, les sacrements sont les instruments dont se sert le Christ pour réaliser l'union transformatrice avec la nature divine (ils voient le baptême par l'eau dans 1 Co 12, 12-13, et l'eucharistie dans 10, 16-17). Dans de tels passages, le terme «koinonia» leur indique des connotations différentes (plus profondes, diraient les catholiques), plus sacramentelles et participatives que celles qu'exprime le terme «communauté». Beaucoup d'évangéliques considèrent les sacrements comme des moyens dominicaux de grâce ou des «ordonnances», qui sont des «paroles visibles» de proclamation (kataggellete1 Co 11, 26) ou des signes et des sceaux de la grâce d'union avec le Christ - une grâce reçue et appréciée à la seule condition d'avoir une foi personnelle.

 

3. Perspectives sur la «communio sanctorum»

(7) Alors que dans les interprétations primitives, le terme communio sanctorum, dans le Symbole des apôtres, était compris comme «communion de personnes saintes» (les saints), ce langage a été interprété comme une référence aux «choses saintes» (les sacrements).' Toutefois, l'importance doctrinale de la communio sanctorum (koinonia ton hagion) ne s'est pas réduite à une seule interprétation. En Occident, d'ultérieures applications du concept de divinisation l'ont fait ressortir comme une participation à l'eucharistie. Les évangéliques préfèrent traduire communio sanctorum par «communauté de personnes saintes» ou «de saints», les «saints» étant tous ceux qui appartiennent réellement à Jésus Christ par la foi; ils entendent par «communion» le lien qui unit tous les chrétiens de toutes les générations.

(8) Historiquement, les évangéliques n'ont pas réservé la même place aux sacrements, et ils ne les ont pas associés aussi directement à la sanctification que ne l'ont fait les catholiques. Ils maintiennent la signification «légale» (dans le sens des cours de justice) de justification et sont enclins à préférer le vocabulaire dramatique et celui de la loi. La Bible, selon la lecture qu'ils en font, est plus favorable aux catégories comme celles de violation d'alliance et de renouvellement d'alliance, de condamnation et d'acquittement, d'inimitié et de réconciliation, plutôt que de participation à l'être. Ils affirment toutefois, avec l'apôtre Paul, que quiconque est en Christ est une «nouvelle création» (2 Co 5, 17; Ga 6, 15). L'Esprit-Saint opère un changement radical, une nouvelle naissance d'en haut.

(9) Catholiques et évangéliques prévoient une communion parfaite dans le Royaume qui commencera avec la venue finale de Jésus. À la lumière d'une telle attente, catholiques et évangéliques devraient rechercher une communion plus profonde en ce monde, même s'ils sont en désaccord entre eux et les uns avec les autres sur les moyens de la réaliser et sur la mesure dans laquelle elle peut être réalisée avant le retour du Christ. Les textes bibliques, qui font autorité pour catholiques et évangéliques, fournissent une base solide à nos conversations. La familiarité croissante, de part et d'autre, avec les catégories bibliques, associée aux récentes réinterprétations de la théologie sacramentelle, suggère que la koinoniacontinue d'être un sujet favorable à des approfondissements ultérieurs au cours de nos conversations.

 

 

B. NOS COMPRÉHENSIONS RESPECTIVES DE L'ÉGLISE ET DES AUTRES CHRETIENS

 

1. Développements récents

(10) Lors du Concile Vatican II, les catholiques ont défini leur propre compréhension de la nature de l'Église et leurs relations avec les autres chrétiens. Dans les récentes décennies, les évangéliques ont eux aussi exploré ce domaine au cours d'importantes conférences sur le thème des missions. Il est utile d'exposer les vues des deux communautés avant d'en indiquer les implications pour une compréhension mutuelle.

(11) Le Concile Vatican II a représenté un développement dans l'auto compréhension ecclésiologique de l'Église catholique. Au lieu de postuler simplement son identité avec l'Église du Christ, Lumen gentium enseigne que «l'Église du Christ ... subsiste dans l'Église catholique» (LG 8) [3]. D'autre part, le mouvement évangélique doit sa forme caractéristique moderne à l'influence des revivals des dix-huitième et dix-neuvième siècles (précédés par le piétisme et le puritanisme): ces revivals ont dépassé les frontières confessionnelles et en ont relativisé l'importance. Du côté catholique, la reconnaissance de l'appartenance des «autres» à Christ se traduit par l'accent mis sur les éléments et les dons authentiquement chrétiens présents dans leurs communautés, et du côté évangélique par la reconnaissance de la présence, parmi les catholiques, de vrais croyants animés par l'Esprit du Christ.

 

2. Vues catholiques

(12) Le Concile Vatican II, dans la Constitution sur l'Église (Lumen gentium), parle des liens entre les catholiques et les autres chrétiens dans les termes suivants:

L'unique Église du Christ ... constituée et organisée en ce monde comme une communauté, subsiste dans l'Église catholique, gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques en communion avec lui, encore que, hors de cet ensemble, on trouve plusieurs éléments de sanctification et de vérité (LG 8). 
Avec ceux qui, baptisés, s'honorent du nom de chrétiens, mais ne professent pas intégralement la foi ou ne conservent pas l'unité de la communion avec le successeur de Pierre, l'Église se sait unie par de multiples rapports. Beaucoup, en effet, vénèrent la sainte Écriture comme norme de foi et de vie; ils manifestent aussi un authentique zèle religieux, croient avec amour en Dieu le Père tout-puissant et dans le Christ, Fils de Dieu et Sauveur ... 
À cela s'ajoute ... une union réelle dans l'Esprit­Saint, car l'Esprit agit également en eux par ses dons et ses grâces, avec sa puissance sanctificatrice; et il a donné à certains d'entre eux une vertu qui les a fortifiés jusqu'à l'effusion de leur sang (LG 15).

(13) Dans le Décret sur l'œcuménisme (Unitatis redintegratio), le Concile Vatican II met le concept d'éléments ecclésiaux en corrélation avec celui de koinonia. Le Décret illustre la perspective catholique de la pleine communion. Il affirme que l'Esprit-Saint «réalise cette admirable communion des fidèles et les unit tous si intimement dans le Christ, qu'il est le Principe de l'unité de l'Église» (UR 2). Il poursuit en disant que l'Esprit réalise et perfectionne cette admirable union au moyen de la fidèle prédication de l'Évangile, l'administration des sacrements et le gouvernement pastoral dans l'amour (cf. UR 2).

(14) Dans le paragraphe suivant, le Décret sur l'œcuménisme précise les relations avec les autres communautés et aborde la notion de «communion imparfaite», si essentielle dans les relations actuelles entre les Églises. Le Décret déclare que certains chrétiens se trouvent séparés de la pleine communion avec l'Église catholique mais restent dans une certaine communion, bien qu'imparfaite, avec elle parce que «parmi les éléments ... plusieurs et même beaucoup, et de grande valeur, peuvent exister en dehors des limites visibles de l'Église catholique: la parole de Dieu écrite, la vie de la grâce, la foi, l'espérance et la charité, d'autres dons intérieurs du Saint-Esprit et d'autres éléments visibles» (UR 3).

(15) Dans une section successive du Décret sur l'œcuménisme, la même notion de communion imparfaite est appliquée spécifiquement aux communautés protestantes. Le Concile parle ici de la foi dans la Sainte-Trinité et de la confession de Jésus Christ comme Dieu et Seigneur, unique Médiateur entre Dieu et les hommes (cf. UR 20). Il continue en évoquant l'amour et la vénération pour l'Écriture sainte, affirmant que «les Paroles divines sont ... des instruments insignes entre les mains puissantes de Dieu pour obtenir cette unité que le Sauveur offre à tous les hommes» (UR 21). Le baptême, conféré validement «est le lien sacramentel d'unité existant entre ceux qui ont été régénérés par lui ... Le baptême, de soi, n'est que le commencement et le point de départ, car il tend intégralement à l'acquisition de la plénitude de la vie dans le Christ» (UR 22). Le Pape Jean-Paul II réaffirme la doctrine du Concile Vatican II sur les «éléments de sanctification et de vérité» présents dans les autres Communautés chrétiennes et sur «la communion qui existe, bien qu'imparfaitement, entre elles et l'Église» (UUS 11).

(16) Tous ces facteurs confèrent un caractère concret à l'emploi du concept de koinonia par les catholiques romains. Ils précisent que les éléments ecclésiaux en question trouvent leur expression dans des actes de foi, d'espérance et de charité. Le degré de communion ne peut pas se mesurer seulement par des moyens extérieurs et visibles, car la communion dépend de la réalité de la vie dans l'Esprit.

 

3. Vues évangéliques

(17) De la même façon, les évangéliques font ressortir que le lien le plus important est la vie de l'Esprit qui découle de l'union avec le Christ. Ce lien se crée lorsque l'Évangile est reçu dans la foi et qu'il est à la base de l'expression visible de l'unité, ou koinonia, de tous les chrétiens. Pour les évangéliques, la visibilité de l'Église est subordonnée à cette vérité première. L'Évangile de Jésus Christ: une célébration évangélique professe:

Tous les chrétiens sont appelés à l'unité dans l'amour et à l'unité dans la vérité. En tant qu'évangéliques dont le nom lui-même dérive de l'Evangile, nous célébrons cette éminente bonne nouvelle de l'œuvre salvifique de Dieu en Jésus Christ comme l'authentique lien d'unité chrétienne, aussi bien entre Églises et confessions organisées que parmi les nombreuses initiatives transconfessionnelles créées en coopération par des chrétiens. 
La Bible affirme que tous ceux qui ont réellement mis leur confiance en Christ et en son Évangile sont fils et filles de Dieu par la grâce, et sont donc nos frères et sœurs en Christ. [4]

Comme l'observe la Convention de Lausanne de 1974:

L'évangélisation du monde exige que toute l'Église apporte l'Évangile dans sa totalité au monde entier. L'Église est au centre même du dessein de Dieu pour l'univers, elle est le moyen choisi par lui pour répandre l'Évangile. Mais une Église qui prêche la Croix, doit porter elle-même la marque de la Croix. Elle fait obstacle à l'évangélisation lorsqu'elle trahit l'Évangile, lorsqu'il lui manque la foi vivante en Dieu, l'amour véritable pour les hommes ou l'honnêteté scrupuleuse en toutes choses. L'Église est la communauté du peuple de Dieu plutôt qu'une institution, et elle ne doit être assimilée à aucune culture particulière, à aucun système politique ou social, à aucune idéologie humaine (Jn 17, 18; 20, 21; Mt 28, 19-20; Ac 1, 8; 20,27; Ep 1, 9, 10; 3, 9-11; Ga 6, 14, 17; 2 Co 6, 3, 4; 2 Tm 2,19-21; Ph 1,27) (Lausanne 6).

