Commentaire et réflexions sur " Dire la vérité dans l'amour :
l'autorité d'enseignement chez les catholiques
ET LES MÉTHODISTES"

Commentaire de Ralph Del Colle (Marquette University, Milwaukee, Wisconsin, États-Unis) 
sur le Rapport de la Commission mixte 
Église catholique romaine - Conseil méthodiste mondial 1997-2001*

 

 

Voici donc le quatrième rapport du dialogue international catholique-méthodiste consacré à des questions théologiques fondamentales et à des problèmes de base de l'ecclésiologie. Trois phases antérieures ont produit les rapports suivants : Vers une déclaration sur l'Église (1982-1986), La Tradition apostolique (1986-1991), et La Parole de vie (1992-1996) - quatrième, cinquième et sixième séries. La septième phase, sur l'autorité doctrinale dans l'Église, qui vient de s'achever, a porté logiquement sur un des sujets les plus épineux du dialogue œcuménique. L'espérance de “ la communion plénière dans la foi, la mission et la vie sacramentelle ” [5] reste le but de ces échanges théologiques plutôt denses.

Beaucoup des sujets qui ont été envisagés de façon plus systématique depuis 1982 avaient d'abord été abordés dans les deux premières phases du dialogue, dans le Rapport de Denver de 1971 (87-118) et le Rapport de Dublin de 1976 (75-107). Le Rapport de Honolulu de 1981, qui comportait une section intitulée “ Vers un rapport commun sur le Saint-Esprit ”, donnait le ton pour les phases suivantes et imprimait une vigoureuse tournure pneumatologique à tout le dialogue. Ce n'était pas vraiment inattendu car la toute première réunion de la Commission mixte avait trouvé un terrain commun entre catholiques et méthodistes dans les domaines de la spiritualité et de la sanctification (Rapport de Denver 51-68). Elle reconnaissait aussi l’“ avantage singulier ” de cette conversation bilatérale particulière dans le fait qu'il n'y a pas eu de séparation formelle entre les deux Églises, avec les problèmes historiques et émotionnels qui s'ensuivent inévitablement (Rapport de Denver 6). On ressent le bénéfice de cette découverte également dans le présent Rapport. On y retrouve aussi le laborieux (au meilleur sens du terme) effort théologique qui est si caractéristique de ce dialogue.

Dire la vérité dans l'amour se divise en deux parties. La première explore, de manière plutôt systématique, les convergences théologique (et les différences) entre les deux traditions. La deuxième partie est plus descriptive, visant à esquisser comment la compréhension et la pratique internes à chaque tradition peuvent être comprises par l'autre. Pour conclure, un résumé rapide du “ donné commun identifiable ” et des “ différences marquantes ” laisse les deux communions avec une vue de la tâche à envisager pour faire avancer le dialogue. Il y a là une méthode intéressante et qui travaille à surmonter toute complaisance si les deux communions doivent être fidèles à leur vocation œcuménique Elle donne aussi une base aux questions théologiques qui ont surgi dans la vie ecclésiale concrète des deux communions. C'est là de loin la méthode la plus prudente pour engager chacune des deux traditions avec l'autre dans la recherche de l'unité chrétienne.

 

I. Commentaire de la première partie

Le titre du Rapport, Dire la vérité dans l'amour, vient du passage deutéro-paulinien en Ephésiens 4, 1-16 qui exhorte à l'unité dans l'unique foi et l'unique corps et envisage les dons du ministère donnés par le Christ monté au ciel comme des instruments pour édifier le corps du Christ. L'intégration de la foi et de l'amour si caractéristique de l'incarnation [6] est pareillement ce que voudrait ce processus ecclésial, que les fonctions dans l'Église : apôtre, prophète, évangéliste, pasteur et docteur (Ep 4,11), doivent servir. Il est éclairant, aussi, que ce processus doive mûrir “ à la mesure de la pleine stature du Christ ” (Ep 4, 13). Dans la ligne de la péricope, le Rapport affirme “ une diversité de dons et de fonctions compatibles dans Églisel'Église ” [4] quoique sans aucune allusion aux exemples qu'en offrent les contextes ecclésiaux méthodiste et catholique, comme si les deux étaient complémentaires l'un de l'autre. Cependant, il tient que “ le but des fonctions doctrinales est de 'promouvoir l'unité dans la foi' ” avec la conséquence que “ les questions de foi ” et “ la capacité de distinguer entre enseignements justes et erronés ” atteignent à “ la certitude et à la stabilité ” [5]. Le document marque ainsi fortement d'entrée de jeu l'importance de l'autorité doctrinale ou magistère (le mot n'apparaît qu'une fois dans le Rapport, dans un contexte spécifiquement catholique romain !) pour la vie de l'Église et “ la vérité de l'ÉvangileÉvangile ” [6].

La première partie du Rapport se divise en trois sections. Leurs titres sont révélateurs de la méthode employée : I . L'Église comme communion dans l'amour et la vérité ; II. La communauté prophétique de Dieu, ointe de l'Esprit de vérité ; III. Les moyens de grâce, serviteurs du Christ et de son Église. Cela rappelle Lumen gentium où l'on commence par dire le mystère de l'Église avant d'en venir aux réalités ecclésiales telles que la hiérarchie et le laïcat. Dans le cas présent, l'élucidation des structures ecclésiales responsables du maintien de l'Église dans la vérité est précédée de l'appel de l'Église à rendre témoignage à la vérité, car cela découle de la communion de l'Église dans la vérité. Même chose pour la mesure de vérité à la base de l'existence ecclésiale.

Les méthodistes et les catholiques sont en mesure de se prononcer ensemble pour “ le cœur de la doctrine chrétienne ” [9] qui tourne autour de la révélation de l'amour salvifique de Dieu en Christ et qui trouve “ expression dans la koinonia (communion, communauté) visible des disciples du Christ, l'Église ” [7]. Importante pour ce dialogue est la reconnaissance que les registres théologiques pour ces affirmations conjointes dans la foi sont les dogmes des “ conciles patristiques ” [8]. Non seulement le Symbole des Apôtres et le Symbole de Nicée-Constantinople “ fonctionnent comme règle de foi (regula fidei) normative pour l'enseignement officiel, conciliaire et autre ” [11], mais l'herméneutique théologique implicite qui est à l'œuvre produit des déclarations d'une doctrine christologique et trinitaire plutôt “ haute ” (et orthodoxe !), par exemple “ Jésus Christ … comme Deuxième Personne de la Trinité, qui s'est faite chair ” [8], et “ la divinité est trois Personnes, qui sont distinctes l'une de l'autre ” [9]. Considérant la diversité des positions théologiques – libérales et moins “ classiquement ” orthodoxes – parfois soutenues dans les écoles, il y a là un développement bienvenu dans ce dialogue particulier. Plus loin dans le document, le Rapport traite plus complètement des normes doctrinales qui informent les deux traditions. J'y reviendrai plus loin, dans la section critique de ce commentaire.