Les évangéliques adhèrent à la doctrine réformée de «l'Église invisible» (bien qu'avec une variété de degrés d'accentuation), sans minimiser l'importance de l'Église visible, comme l'implique la Déclaration d'Amsterdam:

L'Église une et universelle est une famille transnationale, transculturelle, transconfessionnelle et multiethnique appartenant à la maison de la foi. Au sens le plus large, l'Église comprend tous ceux qui sont sauvés dans toutes les époques, car l'unique corps du Christ s'étend aussi bien à travers le temps qu'à travers l'espace. Dans notre monde, l'Église devient visible dans toutes les congrégations locales réunies pour accomplir ensemble ce que fait l'Église conformément à l'Écriture (Amsterdam 9).

(18) Les évangéliques (de même que les catholiques) soutiennent qu'il est souhaitable, dans l'activité ecclésiale, d'utiliser des critères disciplinaires et doctrinaux pour exprimer l'unité que nous avons en Christ. «La discipline ecclésiale, basée sur la Bible et guidée par l'Esprit-Saint est essentielle pour le bien et pour l'administration du peuple de Dieu» [5]. Dans un monde et dans des Églises dépréciés par les insuffisances humaines, la discipline ecclésiale peut exiger de restreindre certaines formes concrètes de communauté, même dans les cas où les contrevenants aux enseignements apostoliques sont cependant acceptés comme frères ou sœurs (cf. 2 Th 3, 14-15). Cette norme s'applique aux déviations dans tous les domaines de la vie, dans la profession de foi comme dans le comportement, qui ne peuvent d'ailleurs être séparés. Certains évangéliques affirment que les possibilités concrètes de communion dépendent du degré d'entente sur le témoignage apostolique tel qu'il est transmis dans le Nouveau Testament.

(19) Les Déclarations de Manille décrivent les comportements qui en découlent pour les évangéliques aujourd'hui:

Quand nous parlons de «l'Église tout entière», nous n'avons pas la prétention d'identifier l'Église universelle à la communauté évangélique mondiale: nous sommes conscients que beaucoup d'Églises n'appartiennent pas au mouvement évangélique. À l'égard des Églises catholique et orthodoxe, les évangéliques ont des attitudes différentes. Certains d'entre eux prient, dialoguent, étudient l'Écriture et travaillent avec ces Églises. D'autres s'opposent vigoureusement à toute forme de dialogue ou de coopération. Tous sont conscients que de sérieuses différences théologiques subsistent entre nous. Le cas échéant, et aussi longtemps que la vérité biblique n'est pas compromise, une coopération est envisageable dans des domaines comme la traduction de la Bible, l'étude de questions théologiques et éthiques contemporaines, le travail social et l'action politique. Nous tenons cependant à affirmer que l'évangélisation en commun exige une commune adhésion à l'Évangile biblique (Manille 9).

 

4. Quels éléments de l'Église chacun de nous reconnaît­il dans l'autre?

(20) Catholiques et évangéliques, nous avons en commun l'Écriture sainte [6] et la conviction qu'elle est inspirée par l'Esprit-Saint. Nous affirmons le rôle du Christ comme unique médiateur, son incarnation, sa mort et sa résurrection pour notre salut. Nous affirmons ensemble notre foi en un Dieu trin, Père, Fils et Esprit-Saint. Nous pouvons les uns et les autres réciter la Prière du Seigneur et confesser le credo des apôtres et celui de Nicée [7]. Nous affirmons l'appel de l'Evangile à la conversion et à une vie disciplinée dans la grâce de Jésus Christ, et la promesse finale d'une récompense éternelle. Nous reconnaissons que les chrétiens ont une responsabilité dans le service et la promotion de la justice dans le monde. Nous partageons l'espérance du retour du Christ comme juge et rédempteur, pour l'accomplissement de notre salut. Nous pouvons commémorer ensemble ceux qui ont porté témoignage par leur sang à cette foi commune et nous célébrons à présent la pleine communion devant notre divin Sauveur.

(21) Un des résultats de la coopération et du dialogue interecclésiaux a été une meilleure appréciation mutuelle entre chrétiens séparés. (Une évolution graduelle vers une reconnaissance accrue du statut ecclésial des autres communautés chrétiennes caractérise les développements modernes et actuels). Pendant des siècles, sous une forte influence des polémiques et des guerres de religion, l'identification de la vraie Église et l'incorporation dans celle-ci étaient considérées de façon simpliste comme un «tout ou rien». Soit on appartenait à la vraie Église, soit à une fausse institution ou à une secte. Ou bien on était membre de l'Église au plein sens du terme, ou bien on était en dehors de l'Eglise et privé de tout espoir de salut. Cependant, la conscience d'une complexité spirituelle n'était pas totalement réprimée. L'Eglise catholique continuait de considérer valide le baptême administré par des hérétiques et reconnaissait en outre le «baptême de désir». Les réformateurs du seizième siècle ne niaient pas la présence d'éléments de la vraie Église dans le catholicisme. Bien que Luther ait parfois parlé du Pape comme de l'antéchrist, il reconnaissait la présence de vestiges de l'Église dans la Communion romaine. Calvin, à propos de ses adversaires catholiques, a pu écrire: «Ces esprits brouillons se donneront du mal inutilement en voulant parer leur synagogue du titre d'Église». Il reconnaît toutefois des traces (vestigia), des restes (reliquias), des marques (symbola) et des signes (signa) de l'Église sous la papauté; les Églises de la Communion romaine peuvent être qualifiées d'Églises «dans la mesure où le Seigneur préserve en elles de manière admirable des restes de son peuple, bien que ceux-ci soient malheureusement séparés et dispersés». Et l'on trouvait les premiers partisans de la tolérance religieuse dans des groupes extrêmement différents entre eux, appartenant à ce qui est souvent qualifié de «Réforme radicale». Bien que les anabaptistes aient été cruellement persécutés de tous côtés, Calvin a prononcé un jugement nuancé sur leur doctrine; ils ont bénéficié plus tard de la protection d'un prélat tel que le Prince évêque de Bâle.

 

5. Un défi commun

(22) Dans cette section, avec l'aide de l'Esprit de Dieu, nous avons pris conscience de la koinonia avec la vie de la Trinité dont jouissent nos deux communautés. Nous estimons donc qu'il incombe à toutes les deux de passer de cette condition particulière d'union avec la vie de la Trinité à une union vécue entre nous. À cet effet, nous devons prendre les mesures qui, à partir de cette redécouverte, nous permettront de créer les liens ecclésiaux qui manifesteront cette unité qui nous est déjà accordée. Si Dieu ne nous a pas traités comme si nous étions séparés de lui, pourquoi devrions-nous continuer de vivre comme si nous étions séparés les uns des autres?

 

 

C. QUELQUES DIMENSIONS DE L'ÉGLISE

 

1. Les origines de l'Église

(23) Évangéliques et catholiques considèrent l'événement de la Pentecôte comme l'origine de l'Église de la Nouvelle Alliance (Ac 2). À la Pentecôte, la présence de personnes de toutes les nations est l'image de la mission universelle de l'Église. Nous reconnaissons que cette Église a pour fondation les prophètes et les apôtres, et que Jésus Christ en est la pierre maîtresse (Ep2, 20). Nous voyons dans la mission évangélisatrice des apôtres le fondement des Églises locales. Dans le Nouveau Testament, le ministère des apôtres et l'assemblée du Conseil de Jérusalem étaient au service de la communion des Églises locales (Ac 15). Soutien réciproque, lettres de recommandation, collectes en faveur d'autres Églises et hospitalité mutuelle caractérisaient cette communion entre les Églises. Evangéliques et catholiques reconnaissent l'importance des développements ultérieurs dans la vie de l'Église, mais le poids qu'ils leur attribuent et l'appréciation de ces développements sont différents.

 

2. L'Église locale et universelle

a. Perspectives évangéliques et catholiques

(24) Pour les évangéliques, «l'Église locale» désigne aujourd'hui la congrégation dans un lieu particulier. Pour les catholiques, Eglise «locale» ou «particulière» se réfère à un diocèse, composé d'un certain nombre de paroisses avec, au centre, un évêque assisté de ses prêtres et d'autres ministres de la pastorale des fidèles au nom de l'Évangile.

(25) Les catholiques voient l'œuvre de l'Esprit­Saint dans plusieurs développements significatifs de l'Église primitive. Il s'agit, entre autres, de la reconnaissance des évêques comme successeurs des apôtres; de l'émergence du triple ministère, évêque, prêtre et diacre; des éclaircissements de la foi apostolique, en particulier par les conciles œcuméniques et les credo universels; la reconnaissance graduelle de la direction effective de toute l'Église par l'évêque de Rome. Dès les premiers temps, l'évêque de Rome jouait un rôle important en encourageant la communion entre les Eglises locales présidées par les évêques, première expression d'une primauté qui s'est développée au cours des siècles. Depuis le Concile Vatican II, l'accent mis sur les relations mutuelles entre les Églises locales et l'Église de Rome a été plus marqué.

(26) De leur côté, les évangéliques se trouvent en grande majorité dans les Églises protestantes et pentecôtistes qui, en général, mettaient l'accent principalement sur les congrégations locales: le lieu où la Parole de Dieu est proclamée, où les sacrements sont administrés et où le peuple de Dieu est rassemblé. Les évangéliques sont insérés dans une variété de structures ecclésiales. Les Églises originaires de la Réforme «magistérielle» (p.ex. les Eglises luthériennes et réformées), de même que les Eglises anglicanes et méthodistes, ont un sens très marqué de l'universalité de l'Église dans le temps et dans l'espace, mais dans l'accomplissement de leurs fonctions elles mettent l'accent sur la communauté régionale ou nationale et, par exemple, elles attribuent de l'importance aux synodes régionaux et nationaux. Presque toutes les autres Églises ont adopté le congrégationalisme qui concentre la responsabilité dans la communauté locale. Celle-ci est l'incarnation concrète de la koinonia de l'Esprit. Elle est le lieu de la vie spirituelle, de l'édification mutuelle par la diversité des dons, et de la formation au service dans le monde. Les Églises libres manifestent la solidarité par des alliances ou des organisations internationales, confessionnelles ou interconfessionnelles. Les anabaptistes, en particulier, ont cultivé une forte tradition de vie communautaire; une discipline vigilante fait de leur assemblée une famille de foi étroitement unie. Tout au long de l'histoire, ces Églises ont dû lutter contre les tendances scissionnistes et, dans le contexte de la sécularisation, contre les influences funestes de l'individualisme. La Convention de Lausanne reconnaît franchement: «Nous confessons que notre témoignage a été parfois déprécié par notre individualisme coupable et par une dispersion inutile. Nous nous engageons à rechercher une unité plus profonde dans la vérité, l'adoration, la sainteté et la mission» (Lausanne 7).