À la suite de l'attention portée à la doctrine de la révélation [10] et aux notes de l'Église [12], le Rapport en vient à ce qui est présentement le modèle ecclésiologique dominant à l'œuvre dans les cercles œcuméniques, à savoir l' “ ecclésiologie de communion ” [13-15].[1] Avec sa source dans la vie trinitaire de Dieu, l'Église existe dans les missions du Fils et de l'Esprit et concrétise cette communion dans sa vie sacramentelle, spécialement le baptême et l'Eucharistie [14]. Ces mêmes normes œcuméniques informent ce qui est dit de la médiation de la révélation par la voie de l'Écriture et de la Tradition, les deux attestant la primauté de la Parole identifiée au Seigneur incarné lui-même [16].[2] Le Rapport emboîte le pas aux textes précédents de la Commission mixte en affirmant l' “ harmonie entre l'Écriture, la Tradition et la vie chrétienne de foi et de culte ” comme représentative de la convergence croissante entre les méthodistes et les catholiques [18].[3] Ceci admis, la question clé qui émerge est de savoir comment l'Église décide “ entre les traditions divergentes et les interprétations conflictuelles de l'ÉvangileÉvangile ” [19].[4]

Pour la première fois dans le Rapport des exemples d'autorité doctrinale sont donnés pour chacune des deux traditions et on s'y réfère dans le reste du document. Les évêques localement (avec leur collège de presbytres) et ensemble, en collège et en concile sous la présidence de l'Evêque de Rome, exercent ce ministère, du côté catholique. Les méthodistes voient cet instrument dans la Conférence – une assemblée régulière du clergé et du laïcat (appelée Conférence Générale dans l'Église Méthodiste Unie aux USA, et qui se réunit tous les quatre ans) – avec ses surintendants (ou évêques, en certains cas) agissant en son nom [19]. Des deux côtés on compte sur l'assistance du Saint-Esprit, bien que les structures et la nature des charismes soient différents. Les méthodistes ne voudraient pas affirmer, comme le font les catholiques, le “ charisme de vérité et de foi infaillibles ” donné aux évêques, ou attribuer au Pape le charisme d'infaillibilité qu'il peut exercer à lui seul ou en union avec les évêques [20]. Les Conférences méthodistes peuvent formuler la doctrine avec une autorité (non nécessairement garantie de l'erreur) qui s'impose à leurs membres si elle est en accord avec l'Écriture [21].

Beaucoup de distinctions semblables entre les deux traditions informent également leurs références doctrinales. Comme on l'a mentionné plus haut, les deux acceptent “ les Écritures, les Symboles de foi et les décrets doctrinaux des premiers conciles œcuméniques ” [22]. Les deux ordonnent leur doctrine d'après son rapport au cœur de la foi : “ hiérarchie des vérités ” catholique, “ analogie de la foi ” ou “ grand schéma doctrinal ” de Wesley [23]. Les deux reconnaissent le développement de la doctrine [24] et le ministère exercé par les théologiens [25]. Le rôle de la prière, selon l'adage lex orandi lex credendi [26], l'orientation à la mission [27] et l'impératif de l' “ entière union externe ” [28], tout cela relève proprement de l'exercice de l'autorité doctrinale.

On fait état des références doctrinales, mais l'équivalence entre les deux traditions à cet égard n'empêche pas les différences d'appréciation. L'accumulation de décrets et de déclarations par les synodes d'évêques, le Pape et la Curie romaine pèse plus lourd dans l'Église catholique que ne le fait la lecture doctrinale de l'Écriture dans les Conférences méthodistes selon les textes “ canoniques ” des “ Sermons de John Wesley, de ses Notes sur le Nouveau Testament et des Articles de religion ” [22]. Ce qui demeure peu clair, d'après le Rapport, est la normativité de ces textes standards pour le méthodisme.

La section II de la première partie, La communauté prophétique de Dieu, ointe de l'Esprit de vérité, garde le vigoureux ton pneumatologique du Rapport, que souligne. le langage de Lumen gentium et de l'hymnodie wesleyenne [29]. Les appels à la prophétie de l'Ancien Testament [30-31], l'effusion de l'Esprit dans le Nouveau Testament [32], et la référence à leurs dialogues respectifs avec la Communion anglicane [33], tout sert à souligner que c'est à l'Église entière, laïcs et ministres ordonnés, qu'incombe le discernement de la vérité et de la volonté divine sous la conduite du Saint-Esprit.

Un domaine important de convergence est l'accord sur le fait que “ des organes divers de l'Église continue ” [38] sont les moyens par lesquels l'Esprit préserve l'Église en Christ, sans nier que la communauté “ a toujours besoin de purification et de réforme ” [39]. La divergence persistante porte sur la question de savoir jusqu'à quel point ces organes sont munis des dons de Dieu, les catholiques en revendiquant davantage que les méthodistes. Mais même en ce cas, c'est la communauté entière qui dans les deux traditions est réceptrice des largesses divines [40-41]. Cette co-responsabilité de tout le peuple de Dieu [43] n'entraîne pas forcément de conflit entre les rôles des différentes composantes du corps du Christ [45]. Du fait de la prééminence du baptême, l'onction du Saint-Esprit sur tous assure une large réponse de tout le peuple de Dieu à la Parole de Dieu [46].

Un thème très suggestif qui émerge dans cette section, avec son accent appuyé sur le peuple de Dieu dans son entier, tourne autour des nuances dans l'affirmation de l'importance du sensus fidei pour garder l'Église dans la vérité. Lui-même un aspect du don de la foi, le sensus fidei rend chaque croyant capable, par l'Esprit de vérité “ de reconnaître la Parole de Dieu et d'y répondre, de discerner la vérité de l'erreur en matière de foi et de mœurs, d'acquérir une vue plus profonde de ce qu'il croit et d'appliquer cette foi à la vie quotidienne ”. En ce sens plutôt large, le sensus fidei (notez qu'il embrasse l'existence quotidienne du chrétien) ne peut cependant être considéré comme un fait acquis. Les individus et les groupes peuvent en dévier – la vérité ne se sépare pas de la sainteté – et l'acte de foi individuel (“ Je crois ”) doit toujours participer de l'acte communautaire de l'Église (“ nous croyons ”) [37]. Les croyants sont assurément coopérateurs de la vérité et pour cette raison leur participation dans le processus de discernement faisant autorité est aussi dépendant du don du Saint-Esprit que le sont ceux auxquels sont confiées des charges dans l'Église. La contemplation et l'étude sont nécessaires pour ne pas réduire le sensus fidelium à un “ sondage d'opinion ou à un référendum sur les questions de foi ” [43]. Il y a là certainement un bon avertissement à notre époque postmoderne avec ses médias rapidement accessibles et sa mentalité consumériste.

Une théologie plus riche du sensus fidelium peut être tirée du récent rapport d'ARCIC II, Le don de l'autorité. En fait, le présent Rapport ne renvoie qu'au sensus fidei, non au sensus fidelium. Ce pourrait être pour éviter les malentendus qui viennent d'être mentionnés et c'est aussi le langage de Lumen gentium. Dans ARCIC II le sensus fidei est présenté comme une “ capacité – subjective - active de discernement spirituel ”. Il “ contribue à la formation du sensus fidelium par lequel l'Église comme telle reste fidèle au Christ ”.[5] L'attribut objectif du sensus fidelium (auquel les évêques doivent être attentifs GA 30) et son action effective (par son entremise GA 36) aide à élargir la modalité dans laquelle les laïcs sont témoins essentiels de l'Évangile [34]. Dire la vérité dans l'amour affirme fortement “ l'onction par l'Esprit de tous les baptisés, individuellement et ensemble ” [43]. En utilisant la notion de sensus fidelium de ARCIC II, le Rapport aurait été mieux en mesure d'identifier ce qui est en jeu, à savoir la foi de l'Église dont participe la charge de l'épiscopè, plutôt que n'importe quelle enquête sociologique d'opinion. ARCIC II fournit la terminologie théologique, Dire la vérité dans l'amour mesure le poids de la foi qu'exercent les fidèles dans l'amour et la vérité.