(27) Alors que l'ecclésiologie catholique réserve certaines fonctions sacramentelles aux évêques, dont on reconnaît qu'ils ont reçu la plénitude du sacrement de l'ordre, la plupart des Églises évangéliques concentrent la fonction directive plus spécifiquement dans le ministère du «pasteur», dont le rôle est considéré comme étant celui de l'episkopos/presbyteros de l'époque du Nouveau Testament. (Le pasteur peut très bien être «l'ancien qui enseigne» en association avec les «anciens qui exercent la présidence» de l'Église ou de la paroisse, 1 Tm5, 17). D'autres évangéliques, même parmi quelques Églises libres, ont des ministères de vigilance distincts, mais la différence est minime: l'évêque ou surintendant s'occupe de tâches administratives, mais on ne lui reconnaît pas de rôle sacramentel particulier, ce concept étant étranger à l'interprétation évangélique du ministère.

(28) Chez les évangéliques, la communauté universelle se concrétise de manière caractéristique au moyen de réseaux lâches, formés d'associations mondiales (parmi lesquelles l'A.E.M. peut à juste titre revendiquer la plus large représentativité) et d'organisations para-ecclésiales (telles que la Fraternité internationale des étudiants évangéliques). Ces organismes constituent des canaux de communication et des instruments de coopération très utiles.

(29) Du côté catholique, le Concile Vatican II a de nouveau souligné l'importance capitale de l'Église locale (diocèse) comme le lieu où la Parole est annoncée et où les sacrements sont administrés. L'Église se manifeste le plus distinctement lorsque les fidèles sont assemblés auprès de l'autel sous la présidence de l'évêque entouré des autres membres du clergé (cf. SC41; et aussi LG 26). À chaque célébration de l'eucharistie l'unité de toute l'Église est indiquée par l'officiant qui exprime l'union avec l'évêque local, avec les autres évêques et en particulier avec l'évêque de Rome en tant que centre de toute la communion [8]. Les évêques réunis en conférences nationales et régionales sont chargés de représenter leurs Églises particulières. Les catholiques parlent de l'Église universelle, ainsi que de l'Église régionale, comme d'une communion d'Eglises particulières sous la direction de leurs évêques respectifs et en communion avec l'évêque de Rome. Ils reconnaissent toutefois que l'Église du Christ ne s'identifie pas exclusivement avec l'Église catholique (cf. LG 8).

b. Convergences et différences entre catholiques et évangéliques

(30) Sans éliminer en aucune façon les différences avec le protestantisme évangélique, ces récents développements dans l'ecclésiologie catholique facilitent la compréhension mutuelle. Au niveau national et régional, les Conférences épiscopales catholiques et les Synodes des Eglises catholiques orientales ont la possibilité de dialoguer avec les Églises, les alliances et les organisations évangéliques nationales et régionales. En outre, les évêques diocésains peuvent établir des rapports avec leurs homologues évangéliques régionaux, même si ceux-ci ne sont pas des évêques. Il existe une certaine convergence entre le nouvel accent mis sur l'Église locale du côté catholique et sur la communauté mondiale du côté évangélique.

(31) Les catholiques parlent de réciprocité entre l'Église universelle et l'Église particulière, mais ils ne considèrent pas l'Église universelle comme une fédération d'Églises locales. Dans un sens spécifique, ils peuvent admettre la priorité de l'Église locale, dans les termes du Concile Vatican II: «C'est dans toutes ces Églises particulières et par elles qu'est constituée l'Église catholique, une et unique» (LG 23). Mais pour éviter tout malentendu, le Concile affirme également que chaque Église particulière est «formée à l'image de l'Église universelle» (ibid.). Le témoignage biblique, interprété par la théologie catholique, indique que l'Église est née comme une seule et unique communauté, dans laquelle les personnes sont incorporées par la foi et le baptême [9].

(32) Pour les évangéliques l'Église a été créée par la Parole (creatura verbi). La Parole est révélée en Christ inscrite dans l'Écriture et reçue par l'écoute. La Parole fait naître la foi et une communauté de foi, une Église visible, dans le temps et dans l'espace. Mais quant à la distinction entre croyants et non­croyants dans l'Église visible, le jugement final appartient à Dieu. Dieu connaît les siens: «Ici dans le monde, l'Église devient visible dans toutes les Communautés locales qui se réunissent pour accomplir communautairement ce que, selon les Écritures, l'Église est appelée à accomplir. Le Christ est la tête de l'Église. Tous ceux qui sont personnellement unis au Christ par la foi appartiennent à ce corps et sont unis par l'Esprit à tous les autres véritables croyants en Jésus» (Amsterdam 9).

(33) Les évangéliques, comme les catholiques, reconnaissent la valeur de la communion universelle, mais en raison de présupposés théologiques différents et d'interprétations divergentes de certains passages bibliques, ils ont une autre idée des relations entre l'Église universelle et les Églises locales. Par «Église universelle» les évangéliques entendent tous ceux qui, partout et en tout temps, croient en Christ et mettent en lui leur confiance dans le salut. «Tous» inclut les croyants catholiques. Les évangéliques ont adopté la distinction de Luther entre Eglise invisible et Église visible. Ils affirment la réalité de l'Église universelle dont le lien d'unité, l'Esprit du Christ, est invisible (Ep 4, 3-4); ils mettent l'accent sur l'incorporation par «la seule foi», une foi par laquelle tous participent au don de l'Esprit (Ga3, 2). Toutefois, le Christ a également voulu que soient fondées des Églises visibles dans lesquelles les personnes sont incorporées par le baptême (par eau). Bien qu'étant d'abord locales, ces congrégations peuvent chercher à s'unir en fédérations et en alliances comme moyens d'expression de l'universalité de la nature et de la mission de l'Église.

(34) Les manifestations structurelles et organisationnelles visibles de l'Église sont déterminées par les situations historiques particulières et elles peuvent changer. Aux yeux de la plupart des évangéliques, la Bible ne propose aucun modèle rigide pour l'organisation de l'Eglise en tout temps et en tout heu. Ils trouvent dans le Nouveau Testament une grande variété de modèles pour le ministère et l'ordre ecclésial. Ainsi, diversement de l'ecclésiologie catholique, les évangéliques affirment qu'il existe une variété de formes d'ordre ecclésial, mais que ces différences n'empêchent ni la communion avec l'Église invisible ni l'appartenance à celle-ci.

(35) La plupart des évangéliques reconnaissent que l'Église universelle, n'étant pas une institution visible, se manifeste concrètement dans les Églises visibles en des temps et des lieux déterminés et par les liens qu'elles entretiennent entre elles au niveau local. Ils reconnaissent que la concordance entre Églises visibles et Église invisible n'est pas parfaite. Par exemple, il peut y avoir des «faux frères» (Ga 2, 4) qui ne sont pas «des nôtres» (1 Jn 2, 19). Alors que le rapport entre le baptême et l'appartenance à l'Église visible et invisible varie chez les évangéliques, ces différences n'empêchent pas la communion ni la collaboration. Le Christ a doté les communautés visibles d'institutions de façon à pouvoir se bâtir et accomplir leur mission dans le monde.

 

3. L'amalgame du personnel et de l'institutionnel dans la koinonia

a. Une communauté ordonnée de personnes

(36) Évangéliques et catholiques identifient dans le témoignage du Nouveau Testament une com~u­nauté ordonnée de personnes partageant une foi et une mission communes, ayant reçu des apôtres une direction, sous le Christ (1 Co 11-14; Rm 12; Ep 4). Nous reconnaissons qu'il existe des ministères différenciés décrits dans les épîtres (1 P 5; 1 Tm 3; Tt), auxquels nous attribuons toutefois des valeurs différentes et dont nous jugeons différemment la continuité dans l'Église contemporaine. Cependant, nous affirmons tous que l'ordre et la discipline forment le cadre de la communion ecclésiale (1 Co 14,33,40).

(37) Le concept d'Église comme communion est le résultat d'un retour à une veine riche en matériel biblique et patristique. Il a également été influencé par des approches plus personnalistes du monde moderne, contre des formes excessives d'institutionnalisme et d'individualisme. Les sociologues ont longtemps fait la distinction entre société et communauté. Dans l'ecclésiologie du début du vingtième siècle, cette distinction a donné naissance à un dualisme entre une Église de la loi et une Église de l'amour. Pie XII, dans son encyclique sur le Corps Mystique, affirmait que cette opposition n'existe pas dans l'Église, celle-ci étant à la fois une union mystique et une société organisée [10].

b. Vues catholiques

(38) Dans la Constitution sur l'Église, le Concile Vatican II suit essentiellement la doctrine de Pie XII en cette matière. L'Église est présentée comme une seule réalité complexe («unam realitatem complexam» [LG 8]), à la fois visible et invisible, mystique et hiérarchique. Mais pour le Concile, la dimension visible est utile pour la dimension invisible de l'Eglise. L'Église est divinement dotée de doctrines, de sacrements et de ministères, dans le but de créer une communion surnaturelle de vie, d'amour et de vérité parmi ses fidèles, et d'en être le signe (cf. LG 14, 18, 20, 21). Le Concile présente l'Église comme étant elle-même un sacrement (LG 1).

(39) La démarche du Concile Vatican II vers une ecclésiologie plus collégiale montre une plus grande accentuation de l'aspect personnel. Alors que Vatican l parlait de la juridiction exercée par le pape sur les autres évêques de la communion catholique, Vatican II précise cette doctrine du passé en disant que les évêques doivent être en «communion hiérarchique» avec le pape afin d'exercer leur pouvoir magistériel et pastoral envers leurs troupeaux (cf. LG22; CD 5). Le concept de «communion hiérarchique» n'écarte pas l'aspect juridique mais il requiert un exercice de gouvernement par le dialogue et le consensus plutôt que par le commandement.

c. Vues évangéliques

(40) En général, pour les évangéliques, l'Église est avant tout une communauté de personnes et seulement en second lieu une institution. Abraham Kuyper, par exemple, déclare: L'Église «n'est pas une agence salvifique qui procure la grâce comme un médicament, ni un ordre mystique qui agirait de façon magique sur les laïcs. Elle n'est rien d'autre que des personnes croyantes et confessantes» [11]. La Convention de Lausanne de 1974 affirme: «L'Église est la communauté du peuple de Dieu plutôt qu'une institution; elle ne doit être assimilée à aucune culture particulière, à aucun système politique ou social, à aucune idéologie humaine» (Lausanne 6). Toutefois, la plupart des évangéliques maintiennent catégoriquement l'exigence d'ordre et de discipline et soulignent la dimension institutionnelle de la vie ecclésiale.

d. Quelques observations communes

(41) Catholiques et évangéliques constatent une convergence dans la compréhension de la manière dont l'ordre et la discipline sont utiles à la koinonia de l'Église. Les catholiques ont commencé à remettre l'accent sur l'importance de l'aspect personnel dans la compréhension de l'Église. Les évangéliques montrent une appréciation croissante des expressions d'unité visible dans la vie de l'Église en dehors des limites de leur propre confession. Une telle convergence dans notre entendement de la koinonia biblique est encourageante en vue de la poursuite du dialogue.

 

 

D. PRÉPARER UN AVENIR DIFFÉRENT

(42) Il y a donc des différences entre les convictions catholiques et évangéliques. Toutefois, ces différences ne consistent pas en une simple opposition et elles ont fait l'objet d'un examen fécond au cours de nos conversations. Notre compréhension commune a ouvert des pistes pour un dialogue ultérieur.

(43) En complétant ces réflexions, nous prenons de nouveau conscience des effets de nos divisions sur les personnes que nous voulons aider. Il n'est pas possible d'inverser le cours de l'histoire, mais il est possible de préparer un avenir différent.

(44) Nous sommes conscients de la nécessité d'un esprit de repentir devant Dieu pour n'avoir pas fait suffisamment d'efforts afin de surmonter nos divisions qui sont un scandale pour l'Évangile. Nous prions Dieu de nous accorder un esprit de metanoia. Nous devons continuer de faire face et de nous attaquer aux questions qui nous ont séparés. Nous devons également examiner les pratiques qui perpétuent, sans esprit critique, les préjugés du passé.

(45) Ne pourrions-nous pas nous demander si nous sommes suffisamment conscients du degré d'unité que nous partageons déjà? Par exemple, durant la messe, lorsque les catholiques entendent les paroles du canon: «affermis la foi et la charité de ton Eglise au long de son chemin sur la terre: veille sur ton serviteur le Pape ... notre évêque ... l'ensemble des évêques, les prêtres, les diacres et tout le peuple des rachetés», réalisent-ils que parmi les «rachetés», il y a les chrétiens dont ils sont séparés et auxquels, puisque le Christ les a aussi rachetés, ils sont unis par de profonds liens de vie chrétienne? Et lorsque les évangéliques intercèdent pour la vie, la mission et l'unité de «l'Église», réalisent-ils réellement que les catholiques font également partie de cette Église?

(46) Dans un esprit d'humilité, nous soumettons nos préoccupations et nos espérances au Seigneur.

 

 

 

2e PARTIE 

CATHOLIQUES, ÉVANGÉLIQUES ET ÉVANGÉLISATION À LA LUMIÈRE DE LA KOINONIA

 

 

(47) Nous abordons à présent les problèmes de l'évangélisation, du prosélytisme et de la liberté religieuse pour les examiner dans le contexte d'une théologie de la koinonia. À cet effet, nous avons tiré profit de quelques éclaircissements obtenus sur ces points dans d'autres dialogues et nous les avons pris comme base de notre réflexion.

(48) Évangéliques et catholiques reconnaissent que chaque chrétien a le droit et le devoir de partager et de diffuser la foi. «Il est contraire au message du Christ, aux voies de la grâce de Dieu et au caractère personnel de la foi, d'utiliser des moyens, quels qu'ils soient, qui réduiraient ou entraveraient la liberté d'une personne pour un engagement chrétien fondamental» (B 34). L'évangélisation étant le point central de cette section, nous pouvons à présent indiquer brièvement comment catholiques et évangéliques conçoivent cette responsabilité.

 

 

A. NOS VUES RESPECTIVES SUR L'ÉVANGÉLISATION/ ÉVANGÉLISME

 

1. Une vue catholique

(49) Les catholiques situent l'évangélisation dans le contexte de l'unique mission de l'Eglise. A leurs yeux, «l'évangélisation est une démarche complexe, aux éléments variés: renouveau de l'humanité, témoignage, annonce explicite, adhésion du cœur, entrée dans la communauté, accueil des signes, initiatives d'apostolat» (EN 24).

(50) «L'évangélisation contiendra aussi toujours - base, centre et sommet à la fois de son dynamisme - une claire proclamation que, en Jésus Christ, ... le salut est offert à tout homme, comme don de grâce et miséricorde de Dieu» (EN 27; cf. RM 44). Elle comporte l'annonce de cette Bonne Nouvelle dont le but est la conversion chrétienne des hommes et des femmes (cf. RM 44-46). Mais elle se propose également de «convertir en même temps la conscience personnelle et collective des hommes, l'activité dans laquelle ils s'engagent, la vie et le milieu concrets qui sont les leurs» (EN 18). Ainsi, «il importe d'évangéliser ... en profondeur et jusque dans leurs racines la culture et les cultures de l'homme» et tout son mode de vie (EN 20). Par inculturation, l'Église incarne l'Évangile dans différentes cultures, «elle leur transmet ses valeurs, en assumant ce qu'il y a de bon dans ces cultures et en les renouvelant de l'intérieur» (RM 52; cf. EN 20).

(51) Il y a une diversité d'activités dans l'unique mission de l'Église selon les différentes circonstances dans lesquelles elle s'accomplit. Si nous observons le monde d'aujourd'hui du point de vue de l'évangélisation, nous pouvons distinguer trois sortes de situations: (a) celle des personnes, groupes et milieux socioculturels qui ne connaissent pas le Christ ni son Évangile. Dans ce contexte, les catholiques parlent de mission ad gentes; (b) celle des communautés chrétiennes dotées de structures ecclésiales solides et adéquates; elles ont une foi et une vie chrétienne ferventes, où la participation aux sacrements est fondamentale (cf. En 47). L'Église exerce son activité et son action pastorale au sein de ces communautés; (c) il y a enfin la situation intermédiaire, par exemple dans les pays d'anciennes racines chrétiennes, où des groupes entiers de baptisés ont perdu le sens d'une foi vécue. Dans ce cas, ce qu'il faut, c'est une nouvelle évangélisation ou une «ré-évangélisation». Les frontières entre ces trois situations «ne sont pas nettement définissables et on ne saurait créer entre elles des barrières ou une compartimentation rigide» (RM 34). Il existe une interdépendance croissante dans l'Église entre ces diverses activités salvifiques.

 

2. Une vue évangélique

(52) Pour les évangéliques, le cœur et noyau central de la mission est la proclamation. Toutefois, elle est le noyau central mais non pas la totalité de la mission de l'Église dans le cadre du plan divin de rédemption. La Convention de Lausanne qualifie d' «évangélisation» cette mission globale (Lausanne, Introduction) et la situe dans un cadre trinitaire: «Nous affirmons notre foi au Dieu éternel et unique, créateur (Es 40, 28) et Seigneur du monde, Père, Fils et Saint-Esprit (Mt 28, 19), qui règne sur toutes choses selon le dessein de sa volonté (Ep 1, 1). Il a appelé du milieu du monde un peuple qui lui appartient (Ac 15, 14) et il l'a envoyé dans le monde (Jn 17, 18) pour servir et témoigner, pour faire avancer son règne, édifier le Corps du Christ et glorifier son nom (Ep 4, 12)» (Lausanne 1).

(53) La Convention de Lausanne décrit la mission dans son sens le plus inclusif, comme «présence chrétienne dans le monde», qui consiste en un «service sacrificiel» et demande «que nous pénétrions profondément dans le monde» pour imprégner «une société non chrétienne» (Lausanne 6). Parce qu'ils sont engagés dans la mission du Dieu trin, qui est «à la fois le Créateur et le Juge de toute la terre», les disciples du Christ, en tant que chrétiens, «devraient partager son souci de justice» (Gn 18, 25) et de réconciliation parmi la société humaine tout entière, et de libération des humains et des femmes de toute forme d'oppression (Ps 45, 7; Es 1, 17). Les êtres humains étant créés à l'image de Dieu, «chaque personne humaine possède une dignité intrinsèque, quelle que soit sa religion ou la couleur de sa peau, sa culture, sa classe sociale, son sexe ou son âge (Lv 19, 18; Le 6, 27; 35) (Je 3, 9; Lausanne5). Lorsque les hommes entrent par une nouvelle naissance dans le Royaume du Christ, «ils doivent rechercher, non seulement à refléter sa justice, mais encore à la répandre (Mt 5, 20; Mt 6,33) dans un monde injuste» (ibid.).

(54) Bien que la mission du Dieu trin soit aussi vaste que «le dessein de Dieu pour l'univers» (Lausanne 6) et que, par conséquent, elle appelle le peuple de Dieu à cette mission qui embrasse tout, les évangéliques sont particulièrement soucieux de maintenir la proclamation au premier plan et au centre. En conséquence, la Convention de Lausanne délimite «l'évangélisation elle-même» comme «la proclamation du Christ» historique, biblique, Sauveur (1 Co 1, 23; 2 Co 4, 5) et Seigneur, afin de «persuader les hommes de venir personnellement à Lui pour être réconciliés avec Dieu» (2 Co 5, 11; 20). En outre, Lausanneaffirme avec force la primauté de l'évangélisation en tant que proclamation: «Dans sa mission de service sacrificiel, l'Église doit accorder la priorité à l'évangélisation» (Lausanne6). Une déclaration ultérieure de la Communauté mondiale des évangéliques souligne de nouveau le rôle crucial de l'évangélisation. Cependant, le document ne traite pas l'évangélisation «comme un thème à part, parce que nous le considérons comme une partie intégrante de la totalité de notre réponse chrétienne aux besoins de l'humanité» (Mt 28, 18-21; Consultation sur l'Église en réponse aux besoins de l'humanité, Wheaton, 1983, Introduction). Il est clair qu'ici, le «Grand Mandat» est conçu comme un appel à la mission holistique avec, au centre, un appel à tous les hommes à croire en Jésus Christ.

 

 

B. ANCIENNES TENSIONS DANS UN NOUVEAU CONTEXTE DE KOINONIA

(55) Nous partageons la conviction que Dieu a envoyé son Esprit-Saint dans le monde pour y opérer la réconciliation du monde avec Dieu. Ceux à qui l'Esprit est envoyé participent à cette mission de l'Esprit. Le cœur de la mission de l'Esprit est la koinonia, une communion de personnes dans la communion de Dieu, Père, Fils et Esprit-Saint.

(56) La koinonia réelle que nous partageons déjà suscite notre souci commun de considérer conjointement les problèmes de la liberté religieuse et du prosélytisme qui nous ont séparés. Nous croyons que ces deux problèmes, liberté religieuse et prosélytisme, ne doivent pas être traités comme deux sujets totalement distincts, mais doivent être étroitement liés et examinés conjointement comme des questions connexes, vues dans le contexte de la signification de l'évangélisation et de la possibilité d'un témoignage commun. Les chrétiens évangéliques et catholiques peuvent à présent constater qu'ils partagent une communion réelle, bien qu'imparfaite, et qu'ils sont en mesure de faire de modestes pas vers une communion plus totale en Christ par l'Esprit-Saint. Les composantes en corrélation entre elles, nécessaires pour que progresse la koinonia, sont le repentir, la conversion et l'engagement par lequel nous nous engageons à rechercher la convergence qui a déjà commencé dans notre vie en commun.

(57) La première composante est le repentir, un renoncement radical aux attitudes d'esprit et de cœur qui s'écartent des buts et du dessein de Dieu. Ces buts prévoient la communion entre les personnes et Dieu et entre les communautés dont l'unité est l'œuvre de l'Esprit. Dieu veut que son Église soit l'instrument principal de la koinonia de tous les peuples de Dieu. C'est pourquoi la réconciliation de nos communautés chrétiennes revêt un caractère d'urgence.