La section III de la première partie, Les moyens de grâce, serviteurs du Christ et de son Église, étudie plus explicitement la nature de la fonction d'enseignement dans chaque tradition. On ne s'étonne pas qu'elle lie fonction et moyens de grâce – ces derniers offrant bien plus de possibilités de convergence. Dans la logique de l'accent qu'il met sur le peuple de Dieu dans son entier et sur la dépendance de l'Église par rapport à l'action du Christ, le Rapport cherche à appliquer cette vérité à la reconnaissance des ministères particuliers comme “ agents du Seigneur et par là serviteurs de leurs frères et sœurs ” [49]. Dans ce contexte on cherche la convergence d'abord du point de vue des moyens de grâce, convergence dont le Rapport croit l'existence effective [61].

Les moyens de grâce sont une expression adoptée par les deux traditions, et qui recouvre pour les catholiques les notions de sacrements et de sacramentaux [57]. Des rapports précédents de la Commission ont déjà la conception sacramentelle de l'Église, qui part du Christ, sacrement primordial [54]. Dans le présent Rapport, les deux traditions continuent de relever leurs différences traditionnelles sur les sacrements, par exemple les deux reconnus d'un côté contre les sept de l'autre. Les méthodistes admettent cependant que les cinq autres sont des moyens prudentiels de grâce et ont une “ qualité sacramentelle ” [60]. On ne nie pas qu'il y ait des différences, et l'on continue de poser des questions à l'autre tradition, dans l'attente d'une suite de l'exploration [61]. A ce stade du dialogue, au-delà de ces différences typiques catholiques-protestantes (essentiellement sur la qualité garantie d'un sacrement), il y a la convergence plus intéressante sur d'autres moyens de grâce.

Comme on le disait plus haut, les fruits substantiels de ce dialogue bilatéral particulier sont les points communs partagés dans le domaine de la spiritualité, de la piété et de l'appel à la sainteté universelle. En même temps que les deux côtés continuent d'explorer des voies de convergence sur les sacrements, il est important d'avancer aussi dans ces autres domaines apparentés. Jean-Paul II a dit combien “ le témoignage commun de sainteté … a un potentiel œcuménique extraordinairement riche en grâce ” (Ut unum sint, 48). Quand les catholiques partagent leur pratique et leur expérience des sacramentaux (même si cela est toujours étranger aux méthodistes) et des pratiques spirituelles telles que les diverses formes de prière (non mentionnées dans ce Rapport), et que les méthodistes décrivent  des “ moyens institués de grâce ” qui incluent la prière, le jeûne, l'étude de l'Écriture, les œuvres de miséricorde et la Conférence chrétienne [58-59], la participation commune au Christ est fortement soulignée. En reconnaissant mutuellement la poursuite de la sainteté par les moyens de grâce, les différences dans la compréhension du ministère ordonné peuvent être abordées plus fructueusement.

Ces différences sont clairement exposées et non résolues dans ce Rapport. Elles tournent autour des implications de la pleine attribution sacramentelle au ministère ordonné. La convergence sur les moyens de grâce au sens le plus général, c'est-à-dire qu'ils sont “ des canaux de la fidélité de Dieu à sa promesse ” [61], ne comporte pas nécessairement l'accord dans ce domaine disputé. C'est précisément parce que les deux traditions ont tant en commun que la persistance des désaccords prend un tel relief.

La compréhension catholique du sacrement de l'ordre, spécifiquement la “ qualité garantie d'un sacrement ” [61], qui assure “ la présence active du Christ par la puissance du Saint-Esprit ” [68], est contestée par les méthodistes à cause de la faiblesse humaine, des limitations, du péché et de la faillibilité, spécialement du fait que ceci vaut de l'autorité de discernement et de proclamation normative. Les catholiques, de leur côté, interrogent les méthodistes au sujet “ des critères par lesquels ils vérifient qu'un moyen particulier est un canal fiable de la grâce de Dieu ” [61]. Non qu'ils nient l'affirmation méthodiste que le ministère ordonné est un moyen de grâce et un agent de l'œuvre de salut du Christ [62]. Le ministère de la parole et du sacrement n'exclut pas non plus “ un ministère d'autorité pour le bien de la connexion et communion de l'Église ” [63] dans lequel “ une relation nouvelle et permanente est établie avec le Christ et l'Église ” [64].[6] De plus, l'ordination est “ irrévocable et ne peut être répétée ”. ;[7] elle est d'une certaine manière mystérieuse une extension de l'incarnation et de la sacramentalité, initiés en effet “ par une action liturgique impliquant la prière de la communauté pour le don du Saint-Esprit adapté à la forme particulière de ministère ” [66]. Beaucoup de ces affirmations figuraient dans les précédents rapports de la Commission, de sorte qu'on se demande si Dire la vérité dans l'amour est vraiment plus qu'un progrès plutôt limité du dialogue.

Il est clair qu'au plan de la sacramentalité de l'ordre, des différences marquantes demeurent. Cependant, le ton général de cette section du Rapport cherche à mettre en relief la nécessité et l'efficacité des moyens de grâce. “ Nous sommes d'accord … que tous les moyens de grâce, sacrements ou sacramentaux, moyens institués ou moyens prudentiels, sont des canaux de la fidélité de Dieu à sa promesse ” [61]. Bien qu'un accord total ne soit pas en vue, les paramètres par lesquels une convergence peut être recherchée sont les bons. Il reste sous-entendu que le peuple de Dieu en se servant des moyens de grâce mène une forme de vie ecclésiale reconnaissable par chacune des deux communions.

Ceci est corroboré dans les sections suivantes où le Rapport spécifie plus en détail la nature de l'autorité doctrinale dans l'Église. Le ministère du Christ de témoigner par la prédication et l'enseignement est une tâche de l'Église entière. Laïcs et ministres ordonnés ont des dons complémentaires de discernement et d'interprétation de l'Évangile [70]. Comme dans le reste du document, il y a un fort investissement pneumatologique dans l’exactitude de cette affirmation.

La vigilance apostolique requiert le ministère de l'épiscopè, ce qui est reconnu dans les deux traditions, jusqu'au modèle triple des “ 1.évêques ou surintendants, 2. anciens, presbytres ou prêtres et 3. Diacres ” [71]. A nouveau le Rapport débat entre les différences et ce qui est commun. Les catholiques peuvent admettre que les évêques “ gardent, transmettent, enseignent et proclament, collégialement et individuellement, la foi apostolique comme elle est formulée dans l'Écriture et la tradition, et, selon qu'ils en sont rendus capables et conduits par le Saint-Esprit, interprètent cette foi évangéliquement et prophétiquement ” [75]. Cette citation du Livre de Discipline de l'Église Méthodiste Unie semble entériner les traits essentiels de la fonction épiscopale dans la vie de l'Église.[8] La configuration d'une telle autorité collective ne requiert pas qu'elle ait l'évêque de Rome à sa tête, et l'autorité n'inclut pas l'infaillibilité au service de l'indéfectibilité de l'Église. On soupçonne, cependant, que les méthodistes pourraient accorder aux catholiques que le ministère apostolique des évêques sert et garantit le don de l'apostolicité qui appartient à toute l'Église [75]. Le laïcat partage cette responsabilité à son plan et on ne peut lui contester le don de discernement qu'il reçoit en propre [77].