(58) La deuxième composante du progrès de la koinonia est la conversion, dans laquelle, par la foi, nous nous tournons vers Dieu en Christ et en son message salvifique. La conversion chrétienne a elle-même trois aspects: moral, intellectuel et religieux. Dans la conversion morale, la grâce nous permet d'apprécier ce que Dieu apprécie et d'obéir à ce que Dieu attend de nous. Par la conversion intellectuelle, nous apprenons à connaître et à embrasser la vérité. Par la conversion religieuse, nous parvenons à demeurer dans l'amour de Dieu.

(59) La troisième composante qui nous vient de l'Esprit est le fait de se tourner les uns vers les autres dans notre engagement à proclamer l'Évangile. Catholiques et évangéliques s'efforcent d'apprendre à s'aimer les uns les autres dans leur travail d'évangélisation. On note des signes de convergence sur la façon dont nous devons participer à la mission de l'Esprit dans notre annonce de la Bonne Nouvelle. Nos deux traditions ont des idées sur le contenu de cette source inépuisable. Ces idées doivent être retenues dans nos activités d'évangélisation respectives, de manière à compléter et à soutenir les efforts des uns et des autres.

 

1. Repentir: de quoi nous détournons-nous?

(60) Catholiques et évangéliques sont appelés à demander la grâce d'une meilleure compréhension de la volonté du Christ, qui n'était pas présente dans nos relations précédentes (P 108). Dans le passé, nos divisions ont été la cause de conflits dans le travail d'évangélisation. 
Mais à Manille, en 1989, les évangéliques se sont exhortés les uns les autres:

«Dans le Nouveau Testament, évangélisation et unité sont étroitement liées. Jésus a prié pour que l'unité de son peuple reflète son unité avec le Père et que le monde croie en lui, et Paul exhorte les Philippines à «combattre d'une même âme pour la foi de l'Évangile». À la lumière de cette vision biblique, nous avons honte de nos rivalités et de nos soupçons, de notre dogmatisme sur les questions secondaires, de nos luttes pour le pouvoir, et de la construction d'empires, toutes choses qui portent atteinte à notre témoignage» (Manille 9). 
Et le Pape Jean-Paul II, au nom des catholiques, a demandé le pardon de Dieu pour les péchés contre l'unité dans la prière suivante:

Père miséricordieux, 
à la veille de sa passion, 
ton Fils a prié pour l'unité de ceux 
qui croient en lui: 
mais, à l'encontre de sa volonté, 
ils se sont opposés et divisés, 
ils se sont condamnés mutuellement 
et ont combattu les uns contre les autres. 
Nous invoquons avec force ton pardon 
et nous te demandons de nous donner un cœur repentant, 
afin que tous les chrétiens, réconciliés avec toi et entre eux, 
ne formant plus qu'un corps et un esprit, 
puissent revivre la joyeuse expérience 
de la pleine communion. 
Par Jésus, le Christ, notre Seigneur» [12].

(61) En ce qui concerne le «prosélytisme», on remarquera que la compréhension de ce terme a considérablement changé dans certains milieux au cours des dernières années. Dans la Bible, le terme prosélyte n'avait aucune connotation négative. Il désignait une personne étrangère à Israël, qui, par la foi en Yahvé et l'acceptation de la loi, devenait membre de la communauté juive. Le terme avait le sens positif de converti au judaïsme (Ex 12, 48-49). La chrétienté a repris ce sens positif et impeccable pour désigner une personne convertie du paganisme. Jusqu'au vingtième siècle, l'œuvre missionnaire et le prosélytisme étaient généralement considérés comme synonymes et sans connotation discutable (B 32, 33). Ce n'est qu'au cours du vingtième siècle que le terme a été appliqué aux tentatives faites pour recruter des membres chez les autres (B 33), comme une forme illicite d'évangélisme (P 90). Au moins dans certains milieux évangéliques, le sens du terme prosélytisme n'est pas péjoratif; il l'est par contre dans les milieux catholiques et dans la plupart des milieux œcuméniques. Les tentatives faites «pour se prendre des membres les uns aux autres» (B 33) par des moyens indignes constituent un prosélytisme négatif et péjoratif. Les membres de nos communions se sont rendus coupables de prosélytisme dans ce sens négatif du terme. Cela doit être évité.

(62) C'est pourquoi nous affirmons «que devraient être évités: les offres ... d'avantages temporels ou matériels ; l'utilisation impropre de situations de détresse ; l'usage de pressions politiques, sociales ou économiques pour obtenir la conversion ... ; le discrédit jeté de façon injuste et peu charitable sur d'autres confessions; la comparaison des points forts et des idéaux d'une communauté avec les points faibles et les pratiques d'une autre communauté» (B 36). La question des tentatives de gagner des membres d'autres Églises a des conséquences sérieuses du point de vue ecclésiologique et missiologique, qui requièrent un examen ultérieur.

(63) Les méthodes peu éthiques d'évangélisation doivent être nettement distinguées de l'acte légitime d'une présentation convaincante de l'Évangile. Si un chrétien, après avoir entendu une présentation de l'Évangile faite de manière responsable, choisit librement d'adhérer à une autre communauté chrétienne, on ne doit pas en déduire obligatoirement qu'un tel transfert est le résultat d'un acte de prosélytisme (P 93,94).

(64) Les relations entre catholiques et évangéliques ont été perturbées par les tentatives d' évangéliser des personnes appartenant déjà à une autre Eglise, une pratique qui crée des malentendus et du ressentiment, surtout lorsque les évangéliques essayent de «convertir» des baptisés catholiques en les amenant à quitter l'Église catholique. C'est plus qu'un conflit verbal sur un emploi différent de termes tels que conversion, chrétien et Église. Les évangéliques parlent de «chrétienté de nom seulement» à propos de ceux qui portent le nom de chrétiens mais ne le sont en réalité que marginalement, même s'ils ont été baptisés. Les chrétiens de nom contrastent avec les croyants convertis qui peuvent témoigner d'une union vivante avec le Christ, dont la confession est biblique et la foi est active dans la charité. Cette nette distinction est courante parmi les évangéliques pour qui les chrétiens de nom doivent être gagnés à un rapport personnel avec le Seigneur et Sauveur. Les évangéliques s'efforcent d'évangéliser les membres de nom de leurs propres Églises, de même que ceux d'autres Églises; à leurs yeux, cette activité correspond à un réel souci de l'Évangile et n'est pas une manière répréhensible de «voler les brebis» des autres (E section III). Les catholiques parlent aussi de la nécessité d' «évangéliser» ces personnes, bien qu'ils les appellent membres «non pratiquants» ou «inactifs» plutôt que «de nom», et les considèrent toujours comme des «chrétiens», puisqu'il s'agit de croyants baptisés. Ils se sentent à juste titre offensés lorsque les évangéliques semblent juger tous les catholiques comme des chrétiens de nom, ou chaque fois qu'ils basent leur évangélisme sur une fausse opinion de la doctrine et de la pratique catholique.

(65) Nous reconnaissons qu'une distinction doit être faite entre l'appréciation des doctrines et des pratiques d'une Église et le jugement porté sur la condition spirituelle d'une personne, c'est-à-dire sur sa relation avec le Christ et avec l'Église.

(66) En ce qui concerne la condition spirituelle ou religieuse d'une personne, qu'elle soit chrétienne de nom, non pratiquante, inactive ou détachée, tout jugement négatif est suspect d'intrusion, à moins que la personne que l'on veut évangéliser ne soit elle-même à l'origine de cette information. La condition spirituelle individuelle est toujours un mystère. D'abord devrait venir l'écoute, accompagnée d'une bienveillante présomption de charité, et dans tous les cas nous ne devrions proposer notre perception et notre expérience de la Bonne Nouvelle qu'avec une attitude de respect total des personnes que nous cherchons à évangéliser. Cette même attitude est nécessaire, non seulement pour l'évangélisation, mais également pour tout effort tendant à persuader nos frères et sœurs de ce que nous croyons être vrai.

(67) Évangéliques et catholiques sont exhortés à se repentir d'avoir donné de fausses images les uns des autres, soit par indolence dans l'étude des faits, soit en raison du refus d'écouter l'autre, de préjugés ou de jugements peu éthiques (E I). Nous regrettons notre ignorance coupable qui néglige le savoir aisément accessible sur la tradition de l'autre (P 93). Nous sommes profondément conscients du commandement: «Tu ne témoigneras pas faussement contre ton prochain»! (Ex 20, 16).

(68) Nous regrettons les formes d'évangélisation suggérées par la rivalité et le prestige personnel, de même que les références injustes ou peu charitables aux croyances et aux pratiques d'autres communautés religieuses, comme moyen de gagner de nouveaux membres (E I, p. 91; J 19). Nous regrettons l'usage de ces moyens dans le but de conserver nos propres membres. Nous déplorons les formes concurrentielles d'évangélisation qui nous opposent à d'autres chrétiens (P 93) (cf. DH 4, 12; JEAN-PAUL II, Tertio millennio adveniente 35). Toutes les formes d'évangélisation devraient rendre témoignage à la gloire de Dieu.

(69) Nous regrettons toute forme d'évangélisation visant à exercer des pressions sur les personnes pour les amener à changer d'allégeance religieuse, par des méthodes qui discréditent l'Évangile et compromettent plutôt qu'elles n'accroissent la liberté du croyant et la vérité de l'Évangile (B 31).

(70) Étant d'accord sur ces points, nous nous engageons à rechercher un «renouveau de l'âme» dans notre compréhension des intentions des uns et des autres (cf. Ep 4,23, UR 7).

 

2. Conversion: vers quoi nous tournons-nous?

a. Croître en koinonia

(71) Les liens de la koinonia que les chrétiens séparés partagent déjà, comportent d'autres responsabilités réciproques. Chacun doit avoir le souci du bien-être et de l'intégrité de l'autre. Les liens de la koinonia impliquent que les chrétiens des Églises établies prennent la défense des droits civils des autres chrétiens, droit à la liberté de parole, de presse et d'association. En même temps, les liens de la koinonia supposent que les autres chrétiens respectent les droits, l'intégrité et l'histoire des chrétiens des Églises établies. Les tensions peuvent être réduites si les chrétiens engagés dans la mission communiquent les uns avec les autres et essayent autant que possible de rendre témoignage ensemble, plutôt que de rivaliser entre eux.

(72) Pour notre compréhension de la conversion religieuse, il est essentiel de croire et d'expérimenter que «l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint qui nous a été donné» (Rm 5, 5). «Quiconque croit que Jésus est le Christ est né de Dieu; et quiconque aime Dieu qui engendre aime aussi celui qui est né de Dieu» (1 Jn 5, 1). Nos manquements dans l'amour mutuel est le scandale qui fait douter que nous n'ayons pas permis à cet amour d'entrer dans nos cœurs sans résistance. Puisque les évangéliques croient que leur Église est catholique et que les catholiques croient que leur Église est évangélique, il semblerait que notre tâche future est de mieux reconnaître les aspects mis en évidence par chacun de nous dans les vues des autres également.

(73) Les évangéliques reconnaissent avec les catholiques que le but de l'évangélisation est la koinonia avec le Dieu trin et les uns avec les autres. On accède à cette koinonia à travers la conversion au Christ par l'Esprit, dans la communauté de foi, de proclamation et d'amour, qui rend témoignage au Règne de Dieu. Les catholiques conviennent avec les évangéliques que tous les chrétiens, quelle que soit leur confession, peuvent avoir un rapport personnel vivant avec Jésus comme Seigneur et Sauveur. À partir de notre communion réelle, bien qu'imparfaite, nous demandons à Dieu la grâce de nous engager de nouveau à établir un rapport personnel vivant avec Jésus comme Seigneur et Sauveur et à approfondir nos rapports mutuels.

b. Liberté religieuse

(74) Nous grandissons dans la koinonia en nous aidant les uns les autres et en reconnaissant la liberté des uns et des autres. La liberté religieuse est non seulement un droit civil mais c'est également un des principes, avec celui du respect mutuel, qui guide les relations entre les membres du Corps du Christ et en fait, dans toute la famille humaine (P 99). Nous sommes appelés à travailler ensemble à promouvoir la liberté de conscience de toutes les personnes et à défendre les garanties civiles de la liberté d'association, de parole et de presse. Catholiques et évangéliques, en reconnaissant que nous avons souvent omis de respecter ces libertés dans le passé, nous affirmons le droit de toutes les personnes de chercher la vérité et de lui rendre témoignage (J 15, P 104). Nous affirmons le droit des personnes d'adopter ou de changer librement leur communauté religieuse sans aucune contrainte. Nous déplorons toute tentative d'imposer des croyances ou de manipuler autrui au nom de la religion (J 15, P 102). Les évangéliques peuvent être d'accord avec la position du Concile Vatican II sur la liberté religieuse, à savoir que tous les hommes «doivent être soustraits à toute contrainte de la part soit des individus, soit des groupes sociaux et de quelque pouvoir humain que ce soit, de telle sorte qu'en matière religieuse nul ne soit forcé d'agir contre sa conscience, ni empêché d'agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou associé à d'autres» (DH2; cf. B 40).

(75) L'Église catholique, dans la personne du Pape Jean-Paul II, a reconnu les violations de la justice et de la charité dont ses membres se sont rendus coupables au cours de l'histoire et en a demandé pardon [13]. Aujourd'hui, elle cherche à défendre la liberté religieuse de toutes les personnes et de leurs communautés. En même temps, elle s'est engagée à diffuser le message de l'Evangile parmi tous les hommes, sans prosélytisme et sans dépendre de l'État.

(76) Alors que pour les évangéliques, la liberté religieuse avait été un point de ralliement depuis leurs débuts, l'esprit catholique de John Wesley, les revivals du dix-neuvième siècle et les appels à la mission mondiale, les ont sollicités à passer du sectarisme à un plus grand respect mutuel et à une coopération accrue dans la mission. L'aspect interconfessionnel l'esprit communautaire mondial et la coopération dans la mission ont eu le soutien de l'Alliance évangélique. Celle-ci a toujours eu le souci de la liberté religieuse et déjà en 1872 elle a même exercé des pressions en faveur des catholiques opprimés au Japon [14]. Selon le Manifeste de Manille (1989):

«Les chrétiens souhaitent profondément la liberté religieuse pour tout le monde et pas uniquement pour le christianisme. Dans les pays à majorité chrétienne, les chrétiens sont les premiers à demander la liberté pour les minorités religieuses. En conséquence, dans les pays à majorité non chrétienne, les chrétiens ne font que réclamer pour eux-mêmes ce qu'ils exigent pour les autres dans des conditions analogues. La liberté de «pro­fesser, pratiquer et propager» sa religion, selon la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, est un droit qui peut et doit être mutuellement re­connu» (Manille12.1)
«Nous regrettons vivement tout témoignage in­digne dont les disciples de Jésus se sont rendus coupables» (Manille 12.2)

(77) La liberté religieuse est un droit qui découle de la dignité même de la personne, telle que nous la connaissons par la Parole de Dieu révélée: elle est fondée sur la création de tous les êtres humains à l'image et ressemblance de Dieu (P 98). Les autorités civiles sont tenues de respecter et de défendre ce droit (cf. DH 2). Pour les catholiques, cette position a été officiellement adoptée par le Concile Vatican II dans la Déclaration sur la liberté religieuse. Les évangéliques ont pris une position analogue dans Lausan­ne1974, Manille1989 et Amsterdam 2000.

(78) Sur cette position, évangéliques et catholiques romains diffèrent quelque peu dans le raisonnement théologique et anthropologique. Dans la pensée sociale catholique, la théorie des droits est basée sur la loi naturelle. Les droits humains sont considérés comme des revendications morales légitimes qui nous sont données par Dieu; les agents moraux doués de liberté ont le devoir correspondant d'agir à la lumière de ces revendications. La révélation est considérée dans le sens de compléter cette conception des droits. Dans la doctrine évangélique, la primauté est due au droit divin sur la conscience, la revendication immédiate du Seigneur sur chaque individu; les droits humains sont alors vus non seulement à la lumière de la création mais aussi sur la toile de fond de la chute de l'homme par le péché. Lhistoire du péché renforce d'autant plus l'importance du mandat concernant les droits. Dieu continue de chercher les créatures déchues dans le déroulement de l'histoire de la grâce. Catholiques et évangéliques reconnaissent que les droits humains doivent être interprétés et exercés dans le cadre de la doctrine de l'Écriture et d'un raisonnement moral rigoureux. On accordera l'attention qu'il convient aux besoins des autres, aux devoirs envers les autres et au bien commun de tous (P 102, Décret sur la liberté religieuse 7). Le langage des droits humains doit également se garder de tomber dans le narcissisme, l'affirmation de soi et l'idéologie.

 

3. Se tourner les uns vers les autres: le défi du témoignage commun

(79) Ce qui reste une espérance et un défi est la perspective de notre témoignage commun. Nous considérons les communautés de foi dont nous sommes membres comme ayant été choisies et consacrées pour la mission. Nous sommes préoccupés par la sécularisation croissante du monde et par les efforts tendant à marginaliser les valeurs chrétiennes. Il est urgent que notre évangélisation devienne de plus en plus efficace. N'est-il pas également urgent que les chrétiens rendent témoignage ensemble? En ce sens, le Concile Vatican II a demandé aux catholiques de collaborer avec les autres chrétiens, dans les termes suivants:

«Autant que le permettent les situations religieuses ... [que] les catholiques collaborent ... par une commune profession de foi en Dieu et en Jésus Christ devant les nations ... et par une coopération dans les questions sociales et techniques, culturelles et religieuses; qu'ils collaborent surtout à cause du Christ leur Maître commun: que Son Nom les unisse!» (AG 15).

Au cœur de l'évangélisation est la foi apostolique que l'on trouve dans la Parole de Dieu, les credo, et qui est reflétée dans les interprétations bibliques et dans le consensus doctrinal de l'époque patristique. La possibilité, pour évangéliques et catholiques, de rendre un témoignage commun réside dans le fait qu'en dépit de leurs désaccords, ils partagent une grande partie de la foi chrétienne. Par exemple, nous nous réjouissons de pouvoir confesser ensemble le Symbole des apôtres qui résume toute la foi biblique.

(80) Tout en reconnaissant les divergences qui subsistent, nous discernons une convergence entre nos deux communions sur l'exigence et les possibilités d'un témoignage commun:

La Déclaration d'Amsterdam 2000 exhorte les évangéliques:

«à prier et à œuvrer pour l'unité dans la vérité parmi tous les véritables croyants en Jésus, et à coopérer le plus pleinement possible avec d'autres frères et sœurs en Christ pour l'évangélisation, afin que l'Église tout entière puisse apporter l'Évangile tout entier au monde tout entier» (Amsterdam 14).

Et le Pape Jean-Paul II pose la question:

«Comment annoncer l'Évangile de la réconciliation sans s'engager en même temps à travailler pour la réconciliation des chrétiens?» (UUS 98). C'est pourquoi, dans la mesure où la conscience et une claire reconnaissance des points d'accord et de désaccord le permettent, nous nous engageons à rendre témoignage en commun.

(81) Nous terminons ce rapport en nous unissant dans un esprit d'humilité et en remettant notre travail, avec les points forts et les limitations qu'il peut comporter, entre les mains de Dieu. Notre espoir est que ces efforts rendront louange et gloire à Jésus Christ.

«À Celui qui peut, par sa puissance qui agit en nous, faire au-delà, infiniment au-delà de ce que nous pouvons demander, à lui la gloire dans l'Église et en Jésus Christ, pour toutes les générations, aux siècles des siècles. Amen» (Ep 3, 20-21).

 

 

 
ABRÉVIATIONS

 

Documents catholiques

AG: Vatican 11 [*], Décret sur l'Activité missionnaire de l'Église, Ad Gentes

CD: Vatican II, Décret sur la Charge pastorale des évêques, Christus Dominus

DH: Vatican II, Déclaration sur la Liberté religieuse, Dignitatis Humanae

LG: Vatican II, Constitution dogmatique sur l'Église, Lumen Gentium

SC: Vatican II, Constitution sur la Sainte liturgie, Sacrosanctum Concilium

UR: Vatican II, Décret sur l'œcuménisme, Unitatis Redintegratio

EN: Paul VI, Exhortation apostolique, Sur l'évangélisation dans le monde moderne (1975), Evangelii Nuntiandi, (Cité du Vatican, 1990)

RM: Jean-Paul II, Lettre encyclique, Redemptoris Missio (1990), (Cité du Vatican, 1990)

UUS: Jean-Paul II, Lettre encyclique Sur l'engagement œcuménique (1995), Ut unum sint, (Cité du Vatican, 1995)

Documents évangéliques

Amsterdam: «Déclaration d'Amsterdam: une charte pour l'évangélisation au XXIe siècle» (2000).

Lausanne: «Convention de Lausanne», 1974, Nouvelles directives pour la mission et l'évangélisation 1: Déclarations fondamentales 1974-1991, James A. Scherer et Stephen Bevans, éd. (Maryknoll, 1992), pp. 253-259.

Manille: «Manifeste de Manille», 1989, Nouvelles directives pour la mission et l'évangélisation 1: Déclarations fondamentales 1974-1991, James A. Scherer et Stephen Bevans, éd. (Maryknoll, 1992), pp. 292-305.

Documents des dialogues 

B: Appel à rendre témoignage au Christ dans le monde d'aujourd'hui: un rapport sur les conversations internationales catholiques romains-baptistes 1984-1988, Conseil Pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens, Service d'information [SI] 72 (199011), pp. 5-14.

E: Rapport sur le dialogue catholique/évangélique sur la mission 1977-1984; voir également SI 60 (1986/1-11), pp. 71-97.

J: Groupe mixte de travail entre l'Église catholique et le Conseil œcuménique des Églises, «Le défi du prosélytisme et l'appel au témoignage commun», Septième rapport, appendice C, (Genève, 1998), pp. 43-52; voir également SI 91 (1996/1-11), pp. 77-83.