Des différences demeurent sur deux questions majeures : à savoir la nature de l'épiscopè exercée par le corps épiscopal comme tel, et jusqu'à quel point le laïcat participe à l'exercice de ce ministère. L'exercice catholique de l'épiscopè collective s'effectue à deux niveaux. D'abord, la communion des évêques du monde entier unis au Pape a son lieu dans le Collège épiscopal [76]. Bien que cela ne soit pas mentionné explicitement, le rassemblement d'évêques dans les synodes, les conciles œcuméniques, les visites ad limina des évêques à Rome, les conférences épiscopales régionales et nationales ainsi que les pèlerinages du Pape dans les divers pays, toute cela aide à faire de l'épiscopat un corps. Deuxièmement, au niveau du diocèse en tant qu'Église locale, les conseils pastoraux et les synodes diocésains sont également des manifestations de l'épiscopè collective dans la mesure où il y a là assistance à l'évêque dans son ministère de vigilance et d'enseignement [79]. Cependant, les méthodistes ont clairement une interprétation plus large de l'épiscopè collective que les catholiques.

La Conférence méthodiste est tellement centrale dans le méthodisme qu'elle est incluse dans le concept de l'épiscopè. On ne voit pas clairement si les évêques ou surintendants méthodistes exercent le ministère de vigilance à part de la Conférence. Un paragraphe déclare que même là où l'on a adopté un épiscopat, à vie ou non, la Conférence n'en demeure pas moins “ l'instrument par lequel toutes les questions de foi sont discernées, puis proclamées comme doctrine officielle ”. On va jusqu'à citer le Livre de Discipline de l'Église Méthodiste Sud-Africaine pour déclarer que la Conférence est l'autorité ultime en de telles questions [74]. Un autre paragraphe l'identifie comme exerçant “ une forme d'épiscopè collective ”, ceci dans le contexte qui dit que les deux traditions “ ont un sens vigoureux de la nature collective du ministère de vigilance ” [76]. Dans la troisième section de ce commentaire, j'examinerai si ces positions sont vraiment compatibles.

Pour ce qui est du rôle du laïcat, il est clair également que les deux communions affirment sa participation à l'autorité doctrinale. J'ai déjà fait allusion au sensus fidelium comme à un concept utile sur ce sujet. Le Rapport le relève à la lumière de la signification de la Conférence méthodiste “ où les laïcs sont présents en nombre significatif avec tous les droits de délibération et de décision ” [78]. La détermination normative de la doctrine, que cet organisme exerce, est quelque chose que les catholiques n'attribuent qu'au “ collège des évêques avec l'évêque de Rome à sa tête ” [78]. Ceci n'est pas pour nier que les catholiques incluent réellement les laïcs à différents niveaux de la vie de l'Église, mais cela ne suffit pas pour esquiver la question que leur posent les méthodistes sur le point de savoir pourquoi les laïcs ne peuvent pas être plus “ formellement intégrés aux instances de décision, même lorsqu'il s'agit de discernement et d'enseignement normatifs ” [79]. Pareillement, les catholiques interrogent les méthodistes pour savoir pourquoi on ne peut donner sur le même point une distinction plus formelle au ministère ordonné et aux évêques [80].

Tous les domaines de divergence sont renvoyés à des examens ultérieurs, spécialement ceux centrés sur “ les moyens de grâce garantis ou 'assurés' ” [82]. L'affirmation mutuelle que “ toutes les formes de ministère sont communes et collégiales ” et visent un ministère prophétique et missionnaire [81] laisse subsister un manque d'accord sur le degré de certitude que la prédication et l'enseignement sont “ vraiment ceux du Christ et de son Église ” [82]. L’expression est catholique, et quand les méthodistes répondent qu'ils peuvent être sûrs de l'essentiel, il y a accord aussi là-dessus. On diffère cependant sur ce qui est à compter comme “ essentiel ” [82]. L'accord sur le fait que l'autorité est une question d'amour et un moyen de grâce pour soutenir “ la sainteté de la vie,… la fidélité de l'enseignement, et … la participation à la mission de Dieu au monde ” [84] démontre la forte convergence que poursuit le Rapport et ne doit pas être sous-estimé. On doit cependant être reconnaissant à Dire la vérité dans l'amour d'enregistrer les difficultés qui subsistent.

 

II. Commentaire sur la deuxième partie

La deuxième partie du document se divise en deux sections intitulées : I. La compréhension et la pratique méthodistes, II. La compréhension et la pratique catholiques. Elle n'amène pas de nouveaux thèmes mais n'en constitue pas moins une section informative. Grâce à l'apport du contexte passé et présent on comprend plus aisément les théologies respectives des deux communions. Il n'est pas besoin de grand commentaire si ce n'est pour expliciter la manière dont l'histoire et la pratique importent aux problèmes de convergence et de différence théologiques du reste du Rapport. Quelques exemples suffiront.

Du côté méthodiste, on note la relation entre John Wesley et les formulaires doctrinaux anglicans [86,89,90] ainsi que la toute première émergence de la Conférence [90, 91, 94-96] et l'initiative de Wesley pour munir le méthodisme américain d'une liturgie, d'un ministère ordonné et d'une surintendance générale [92]. Ce dernier point pourrait en fait être développé, de manière à permettre de mieux voir si les méthodistes considèrent qu'il y avait là une urgence pour l'Église dans la nouvelle République, comparable à la situation des luthériens au seizième siècle, ou si elle est normative pour la suite de la pratique méthodiste.

Du côté catholique, on affirme que “ la diversité des vues et des expressions théologiques et la pluralité des rites liturgiques comme de la discipline canonique ” est compatible avec l'unité catholique [100]. L'Église catholique elle-même est décrite comme “ une communion d'Églises orientales et latines, dans chacune desquelles l'Église du Christ est vraiment présente ” [99]. L'épiscopat est compris, à la lumière du deuxième Concile du Vatican, comme contenant “ la plénitude du sacrement de l'ordre ” [101] et on présente une longue explication sur son rôle, en termes de charisme, d'autorité et de gouvernement ecclésial [105-110]. Un même soin est apporté à l'explication du ministère de l'évêque de Rome [111-116].

Tout ceci peut être exploité pour aider à élucider les questions ecclésiologiques systématiques discutées dans la première partie du Rapport. La conclusion de cette section et le Rapport fournissent un bref résumé des différences clés qui requièrent une poursuite de l'exploration. Les ressemblances sont spécialement intéressantes. Le “ ministère spécial de l'évêque de Rome pour proclamer la foi de tous les évêques et de toute l'Église ” est présenté à côté de la Conférence méthodiste comme “ l'autorité ultime pour l'interprétation de la doctrine ”, mais on note que la seconde n'est pas “ assurée d'être exempte de toute erreur ” [117]. D'autres différences incluent le manque d'accord complet sur les “ composants essentiels de l'Évangile ” [118], sur le rôle du laïcat en comparaison du ministère ordonné [119], et sur la relation entre l'ordination (et sa sacramentalité), l'autorité doctrinale et la conduite assurée du Saint-Esprit [120]. Tous ces points comportent une forte affirmation mutuelle de la dimension pneumatologique de l'exercice de l'autorité doctrinale par divers organes dans l'Église, et peut-être même une ressemblance entre les deux traditions dans leurs compréhensions respectives, en dépit de la “ différence de langage ” [121].

 

III. Réflexions critiques

Dire la vérité dans l'amour est clairement un pas de plus dans les relations œcuméniques entre les catholiques et les méthodistes, un pas dans le sens de “ la pleine communion dans la foi, la mission et la vie sacramentelle ” [15]. Mes commentaires critiques se concentrent sur six domaines qui appellent la poursuite de la réflexion.

Ce sont 1) la relation entre la doctrine et la vie, 2) le statut des normes doctrinales, 3) la pneumatologie, 4) l'interrogation mutuelle, 5) la sacramentalité de la fonction, 6) les limites de l'équivalence.

1) La relation entre la doctrine et la vie

Le Rapport reflète le fort investissement théologique dans le dialogue œcuménique. Tandis que les questions du Christianisme pratique (Life and Work) continuent d'informer les relations œcuméniques (comme il se doit), on ne peut ignorer les préoccupations de Foi et Constitution. Le travail théologique soigné, dans ce Rapport et dans les précédents (notamment La Parole de vie en 1996 et La Tradition apostolique en 1991) mérite tous les éloges. La division du Rapport en deux parties, l'une théologique et l'autre historique et pratique, contribue à souligner l'importance de la doctrine. La différence entre les deux traditions tient précisément au fait que leurs histoires respectives comportent des réceptions distinctes de la tradition apostolique. Il semble qu'on pourrait tirer un meilleur parti de ce fait. L'émergence de la Conférence méthodiste était une réponse aux tâches apostoliques de mission et de formation. La place qu'elles font à des membres laïcs, leur autorité finale en matière doctrinale et leur gouvernement pastoral pour l'Église représentent le domaine le plus conflictuel avec les conceptions catholiques de l'autorité doctrinale. La relation entre la réponse historique et la formulation théologique au sein de chaque tradition pourrait augmenter les possibilités d'une communion plus large l'une avec l'autre.

Une lecture alternative du méthodisme en tant que réalité ecclésiale pourrait rendre quelque service. On a déjà comparé le méthodisme aux ordres religieux de l'Église catholique.[9] On peut y trouver des ressemblances avec les chapitres généraux ou les congrégations qui décident des choix apostoliques et formulent la re-réception du charisme fondateur.[10] Cela vaut peut-être aussi de la Conférence méthodiste dans sa réception continue du charisme et de la mission de John Wesley.

Avec ceci en tête, il est intéressant de voir combien le Rapport se réfère à Wesley lui-même. Lui et les premiers méthodistes étaient conscients de leur responsabilité doctrinale à l'égard de l'Église universelle lorsqu'ils confiaient la supervision de l'enseignement à la Conférence et aux surintendants agissant en son nom [20]. Les méthodistes ont aussi soutenu que l'assistance et les dons de l'Esprit ont joué dans l'apparition de Wesley et du mouvement méthodiste [21, 51].[11] En quoi tout cela diffère-t-il de la pratique de considérer les normes doctrinales de Wesley lui-même [86] et ses préférences théologiques [89] comme normatives pour les méthodistes, d’autant plus qu'une désignation primitive de la Conférence indiquée par le Rapport fut de la décrire comme “ le Wesley vivant ” [91] ? Y a-t-il une possibilité pour les méthodistes de distinguer entre leur réception du charisme de Wesley et leur réception de sa doctrine relative à celle de l'Église universelle ?

En disant ceci, je ne pense pas tellement à l'orthodoxie doctrinale personnelle de Wesley, qui à mon avis est un avantage pour le méthodisme contemporain s'il continue de se l'approprier. Je vise plutôt le statut de la Conférence en distinguant entre son rôle comme arbitre des initiatives pastorales et missionnaires et son rôle comme autorité finale en ce qui concerne la doctrine [24, 74, 79, 93, 96, 117].[12] Le premier de ces rôles serait analogue à la direction de l'activité apostolique et à la réception du charisme dans les domaines de la formation, de la spiritualité et de la vie chrétienne exercées par les diverses assemblées des ordres religieux dans l'Église catholique et la doctrine de l'Église à laquelle ils continueraient d'adhérer. Ceci, bien sûr, distingue le méthodisme comme “ église ” des instituts de vie consacrée et des sociétés de vie apostolique dans l'Église catholique. Néanmoins il offre un modèle à considérer par la suite.

Les méthodistes, dans le passé, n'ont pas laissé les particularités doctrinales empêcher leur entrée dans des unions d'Églises telles que l'Église Unie du Canada et l'Église Unissante en Australie. On peut vraiment demander ce qui reste de leur héritage wesleyen dans ces Églises unies. La distinction ci-dessus peut peut-être aider à pousser le dialogue au delà de ce qui est une impasse dans les perspectives catholiques et méthodistes. Puisque ces deux traditions attestent leur fidélité à la foi apostolique et que la détermination d’un noyau formel de questions doctrinales (la “ hiérarchie des vérités ” du catholicisme, “ l'analogie de la foi ” ou le “ grand schéma de doctrine ” du méthodisme) est relativement rare, une concentration de la Conférence ou des évêques sur les aspects plus pastoraux de l'enseignement serait fructueuse pour les deux traditions. Au lieu de séparer on essaierait de renforcer le lien entre la doctrine et la vie.

2) Le statut des textes de référence (“ normes doctrinales ”)

L'importance de la doctrine soulève inévitablement la question des textes de référence. Comme l'atteste le Rapport, les deux traditions reconnaissant le Symbole des apôtres et le Credo de Nicée-Constantinople [11]. Cela a été relevé également dans les rapports précédents (La Tradition apostolique 38, La Parole de vie 112). On se réfère également aux Sermons de Wesley, à ses Notes explicatives sur le Nouveau Testament et aux Articles de religion [22, 96] comme textes de référence par lesquels (avec les credos) lire et interpréter l'Écriture. En outre, la notion d' “ analogie de la foi ” de Wesley ainsi que son “ grand schéma de doctrine ”[13] sont introduits comme compatibles avec l'accent mis par le deuxième Concile du Vatican sur la “ hiérarchie des vérités ”.[14] Dans un document sur l'autorité doctrinale on aurait besoin d'en savoir plus sur la manière dont cela se passe. On comprend que ces normes fonctionnent davantage comme les textes de référence analogues de la communion anglicane que comme les documents confessionnels des traditions luthériennes et réformées. Cela pose néanmoins des questions de plus.

Lorsque le Rapport dit que “ les Conférences méthodistes ont toujours accepté les Écritures comme la règle suprême de foi et de pratique et ont été guidées dans leur lecture des mêmes Écritures ” par ces règles, tout en déclarant que la Conférence a “ l'autorité ultime en matière doctrinale ” [96], le lecteur se demande malgré tout comment cela fonctionne. La Conférence peut-elle ou non dépasser les normes ? Quelle est la force de l'idée que l'on est “ guidé ” par elles ? Simples questions de clarification, qui voudraient aider à mieux mettre en lumière la réalité de l'exercice de l'autorité doctrinale.