P: Évangélisation, prosélytisme et témoignage commun, Rapport sur la quatrième phase (1990-1997) du Dialogue international entre l'Église catholique et des Églises pentecôtistes classiques, ainsi que d'autres responsables pentecôtistesSI 97 (1998/1-11), pp. 38-56.

 

 

ANNEXE 1

ÉVOLUTION DE CETTE CONSULTATION INTERNATIONALE: 
BRÈVE VUE D'ENSEMBLE

 

1. Aperçu historique 

Les contacts croissants entre évangéliques et catholiques au cours des années 70 et 80 sont le contexte des consultations internationales entre la Communauté mondiale évangélique et l'Église catholique qui ont lieu depuis 1993.

Entre autres, pendant la période 1978 - 1984, un dialogue international sur la mission a réuni un certain nombre d'évangéliques et de catholiques. Du côté catholique, le dialogue était patronné par le Secrétariat Pontifical (Conseil Pontifical depuis 1988) pour la promotion de l'unité des chrétiens. Les participants évangéliques comprenaient divers responsables de haut niveau, tels que John Stott, mais qui agissaient à titre personnel, sans représenter officiellement aucun organisme évangélique. Le résultat de ce dialogue a été un important rapport publié en 1985, le premier dans lequel évangéliques et catholiques ont abordé ensemble les thèmes tels que le salut, l'évangélisation, la liberté religieuse et le prosélytisme.

Une autre arène internationale importante, où évangéliques et catholiques se rencontrent, est celle des réunions annuelles de la Conférence des Secrétaires des Communions chrétiennes mondiales (CCM). Cette Conférence, qui existe depuis plus de quarante ans, réunit les Secrétaires généraux, ou leurs équivalents, d'un grand nombre de CCM. Le Directeur international de la Communauté évangélique mondiale et le Secrétaire du Conseil Pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens participent à ces réunions annuelles informelles.

Le besoin de relations plus directes a été mis en évidence à l'occasion d'un événement particulier, qui a en outre été à l'origine des conversations actuelles entre la CEM et les catholiques. Il s'agit de l'invitation de deux représentants de l'Église catholique, dont le Secrétaire du Conseil Pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens, à assister en qualité d'observateurs à l'Assemblée générale de la CEM à Hoddesdon (Angleterre) en 1980, et à y apporter leurs salutations. Leur présence a suscité un vif débat, au terme duquel «l'Alliance évangélique italienne a annulé son affiliation et l'Alliance évangélique espagnole a suspendu la sienne». La Commission théologique de la CEM a réagi en instituant un Groupe de travail pour les questions œcuméniques, formé de soixante-dix membres. Ce groupe a rédigé une déclaration qui a été publiée dans un livre intitulé Catholicisme romain: une perspective évangélique contemporaine (éd. Paul G. Schrotenboer, Grand Rapids: Baker 1988) où l'on trouve les détails des faits que nous venons de mentionner (p. 9).

La réunion de la CEM à Jérusalem, en octobre 1988, a offert l'occasion d'une conversation privée sur ce livre, entre, d'un côté, le Rév. David Howard,

Directeur international de la CEM, et le Dr Paul Schrotenboer, Secrétaire général du Synode œcuménique réformé et Président du Groupe de travail de la CEM, et de l'autre côté, le Rév. P. Pierre Duprey, Secrétaire du Conseil Pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens, et Mgr John Radano, de ce même Conseil. Il fut décidé de tenir une brève réunion afin d'examiner les questions soulevées dans le livre. La réunion a eu lieu à l'occasion de l'assemblée de la CEM en octobre 1990 à Budapest (Hongrie). Deux représentants de chaque côté - le Dr Paul Schrotenboer et le Dr George Vandervelde pour la CEM; Mgr Kevin McDonald et Mgr John Radano pour le CPPUC - ont discuté pendant deux journées entières sur le contenu du livre. La discussion a permis de définir quelques-unes des différences qui existent entre nos deux communions, mais il est apparu clairement qu'un examen approfondi de ces questions exigeait plus de temps. On a donc proposé d'arranger à une date ultérieure une consultation plus longue et soigneusement préparée. S.Ex. Mgr Pierre Duprey a invité le groupe à se réunir à Venise.

 

2. Brève vue d'ensemble des réunions 

Plusieurs rencontres internationales ont eu lieu, en commençant par celle de Venise en octobre 1993. Leur but général était de promouvoir une compréhension majeure et de meilleures relations mutuelles.

Une première évaluation de la rencontre de 1990 a permis de constater que les thèmes importants à examiner à Venise étaient l'Écriture, la tradition (y compris le développement de la doctrine) et la nature de l'Eglise comme communion. Il est apparu clairement que la question de la doctrine de la justification devait également être traitée. Des documents de travail ont été préparés par le Rév. P. Avery Dulles, S.J. («La révélation comme base de l'Écriture et de la Tradition») avec une réponse du Dr Henri Blocher, et par le Dr George Vandervelde (s.lusüfication entre Écriture et Tradition»). Le caractère exploratoire et délicat de cette rencontre se reflétait dans le fait qu'aucune déclaration ni aucun communiqué communs n'ont été publiés. Finalement, les documents ont parus en 1997 dans la Evangelical Review of Theology. La réunion a confirmé l'importance des questions abordées et en a dégagé deux en particulier qui tendent à diviser évangéliques et catholiques. Outre la nature de l'Église comme communion, l'autre question concernait la nature et la pratique de la mission et de l'évangélisme.

Ces thèmes ont été abordés lors de la consultation suivante qui s'est tenue en octobre 1997 à l'Institut œcuménique Tantur à Jérusalem. Des documents de travail ont été présentés par le Rév. P. Avery Dulles, S.J. («L'Église une, sainte, catholique et apostolique»), le Dr George Vandervelde («Ecclesiology in the Breach: Evangelical Soundings»), le Rév. P. Thomas Stransky, C.S.P. («La mission de l'Église») et le Dr Samuel Escobar («Dynamisme missionnaire en quête de discernement missiologique»), Les cosecré­taires de cette réunion étaient le Dr Paul Schrotenboer et le Rév. P. Timothy Galligan.

La confiance mutuelle croissante entre les deux partenaires se reflétait dans le fait que pour la première fois un communiqué a été diffusé au terme de la réunion. Les documents de travail ont été publiés tant dans la Evangelical Review of Theology que dans la revue catholique One in Christ. Quelques mois après cette rencontre nous avons reçu la triste nouvelle du décès du Dr Paul Schrotenboer. Il avait fait preuve d'un profond engagement dans ce processus dès la réunion de Venise, à laquelle il avait tenu à participer malgré une grave maladie qui mettait ses forces à dure épreuve. En 1997, il avait assuré la coprésidence de la rencontre de Tantur, en dépit de l'amputation d'une jambe quelques mois auparavant. Nous remercions Dieu pour le fort témoignage du Dr Schrotenboer en vue de surmonter les malentendus et l'hostilité entre évangéliques et catholiques, qui persistaient depuis si longtemps.

La troisième rencontre a eu lieu à Williams Bay, dans le Wisconsin (U.S.A.) en novembre 1999, sur invitation de la CEM. Entre temps, il avait été convenu que ces réunions auraient une périodicité régulière. La session de Williams Bay était centrée sur le thème de l'Église comme communion. Ce thème a été développé par le Rév. P. Avery Dulles, S.J. du côté catholique et par le Dr Henry Blocher du côté évangélique. Le Rév. P. Thomas Stransky, C.S.P., a présenté un texte mettant en évidence certains aspects de divers rapports sur les thèmes de «liberté religieuse, témoignage commun et prosélytisme». Un document de Daniel M. Carroll traitait les mêmes sujets en fonction de leur incidence sur les relations entre catholiques et évangéliques en Amérique latine. Les cosecrétaires de la réunion étaient le Dr George Vandervelde et Mgr Timothy Galligan.

Un nouveau développement dans les conversations a été marqué par la demande de préparer deux documents en collaboration. Le Rév. P. Avery Dulles, S.J., et le Prof. Henri Blocher ont été chargés de rédiger un résumé unifié des convergences et des divergences sur l'Église comme koinonia, et on a demandé au Dr Thomas Oden, au Rév. P. Thomas Stransky, C.S.P., et au Rév. P. John Haughey, S.J., de préparer un document sur les thèmes de la liberté religieuse, du témoignage commun et du prosélytisme.

Outre la discussion sur les documents, plusieurs événements importants ont eu lieu durant la session de Williams Bay, qui ont contribué à approfondir notre compréhension mutuelle. Les membres du dialogue ont rendu visite à d'importantes écoles évangéliques, dont le Wheaton College et la Trinity Evangelical Divinity School. Ils ont rencontré quelques-uns des enseignants des deux institutions, avec lesquels ils ont eu des échanges informels. À Wheaton, ils ont visité l'Institut pour l'Étude des Évangéliques américains et ont eu un échange avec son directeur; ils ont également visité le Musée Billy Graham, avec son exposition sur l'histoire du mouvement évangélique aux U.S.A. À la Trinity School, ils ont été accueillis au cours d'une réception offerte en leur honneur par le Doyen académique, le Dr Bingham Hunter, et où l'ex-président, le Dr Kenneth Kantzer, a pris la parole; ils se sont ensuite entretenus de manière informelle avec les membres du corps enseignant. Le groupe a également visité le Séminaire de l'Archidiocèse de Chicago à Mundelein où le Cardinal Francis George, Archevêque de Chicago, leur a offert un dîner. À Mundelein le groupe a en outre rencontré les membres du projet catholique­évangélique local, «Common Root». Ces diverses rencontres ont donné aux participants du dialogue l'occasion d'approfondir leur connaissance de la vie de leurs partenaires et d'avoir une vue plus large des contacts entre évangéliques et catholiques, ce qui en­courage le dialogue dans son important travail.

Une indication de l'esprit fraternel croissant est l'acceptation de l'invitation du Pape Jean-Paul II, transmise à la CEM par le CPPUC, et adressée également à de nombreuses autres Églises et Communautés chrétiennes mondiales, à envoyer un représentant à la «Commémoration œcuménique des Témoins de la foi du Vingtième siècle» au Colisée à Rome, le 7 mai 2000, un des événements œcuméniques du Jubilé de l'An 2000. Le Dr George Vander­velde et le Rév. Johan Candelin ont représenté la CEM à cette célébration.

La quatrième session a eu lieu à Mundelein, Illinois (U.S.A.) du 18 au 24 février 2001. L'évolution de ce dialogue est mise en évidence par le fait que pour la première fois le groupe disposait d'un projet de texte commun sur le thème de la koinonia, préparé par Avery Dulles en collaboration avec Henry Blocher (le Rév. P. Dulles, S.J., n'a pas pu participer à cette réunion, étant retenu à Rome pour y recevoir l'investiture cardinalice par le Pape Jean-Paul II). Un autre texte, rédigé par le Dr Thomas Oden, rassemblait des aspects spécifiques de divers documents des dialogues précédents sur les thèmes de la liberté religieuse et du prosélytisme. Ce texte, et plusieurs courtes thèses sur ce même matériel, préparés par le Rév. P. John Haughey, S.J., ont également fait l'objet de discussions.