En outre, il n'est fait aucune référence, dans le Rapport, au quadrilatère wesleyen – Écriture, Tradition, Expérience et Raison – si souvent invoqué par les instances méthodistes dans le but d'identifier les sources et les critères pour la théologie chrétienne. “ Wesley croyait que le cœur vivant de la foi chrétienne était révélé dans l'Écriture, illuminé par la tradition, vivifié dans l'expérience personnelle et confirmé par la raison ”.[15] Comment cela serait-il un facteur dans l'interprétation de l'autorité doctrinale dans l'Église ? Dans quelle mesure l'expérience et la raison fonctionnent-elles comme critères ? On veut croire que cela relève aussi de la Conférence. Ici encore, une conversation fructueuse avec les notions catholiques du sensus fidei et le rôle de la réflexion théologique peut être très profitable pour ce dialogue.

3) Pneumatologie

Comme on l'a noté, le Rapport mérite des éloges pour son vigoureux accent pneumatologique, qui a été une caractéristique du dialogue depuis le début. Dans sa présentation des deux traditions, le Rapport fait entendre tout du long la note pneumatologique. Deux domaines sont particulièrement frappants. Le Saint-Esprit se sert des moyens de grâce, et l'Esprit garde l'Église dans la vérité. Ces deux affirmations comportent des points de convergence et un manque d'accord. C'est pour cette raison que la concentration pneumatologique est particulièrement bénéfique pour le futur travail de la Commission.

En cadrant à la fois la convergence et le désaccord dans le registre de la pneumatologie le Rapport permet à chaque communion de reconnaître l'œuvre de l'Esprit chez l'autre, même quand elles n'ont pas encore atteint au plein accord. Par exemple, bien que les catholiques et les méthodistes ne soient pas encore d'accord sur la sacramentalité de l'ordre, les catholiques peuvent néanmoins reconnaître la présence de l'Esprit dans le discernement des ordinands et l'invocation du Saint-Esprit dans l'ordination liturgique des ministres méthodistes. Pareillement, les méthodistes peuvent n'être toujours pas d'accord que soit limité le rôle des laïcs dans l'exercice catholique de l'épiscopè. Néanmoins, ils peuvent reconnaître et entériner le sens catholique de la relation entre le sensus fidei du peuple de Dieu et le charisme d'autorité doctrinale des évêques dans leur diocèse et leur communion universelle entre eux et avec l'évêque de Rome. Ce sens du discernement de la manière dont l'Esprit opère dans l'autre communion et son affirmation ne sont pas accidentels dans le dialogue œcuménique,[16] car c'est seulement dans l'unique Esprit qu'on peut progresser vers la pleine communion.[17]

4) Interrogation mutuelle

Dire la vérité dans l'amour n'hésite pas à poser au partenaire du dialogue des questions brûlantes sur les problèmes clés pour la foi. Cela est également à saluer. Une fonction est à coup sûr aussi bien de faire ressortir les domaines qui requièrent une suite du dialogue que de clarifier les points précis de convergence et de différence. Ce rapport accentue de manière positive cette technique de dialogue assez classique par sa division en deux parties, la deuxième permettant à chaque tradition d'illustrer son exercice de l'autorité doctrinale. Elle empêche par là les questions discutées d'être séparées de la pratique réelle des Églises.

Un autre bénéfice de cette interrogation mutuelle de l'autre tradition est qu'elle ramène les interlocuteurs aux points majeurs de différence. Dans ce Rapport il devient tout-à-fait clair que la dimension garantie ou sacramentelle de la fonction est le vrai point de blocage entre les deux communions. En plusieurs occasions – et donc, déjà par la répétition – la difficulté est soulevée [61, 68, 80, 120]. Elle donne aussi à une tradition d'être capable de chercher dans sa compréhension et dans sa pratique ce que l'autre tradition apprécie comme signe de la présence et de l'œuvre de l'Esprit. Il y a là une exigence nécessaire pour la conversion et la fidélité à la vérité. Les deux ne s'opposent pas. Chacun peut rester fidèle à sa compréhension des questions tout en approfondissant cette fidélité par la conversion. Des exemples pourraient être une conversion méthodiste sur la question de la fidélité du Christ au ministère dans l'Église, tandis que les catholiques augmenteraient la participation du laïcat dans la réception et le maintien de la vérité.

5) La sacramentalité de la fonction

Comme on vient de le voir, la sacramentalité de la fonction est assurément le domaine majeur de différence entre les deux communions relativement à l'autorité doctrinale dans l'Église [120]. Impossible d'ignorer le problème. Le Rapport associe en effet le niveau d'autorité doctrinale des évêques avec les compréhensions respectives de l'ordination. Qu'en vertu de l'ordination le ministère soit non seulement un signe, mais  “ une garantie de la présence active du Christ par la puissance du Saint-Esprit, spécialement dans les actes particuliers de discernement et de proclamation normatifs ” [68] est ce qui divise les catholiques et les méthodistes. A ce stade il semble que chaque communion ne peut que continuer à presser l'autre de ses questions sur le sujet. Cependant, ne serait-ce que par la conclusion du Rapport, la poursuite de l'investigation est assurée.

Le domaine prometteur d'une convergence possible semble se trouver dans les dimensions liturgique et collégiale de l'ordination. Deux secteurs dans lesquels il existe déjà un degré de convergence. Liturgiquement, les méthodistes prient pour le don du Saint-Esprit “ approprié à la forme particulière de ministère ” pour l'ordinand. Ceci implique aussi un “ mandat sacré de toute la vie ” [66]. En plus, les deux traditions sont d'accord que le ministère ordonné représente et le Christ et la communauté chrétienne, et qu'il entre dans une relation permanente avec les deux [64]. Ces fruits fondamentaux de l'ordination sacramentelle ayant été maintenus dans le méthodisme (du point de vue catholique), il y aurait à être attentif à la nature du charisme reçu avec l'ordination, et à sa signification comme instrument par lequel le Christ garde l'Église fidèle dans la vérité de l'Évangile. Certainement que d'un point de vue méthodiste ce charisme doit jouer quelque rôle ici aussi.

Du point de vue catholique, deux autres facteurs seraient également à considérer. En premier lieu, on ne peut ignorer la réalisation liturgique du ministère dans la parole et le sacrement. La présence du ministre comme président liturgique de l'eucharistie est essentielle à la charge pastorale prise du point de vue de l'autorité doctrinale. On ne peut séparer l'une de l'autre. La présence sacerdotale du Christ dans l'assemblée, dans la personne du ministre, est intimement liée à sa présence comme berger et prophète. Deuxièmement, le ministère distinctif de l'évêque requiert aussi qu'on le prenne en considération. Pour le moment, les méthodistes n'ordonnent pas de ministres à l'épiscopat (ceux qui ont des évêques). Cependant le Rapport indique que les évêques ou surintendants ont une fonction doctrinale [80], assurent les ordinations (sur mandat de la Conférence) [96] et parlent au nom de la Conférence [19]. La disposition d'au moins un méthodisme - l'Église Méthodiste en Grande-Bretagne – à accepter l'épiscopat historique pour l'amour de l'unité chrétienne (union, sans doute, avec l'Église d'Angleterre) est également encourageante [74]. En poussant l'exploration on pourrait voir surgir de plus grands domaines de convergence là où tous ces éléments seraient pris ensemble.

L'autre domaine prometteur de convergence déjà existante est la compréhension collégiale du ministère ordonné [81]. En termes méthodistes on parle du caractère “ connexionnel ” du ministère [64]. Aucune compréhension de la sacramentalité de l'ordre n'exclurait cela. En fait, il est tout-à-fait essentiel.[18] Si les deux communions sont d'accord que l'Église elle-même est de nature sacramentelle [26], alors, par extension (au moins dans une certaine mesure !), cela doit affecter l'aspect connexionnel du ministère ordonné [64].[19] La compréhension, dans l'Église Méthodiste Unie aux USA, que le clergé n'est pas membre d'Églises locales (congrégations) mais de conférences annuelles (régionales), sous un évêque, semblerait corroborer cela. Quels aspects sacramentels d'un système connexionnel du ministère ordonné les méthodistes pourraient-ils reconnaître ?

6) Les limites de l'équivalence

Dire la vérité dans l'amour soulève une question importante pour le dialogue œcuménique catholique, question qui tend à faire surface dans tous les dialogues bilatéraux dès lors qu'ils abordent la question du ministère, de l'autorité et de l'ordre. C'est la question de savoir s'il y a équivalence entre les pratiques de l'épiscopè en commun et la compréhension et la pratique catholiques. Ceci, bien sûr, importe aussi particulièrement au dialogue avec les communautés ecclésiales de la tradition réformée.

Le présent Rapport ne dit pas qu'il y a équivalence, puisqu'il est en grande mesure une simple description de la théologie et de la pratique des deux communions et la recherche de domaines de convergence et des différences subsistantes. Cependant, les résultats de ce dialogue et les questions qui sont conseillées pour un dialogue futur soulèvent inévitablement la question. La question a été aussi sur l'agenda œcuménique d'une manière beaucoup plus explicite depuis la publication de Baptême, Eucharistie, et Ministère en 1982. Ce document distingue entre les dimensions personnelles, collégiales et communes du ministère ordonné (§ 26), tout en reconnaissant le triple modèle du ministère ordonné – évêques, presbytres et diacres (§ 19-25). J'ai déjà mentionné la nature collégiale ou connexionnelle (comme disent les méthodistes) du ministère ordonné. La question intéressante est celle de la relation entre la nature personnelle du ministère ordonné, et son exercice “ en commun ” ou collectif, spécialement pour ce qui est du ministère de l'épiscopè.

Il est intéressant que la découverte de ce Rapport (au moins pour le lecteur que je suis) est que la question n'est pas automatiquement résolue même là où existe un triple modèle de ministère – comme c'est le cas dans l'Église catholique et beaucoup d'Églises méthodistes. La référence ci-dessus à l'épiscopè collective laisse beaucoup de questions en suspens entre catholiques et méthodistes, la moindre n'étant pas ce que le BEM décrit sous la rubrique de l'exercice “ en commun ” (communal) du ministère, c'est-à-dire “ la participation effective de la communauté à la découverte de la volonté de Dieu et à la conduite de l'Esprit ” (§ 26). Ces questions sont soulevées aussi dans le récent document de Foi et Constitution. Là, l'accent est plus sur les formes personnelles et collégiales de l' épiscopè [91], c'est-à-dire surtout l'épiscopè des formes synodales (et presbytérales) ou épiscopales de gouvernement ecclésiastique.

Pour les catholiques, la question demeure. L'exercice en commun de l'épiscopè – celui d'une Conférence méthodiste – ou l'exercice collégial de l'épiscopè – comme dans un presbyterium réformé – équivaut-il à l'exercice personnel de l'épiscopè par un évêque dans l'Église catholique ? Les différences ne manquent pas d'être soulignées par les deux parties du Rapport, et ceci indépendamment des questions importantes relatives à la sacramentalité de l'ordre, à l'épiscopat historique et à la succession apostolique. On attend de voir si une solution est possible. Les catholiques continueront de plaider le rôle des évêques comme vicaires et ambassadeurs du Christ qui gouvernent les Églises particulières qui leur sont confiées.[20] L'exercice en commun et collégial de l'épiscopè implique-t-il (ce qui est l'essence de la sacramentalité) les attributs personnels (dans le sens trinitaire et christologique du terme) de l'autorité qui requiert en outre une expression et réalisation liturgique ?

Pour ces questions et bien d'autres, nous devrons être reconnaissants à la Commission pour son Rapport Dire la vérité dans l'amour. On espère que la Commission continuera son excellent travail dans la phase suivante, et on peut avoir confiance qu'il contribuera, comme le présent Rapport, à notre unité dans le Christ.

 

 

* Texte original anglais. Traduction du P. Daniel Olivier, a.a., et du Conseil pontifical pour la promotion de l’Unité des Chrétiens. Avertissement du traducteur : les appels de notes sont indiqués x, par contre les renvois au texte du Rapport sont indiqués […].

 

[1] L'exemple récent le plus frappant, en plus de nombreuses déclarations d'Églises individuelles et de communions ecclésiales, en est peut-être le document Foi et Costitution n° 181 du Conseil œcuménique des Églises, intitulé The Nature and Purpose of the Church. A stage on the way to a common statement (Genève, WCC/Foi et Constitution, 1998).

[2] L'influence de la Quatrième Conférence mondiale de Foi et Constitution du COE en 1963 à Montréal est bien connue. Sa distinction entre la Tradition et les traditions est pratiquement normative. Elle est à la base de l'autre récent document n° 182 de Foi et Constitution : A Treasure in Earthen Vessels. An instrument for an ecumenical reflection on hermeneutics (Genève, WCC/Foi et Constitution, 1998).

[3] Dans ce même paragraphe, il cite The Apostolic Tradition [21] : “ l'Écriture fut écrite dans la Tradition, cependant l'Écriture est normative pour la Tradition ”. Il cite aussi l'encyclique de Jean-Paul II Ut unum sint sur les exigences d'un plein consensus dans la foi concernant “ la relation entre l'Écriture sainte, comme l'autorité suprême en matière de foi, et la sainte Tradition, comme indispensable à l'interprétation de la Parole de Dieu ” [79].

[4] La même question surgit dans A Treasure in Earthen Vessels, comme une question non résolue, laissée ouverte, à Montréal. Voir § 18.

[5] Le don de l'autorité, 29 : Rapport de la Commission internationale anglicane catholique romaine (ARCIC II), cf. la Documentation Catholique (16 mai 1999), n. 2204, p. 464-492.

[6] Dans la perspective du méthodisme, certes, cela va avec une “ entrée dans une relation contractuelle avec tous les autres ministres au service du Christ ” [66].

[7] Cependant, pour les Églises méthodistes qui ont un épiscopat, l'attribution de l'épiscopat ne requiert pas une nouvelle ordination [66].

[8] Il faudrait noter aussi que l'Église méthodiste de Grande-Bretagne (actuellement sans évêques) est disposée à recevoir l'épiscopat historique pour l'amour de l'unité chrétienne [74].

[9] Par le co-président lui-même de la Commission, Geoffrey Wainwright. Voir son essai “ Location ecclésiale et vocation œcuménique ”, dans The Ecumenical Moment : Crisis and Opportunity for the Church (Grand Rapids : Eerdmans, 1983), 189-221.