Une cinquième session s'est tenue à Swanwick (Angleterre) du 17 au 26 février 2002. D'importants changements étaient intervenus dans les deux organismes promoteurs pendant l'intervalle entre la dernière réunion et celle de Swanwick. L'appellation de la CEM avait été changée en Alliance évangélique mondiale (AEM) et un processus était en cours pour la nomination de nouveaux responsables. De son côté, le Conseil Pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens avait un nouveau Président et un nouveau Secrétaire. En outre, en 2001, au terme de la période de service au CPPUC de Mgr Timothy Galligan, cosecrétaire de la Consultation, le Rév. P. Juan Usma G6mez a été chargé d'assurer ces fonctions du côté catholique. Trois nouveaux participants évangéliques était présents pour la première fois: le Rév. Dr Rolf Hille, Président de la Commission théologique de l'AEM, le Rév. Dr David Hilborn, Conseiller théologique de l'Alliance évangélique du Royaume-Uni, et le Rév. Carlos Rodriguez Mansur, de la Fratemidad Teologica Latinoamericana au Brésil. Alors que la préparation de cette session avait été retardée en raison des changements survenus dans les deux organismes, la Consultation avait à sa disposition à Swanwick un projet intégré du rapport conjoint proposé et a décidé de lui donner une forme définitive. Le texte, complété à la fin de la semaine, comprenait deux parties principales. La première était centrée sur les convergences entre catholiques et évangéliques concernant la koinonia, la seconde partie sur le rapport entre koinonia et évangélisation.

Il a été convenu que le rapport définitif serait soumis aux organismes promoteurs en leur demandant l'autorisation de le publier comme document d'étude. L'achèvement de ce texte a mis le point final à une phase des conversations. Au terme de leur travail, les participants ont exprimé l'espoir que cette consultation entre l'Alliance évangélique mondiale et l'Église catholique pourra se poursuivre.

 


ANNEXE 2

LISTE DES PARTICIPANTS

 

ALLIANCE MONDIALE ÉVANGÉLIQUE
ÉGLISE CATHOLIQUE
Venise (Italie), 21-25 octobre 1993

 

Dr Henri Blocher (France)

Évêque Jorge Mejîa (Rome)

Dr Pablo Perez (U.S.A.)

Rév. P. Karl Muller, S.v.D. (Allemagne)

Dr Paul Schrotenboer (U.S.A.)

Rév. John Redford (Angleterre)

Dr George Vandervelde (Canada)

Rév. P. Thomas Stransky, C.S.P., (Jérusalem)

 

Mgr John Radano (Rome)

 

Rév. Timothy Galligan (Rome)

 

 

Jérusalem, 13-19 Octobre 1997

 

Dr Paul Schrotenboer (U.S.A.), Secrétaire

Rév. Timothy Galligan (Rome), Secrétaire

Dr Henri Blocher (France)

Rév. P. Frans Bouwen, M. Afr. (Jérusalem)

Dr Samuel Escobar (U.S.A.)

Mgr Joseph Dinh Duc Dao (Rome)

Dr George Vandervelde (Canada)

Rév. P. Avery Dulles, S.J. (U.S.A.)

Dr Stanley Mutunga (Kenya)

Sr Maria Ko, EM.A. (Hong Kong/Rome) 

Dr Thomas Oden (U.S.A.)

Mgr John Radano (Rome)

Dr Peter Kusmic (U.S.A.)
(n'a pas pu prendre part à la réunion)

Rév. P. Thomas Stransky, C.S.P., (Jérusalem)

 

Rév. Juan Usma G6mez (Rome)

 

 

Williams Bay (WI, USA) 7-13 novembre 1999

 

Dr George Vandervelde (Canada), Secrétaire

Rév. Timothy Galligan (Rome), Secrétaire

Dr Henri Blocher (France)

Rév. P. Avery Dulles, S.J. (U.S.A.)

Dr Thomas Oden (U.S.A.)

Rév. P. John Haughey, S.J. (U.S.A.)

Dr M. Daniel Carroll Rodas (U.S.A.)

Sr Maria Ko, EM.A. (Hong Kong/Rome)

Dr Tite Tienou (U.S.A.)

Mgr John Radano (Rome)

Dr James Stamoolis (U.S.A.)

Rév. P. Thomas Stransky, C.S.P. (Jérusalem)

 

Rév. Juan Usma G6mez (Rome)

 

Fr. Jeffrey Gros, ES.C. (U.S.A.)

Mundelein (IL, USA) 18-24 février 2001

 

Dr George Vandervelde (Canada), Secrétaire

Rév. Timothy Galligan (Rome), Secrétaire

Dr Henri Blocher (France)

Cardo Avery Dulles, S.J. (U.S.A.)
(n'a pas pu prendre part à la réunion)

Dr Thomas Oden (U.S.A.)

Rév. P. John Haughey, S.J. (U.S.A.)

Prof. Lilia Solano (Colombia)

Sr Maria Ko, EM.A. (Hong Kong/Rome)

Dr James Stamoolis (U.S.A.)

Mgr John Radano (Rome)

Dr Daniel H. Williams (U.S.A.)

Rév. Juan Usma Gómez (Rome)

 

Fr. Jeffrey Gros, ES.C. (U.S.A.)

 

Rév. P. Thomas Rausch, S.J. (U.S.A.)

 

 

Swanwick (Royaume-Uni) -17-26 février 2002

 

Dr George Vandervelde (Canada), Secrétaire

Rév. Juan Usma Gómez (Rome), Secrétaire

Dr Henri Blocher (France)

Cardo Avery Dulles, S.J. (U.S.A.)
(n'a pas pu prendre part à la réunion)

Dr Thomas Oden, (U.S.A.)

Rév. P. John Haughey, S.J. (U.S.A.)

Dr Rolf Hille (Allemagne)

Sr Maria Ko, EM.A. (Hong Kong)
(n'a pas pu prendre part à la réunion)

Dr David Hilborn (Royaume-Uni)

Mgr John Radano (Rome)

Dr James Stamoolis
(n'a pas pu prendre part à la réunion)

Fr. Jeffrey Gros, ES.C. (U.S.A.)

Dr Daniel H. Williams (U.S.A.)
(n'a pas pu prendre part à la réunion)

Rév. P. Thomas Rausch, S.J. (U.S.A.)




NOTES

* Église catholique et Alliance évangélique mondiale sont les appellations officielles des deux organismes promoteurs. En utilisant leurs appellations officielles, les promoteurs de la Consultation ne revendiquent en aucune manière ces caractéristiques, c'est­à-dire «catholique» ou «évangélique», à leur usage exclusif.

[1] JOHN REUMANN, «Koinonia in Scripture: Survey of Biblical Texts», On The Way to Fuller Koinonia: Official Report of the Fifth World Conference on Faith and Order; Faith and Order Paper no. 166 (Genève, 1994), p. 62.

[2] Sur l'expression «communia sanctorum» dans le symbole des apôtres, voir J. N. D. KELLY, Early Christian Creeds, 3° éd. (New York, 1972), pp. 389-390. Cette interprétation sacramentelle est ap­puyée par STEPHEN BENKO, The Meaning of Communion of Saints (Naperville Ill., 1964) et par WERNER ELERT, Eucharist and Church Fellowship in the First Four Centuries (St. Louis, 1966), chap. 1 et excursus 1,2 et 3.

[3] La liste des abréviations se trouve à la fin du Rapport.

[4] «A Call to Evangelical Unity: 'The Gospel of Jesus Christ: An Evangelical Celebration'», Christianity Today 43:7 (June 14, 1999), pp. 49-56.

[5] «The Chicago Cali: An Appeal to Evangelicals» (1977), Gro­wing Consensus: Church Dialogues in the United States, 1962-1991, Joseph Burgess and Jeffrey Gros eds. (New York 1995), p. 579.

[6] Nous avons en commun la majorité des livres bibliques, mais le canon catholique inclut également les livres dits «deutérocano­niques», et que les protestants qualifient d'«apocryphes».

[7] «Confessing the One Faith: An Evangelical Response by the World Evangelical Fellowship Task Force on Ecumenical Issues», Evangelical Review of Theology 18 (1994), pp. 34-36.

[8] Ce style d'ecclésiologie montre une vision de l'Église universelle comme un réseau d'Églises locales en communion entre elles. Selon le Synode extraordinaire des évêques de 1985, «l'ecclésiologie de communion est le concept central et fondamental dans les documents du Concile. La koinonia-communion, fondée sur la sainte Écriture, fut tenue en grand honneur dans l'Église antique et jusqu'à nos jours dans les Églises orientales. C'est pourquoi Vatican II s'est attaché à ce que l'Église, comme communion, soit plus clairement comprise et plus concrètement traduite dans la vie». [Rapport final, II,C), 1].

[9] La Congrégation pour la Doctrine de la foi, dans sa lettre aux évêques sur Quelques aspects de l'Église conçue comme communion, souligne la priorité de l'Église universelle sur l'Église particulière (cf. Origines 22 [25 juin 1992], pp. 108-112). Dans sa présentation de Lumen gentium à la Rencontre internationale lors de la réception de Vatican II, le 27 février 2000, le Cardinal Ratzinger a expliqué que la communauté des 120 sur laquelle l'Esprit-Saint est descendu (Ac 2, 1-4) était un renouvellement de la communauté des Douze, qui avait reçu le mandat d'apporter l'Évangile jusqu'aux confins de la terre. Cette communauté était le Nouvel Israël. Cf. JOSEPH RATZINGER, «L'ecclesiologia della Costituzione Lumen gentium», Il Concilio Vaticano II, Ricezione e attualità alla luce del Giubileo, Rino Fisichella (éd.), (Milan 2000), pp. 66-81.

[10] PIE XII, Encyclique Mystici corporis Christi 79.

[11] ABRAHAM KUYPER, Het Calvinisme (Kampen, Kok [1999]), pp. 53-54.

[12] Cf. JEAN-PAUL II, « Prière universelle du pardon, III. Confession des péchés qui ont compromis l'unité du Corps du Christ», durant la liturgie du premier dimanche de Carême, Basilique Saint-Pierre (Cité du Vatican, 12 mars 2000). Voir: Conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens, Cité du Vatican, Service d'information 103 (2000/I-II), p. 58.

[13] Cf. JEAN-PAUL II, «Prière universelle du pardon, e) Confession des fautes commises par des comportements contre l'amour la paix, les droits des peuples, le respect des cultures et des religions», Cité du Vatican, 12 mars 2000.

[14] Cf: I. RANDALL et D. HILBORN, One Body in Christ: The History and Significance of the Evangelical Alliance (Carlisle, 2001), p. 98.

[*] Cf. Vatican II. Les seize documents conciliaires, éd. Fides, Montréal-Paris, 1967.