[10] La notion de re-réception est utilisée dans le document d'ARCIC II, Le don de l'autorité : l'autorité dans l'Église, III. Il la définit comme la redécouverte d'éléments négligés, un souvenir neuf des promesses de Dieu, ou un “ tri de ce qui a été reçu parce que certaines formulations de la Tradition apparaissent inadéquates ou même trompeuses dans un nouveau contexte ” [25].

[11] Une de ses affirmations les plus primitives et les plus souvent citées était de Wesley lui-même. Les méthodistes furent suscités “ pour réformer la nation, particulièrement l'Église, et diffuser la sainteté scripturaire dans le pays ” [86].

[12] Le Rapport de 1990, La Parole de vie, consacre une section au discernement. Il distingue différents niveaux de discernement, par ex. le discernement prophétique et pastoral, et fait référence au rôle de la charge d'enseignement dans les deux traditions. Ma préoccupation est la distinction entre pareil discernement et l'établissement et l'interprétation de la doctrine.

[13] Le Rapport La Parole de vie est plus explicite sur ces questions. Un paragraphe [115] est consacré à la distinction wesleyenne entre les “ opinions ” et les doctrines essentielles de l'Évangile définies plus haut dans le rapport comme “ analogie de la foi ” [65]. La liste mentionne “ le Dieu un et trine ; la création du monde par Dieu et la vocation de l'humanité à la sainteté et au bonheur ; l'incarnation et l'œuvre rédemptrice de Dieu le Fils ; l'œuvre de l'Esprit comme source de toute vérité, de renouveau et de communion ; le besoin de l'humanité déchue de se repentir et de croire à l'Évangile ; le don de la grâce par Dieu dans la parole et le sacrement et l'institution et le rassemblement de l'Église ; le commandement de l'amour de Dieu et du prochain, et la promesse du Jugement dernier et de la victoire, lorsque tous les rachetés s'uniront pour glorifier Dieu et jouir de Dieu pour toujours ”. Le présent Rapport n'a pas cette liste, et il déclare qu'il n'y a pas d'accord sur “ les composants essentiels de l'Évangile ” [118]. Il est clair que la Commission mixte aura un jour ou l'autre à reprendre cela, comme le dit la conclusion.

[14] Décret sur l'œcuménisme Unitatis redintegratio, § 11.

[15] Voici l'intégralité du contexte de la citation, d'après le Livre de Discipline de l'Église Méthodiste Unie aux États-Unis § 104 :

Directives, sources et critères théologiques

Comme méthodistes unis, nous avons l'obligation de rendre fidèlement un témoignage chrétien à Jésus Christ, la réalité vivante au centre de la vie et du témoignage de l'Église. Pour remplir cette obligation, nous réfléchissons critiquement sur notre héritage biblique et théologique, nous efforçant d'exprimer fidèlement les témoignage que nous faisons en notre propre temps.

Deux considérations sont centrales pour cette entreprise : les sources dont nous dérivons nos affirmations théologiques, et les critères par lesquels nous vérifions l'adéquation de notre compréhension et de notre témoignage.

Wesley croyait que le cœur vivant de la foi chrétienne était révélé dans l'Écriture, illuminé par la tradition, vivifié dans l'expérience personnelle, et confirmé par la raison.

L'Écriture est première, révélant la Parole de Dieu “ autant que cela est nécessaire pour notre salut ”. C'est pourquoi notre tâche théologique, à la fois dans ses aspects critiques et constructifs, se concentre sur l'étude disciplinée de la Bible.

Pour aider son étude de la Bible et approfondir sa compréhension de la foi, Wesley invoquait la tradition chrétienne, en particulier les écrits des Pères, les symboles de foi œcuméniques, les enseignements des Réformateurs et les écrits de la spiritualité contemporaine.

Ainsi, la tradition fournit-elle à la fois une source et une mesure du témoignage chrétien authentique, quoique son autorité dérive de sa fidélité au message biblique.

Le témoignage chrétien, même fondé sur l'Écriture et médiatisé par la tradition, est inefficace s'il n'est pas compris et approprié par l'individu. Pour devenir nôtre il doit faire sens pour notre raison et dans notre expérience.

Pour Wesley, une solide présentation de la foi chrétienne requiert l'usage de la raison, à la fois pour comprendre l'Écriture et pour relier le message biblique à des champs plus larges du savoir. Il cherchait des confirmations du témoignage biblique dans l'expérience humaine, spécialement les expériences de régénération et de sanctification, mais aussi dans le “ bon sens ” de l'expérience quotidienne.

L'interaction de ces sources et de ces critères dans la théologie de Wesley fournit un guide pour la poursuite de notre travail théologique comme Méthodistes Unis. Dans ce travail, l'Écriture, comme témoignage constitutif à la source de notre foi, occupe une place d'autorité suprême parmi ces sources théologiques.

Pratiquement, la réflexion théologique peut aussi trouver son point de départ dans la tradition, l'expérience ou l'analyse rationnelle. Ce qui importe le plus est que les quatre lignes de repère soient mises en œuvre par une considération fidèle, sérieuse, théologique. Les idées qui naissent de l'étude sérieuse de l'Écriture et de la tradition enrichissent l'expérience contemporaine. La pensée critique et imaginative nous rend capables de mieux comprendre la Bible et notre histoire chrétienne commune.

[16] Voir le Décret sur l'œcuménisme du deuxième Concile du Vatican, Unitatis redintegratio 4 : “ Il ne faut pas non plus oublier que tout ce qui est accompli par la grâce de l'Esprit-Saint dans les cœurs de nos frères et sœurs séparés peut contribuer à notre édification. Rien de ce qui est réellement chrétien ne s'oppose jamais aux vraies valeurs de la foi, mais tout cela ne peut que contribuer à faire atteindre toujours plus parfaitement au mystère du Christ et de l'Église ”.

[17] Voir Ut unum sint 82 : “ L'un des éléments essentiels du dialogue œcuménique est l'effort accompli pour amener les Communautés chrétiennes dans l'espace spirituel tout intérieur où le Christ, par la puissance de l'Esprit, leur suggère, à toutes sans exception, de s'examiner devant le Père et de se demander si elles ont été fidèles à son dessein sur l'Église ”. Il est clair qu'une telle attention à l'Esprit exige aussi une conversion !

[18] Un simple exemple, tiré du côté catholique, suffit à illustrer cette compréhension particulièrement pénétrante (Lumen gentium 28) : “ Les prêtres, prudents coopérateurs de l'ordre épiscopal, dont ils sont l'aide et l'instrument, sont appelés à servir le peuple de Dieu, et constituent un seul sacerdoce avec leur évêque, aux fonctions diverses ”.

[19] La phrase suivante, au § 64 est en fait une citation du Rapport de 1971 de la Commission mixte : “ … la compréhension du ministère comme, d'une manière mystérieuse, une extension du principe incarnationnel et sacramentel … ”.

[20] Lumen gentium 26. La citation complète est : “ Les évêques, comme vicaires et légats du Christ, gouvernent les Églises qui leur sont confiées par leurs conseils, leurs exhortations, leurs exemples, mais aussi par leur autorité et leur pouvoir sacré, dont l'usage cependant ne leur appartient qu'en vue de l'édification en vérité et en sainteté de leur troupeau, se souvenant que celui qui est le plus grand doit se faire comme le plus petit, et celui qui commande comme le serviteur ”.